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"Traiter d’autres cas à l’avenir": la guérison d'un ado atteint d'un cancer du cerveau ouvre de grands espoirs

Dès l'annonce de sa maladie, Lucas a intégré un essai clinique au cours duquel il a été soumis à des séances de radiothérapie et à un nouveau traitement.

Un patient miraculé, qui déjoue tous les pronostics. Atteint d'un gliome infiltrant du tronc cérébral lorsqu'il était enfant, l'une des formes les plus redoutables des cancers du cerveau pédiatriques, Lucas, un adolescent belge de 13 ans, est désormais considéré comme guéri. Un événement unique au monde, qui suscite de grands espoirs pour la recherche.

Malgré les progrès dans la prise en charge des cancers pédiatriques, au centre d'une journée mondiale ce jeudi 15 février, cette tumeur touchant entre 50 et 100 enfants et adolescents chaque année en France, considérée comme incurable, représente un défi majeur pour le monde médical.

"On n'en croyait pas nos yeux"

En ce qui concerne le cas de Lucas, après la découverte de sa maladie, le jeune patient a intégré un essai clinique au cours duquel il a été soumis à des séances de radiothérapie et à un nouveau traitement. Le docteur Jacques Grill, pilote du programme Tumeurs cérébrales du département de cancérologie pédiatrique du centre anti-cancer Gustave-Roussy, se rappelle de sa surprise à la vue des premiers résultats.

"Durant la première année, la tumeur a disparu. On a continué les IRM, on n'en croyait pas nos yeux et on se disait ‘elle va réapparaître'", confie-t-il à BFMTV.

Finalement, "Lucas a explosé tous les compteurs de vie", ajoute le professionnel, cette fois-ci auprès de l'AFP. Malgré ces résultats miraculeux, le professeur a décidé de poursuivre le traitement médicamenteux. Jusqu'à ce qu'il comprenne, il y a un an et demi, que l'enfant avait lui-même cessé de le prendre.

"Un cas comme lui, je n'en connais pas d'autre dans le monde", confie le médecin, dont l'équipe a commencé les recherches sur ce cancer il y a une quinzaine d'années.

Si le taux de survie à cinq ans d'un cancer pédiatrique atteint désormais 85%, certains d'entre eux, dont le gliome infiltrant du tronc cérébral, restent un casse-tête pour le corps médical.

Recherches en cours

Reste maintenant à comprendre les raisons de cette guérison. Inopérable, ce cancer est traité habituellement par une radiothérapie, qui permet parfois de freiner la maladie mais dont l'effet est transitoire.

Aucun médicament n'a encore démontré son efficacité. L'évolution est en effet très rapide et l'issue généralement fatale dans les 9 à 12 mois suivant la découverte de la tumeur.

"La tumeur de Lucas présentait une mutation extrêmement rare et nous pensons que c'est cette mutation qui a rendu ses cellules tumorales beaucoup plus sensibles au médicament", ajoute le pédiatre, également chercheur à l'Inserm.

Dans un essai en cours (Biomède), qui compare le médicament reçu par Lucas à un nouveau traitement prometteur, les chercheurs de Gustave-Roussy étudient non seulement les anomalies génétiques des tumeurs de tous les patients mais fabriquent aussi des organoïdes tumoraux (copies 3D des tumeurs de patients réalisées en laboratoire) pour comprendre leur biologie et leur sensibilité aux médicaments.

"On a des modèles qui nous permettent de mimer certaines caractéristiques un peu complexes de ces tumeurs. Les choses qu’on va déduire à partir de sa tumeur vont sûrement nous permettre de traiter d’autres cas à l’avenir", développe auprès de BFMTV Marco Bruschi, postdoctorant spécialiste dans la génomique et l’oncogenèse des tumeurs cérébrales pédiatriques.

"Le cas de Lucas ouvre un vrai espoir: on va essayer de reproduire in vitro les altérations que l'on a identifiées dans ses cellules", fait valoir Marie-Anne Debily, enseignante-chercheuse supervisant ces travaux.

Un traitement d'ici 10 ou 15 ans?

Concrètement, les équipes médicales veulent découvrir si les altérations de l'ADN que présentait Lucas, une fois "reproduites" chez d'autres patients, se traduisent également par une diminution de leur tumeur.

Si c'est le cas, "l'étape d'après sera de trouver le médicament ayant le même effet sur les cellules tumorales que ces modifications cellulaires", indique Marie-Anne Debily.

Enthousiastes devant cette nouvelle "piste thérapeutique", les médecins préviennent cependant qu'il faudra des années avant de trouver un éventuel traitement curatif.

"Il s'écoule en moyenne 10 ou 15 ans entre la piste et le médicament, c'est un travail de longue haleine", termine Jacques Grill.

https://twitter.com/Hugo_Septier Hugo Septier Journaliste BFMTV