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TOUT COMPRENDRE - Le vaccin nasal, ça marche comment ?

Les chercheurs de l'Inrae et de l'université de Tours ont déposé, cette semaine, le brevet d'un candidat vaccin contre le Covid-19 par administration nasale.

Les premiers résultats sont jugés "prometteurs". Des chercheurs français son en train de développer un vaccin à injection par voie nasale contre le Covid-19. Les équipes de recherche de l'Inrae (l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement) et de l'université de Tours ont déposé jeudi le brevet d'un nouveau type de candidat vaccin contre le Covid-19: un vaccin à administration nasale. Mais de quoi s'agit-il exactement et quand pourra-t-on en faire usage? BFMTV.com fait le point sur cette nouvelle technologie scientifique.

· Comment fonctionnerait-il?

Dans son communiqué publié jeudi, l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement explique qu'il s'agirait d'un vaccin à base de protéines virales, encapsulées dans des nano-particules à base d'amidon et de lipides.

L'institut explique que "le candidat vaccin protéique anti-SARS-CoV-2 s’appuie sur l’expertise de l’équipe BioMap dans la conception de vaccins muqueux", dont les équipes ont "déjà réussi à développer un candidat vaccin efficace pour protéger les singes de la toxoplasmose". Ce vaccin, constitué de la protéine Spike et de protéines virales non soumises à mutation, "permettrait d’être protecteur quelles que soient les mutations virales et la souche de coronavirus circulante".

· Peut-on parler de spray nasal?

"On ne peut pas vraiment parler de spray nasal", insiste auprès de BFMTV Isabelle Dimier-Poisson, la responsable de l'équipe de recherche BioMaG. Le vaccin est bien injecté avec une sorte de seringue, mais il n'y a pas d'aiguille au bout de cette dernière. Celle-ci est remplacée par un petit adaptateur qui permet de diffuser le vaccin dans la cavité nasale.

· Quelle différence avec les vaccins actuels?

Selon l'Inrae et l'université de Tours, la plus-value de ce vaccin résiderait dans sa capacité à couper la transmission entre individus, en agissant directement sur la muqueuse nasale.

"Contrairement aux vaccins intra-musculaires, seuls les vaccins à administration par voie nasale seraient capables d'éviter la présence de virus dans le nez, stade initial de l'infection. Ils induisent en effet une immunité au niveau des muqueuses nasales, porte d'entrée et lieu de multiplication du virus", expliquent les chercheurs dans leur communiqué.

En effet, les études scientifiques montrent que les vaccins actuellement administrés dans le monde - ceux des laboratoires Pfizer/BionTech, Moderna ou encore AstraZeneca - contre le Covid-19 réduisent le risque de "porter le virus" et donc de le transmettre. Pour autant, il reste possible pour certaines personnes vaccinées d'attraper le virus.

Cette injection nasale "constituerait donc une vraie plus-value", selon les équipes, dans le sens où en agissant sur les muqueuses du nez, elles protégeraient davantage contre la présence de virus dans le nez et donc contre le risque de transmission." "Cette action précoce permettrait donc de lever les gestes barrières" aujourd'hui toujours nécessaires pour éviter le risque d'infection.

· Quel est l'intérêt de ce vaccin?

"L'idée n'est pas de se substituer au vaccin actuel", rappelle sur BFMTV Mathieu Epardaud, membre de l'équipe de recherche de BioMAP, "mais ce serait d'apporter une valance supplémentaire pour bloquer la contagiosité en utilisant le système immunitaire des muqueuses, du nez en particulier".

Les chercheurs anticipent le fait que ce vaccin nasal puisse servir de troisième dose de vaccin, de dose booster pour renforcer l'immunité de certains patients. Ils espèrent aussi qu'il puisse compléter l'offre vaccinale dans les pays pauvres et/ou moins avancés dans leur campagne vaccinale, et qui n'auront pas rattrappé leur retard d'ici l'année prochaine. Mais en raison de sa facilité d'injection, ce vaccin pourrait également être proposé aux publics de moins de 12 ans.

· Où en sont les essais cliniques?

L'Inrae et l'université de Tours ont fait savoir, jeudi, que les tests pré-cliniques de ca vaccin avaient montré des résultats "très positifs" sur des souris et des hamsters dorés.

"Les expériences ont montré que le vaccin arrête très précocement la transmission. Je travaille sur des animaux qui sont infectés: deux jours après, je constate que la charge virale dans les poumons est explosive. Si je regarde la même chose sur les animaux qui ont été vaccinés et infectés, je ne retrouve aucune trace du virus dans les poumons", précise la responsable de l'équipe de recherche BioMAP Isabelle Dimier-Poisson.

Selon la chercheuse, BioMAP a réussi à obtenir "100% de survie" sur des souris vaccinées puis infectées par le Covid-19, contre "100% de mortalité" sur des souris non-vaccinées. L'équipe de recherche espère démarrer dès l'automne la phase de production en vue d'une phase clinique lors du deuxième semestre 2022. La mise sur le marché est prévue pour 2023.

· Quand peut-on espérer une mise sur le marché?

Ce n'est pas pour tout de suite, préviennent cependant les chercheurs français, qui espèrent démarrer la phase de production dès l'automne en vue de débuter la phase clinique, la phase cruciale de tests sur les humains. Cette étape, qui permettrait de savoir si on peut généraliser son usage, pourrait intervenir au deuxième semestre 2022. Une mise sur le marché ne devrait donc pas intervenir avant 2023.

Jeanne Bulant Journaliste BFMTV