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Santé

Sclérose en plaques: un médicament contre l'allergie améliore la fonction cérébrale de patients

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Un essai clinique mené aux Etats-Unis a montré qu'un antihistaminique a permis de rétablir la fonction du système nerveux chez des patients atteints de sclérose en plaques depuis plusieurs années. Le médicament est capable de réparer les lésions au niveau d'une membrane, la myéline, considérées comme irréversibles en l'absence de traitement.

Il n'est pas rare de constater lors de travaux scientifiques que certains médicaments approuvés pour une condition médicale peuvent aussi s'avérer utiles contre des pathologies qui en sont très éloignées. C'est ainsi que des chercheurs de l'University of California, San Francisco mènent des essais cliniques pour montrer qu'un antihistaminique approuvé par la FDA peut rétablir la fonction du système nerveux chez les patients atteints de sclérose en plaques.

Le médicament en question, le fumarate de clemastine, serait capable de "réparer" les dommages que la maladie a infligé à la myéline, une membrane qui entoure les fibres nerveuses et accélère la transmission des signaux électriques. Dans la sclérose en plaques, les cellules qui fabriquent la myéline sont attaquées par un processus auto-immune (le corps attaque ses propres constituants). La myéline est endommagée et laisse place à des lésions épaisses et dures dispersées.

"Selon la localisation et l'importance de ces plaques, les informations qui transitent par le système nerveux sont plus ou moins perturbées.", explique l'Assurance maladie. Le fumarate de clemastine est quant à lui un médicament en vente libre aux Etats-Unis pour le traitement des allergies et du rhume sous forme générique depuis 1993. Son potentiel en tant que médicament potentiellement "remyélinisant" a été mis à jour par des chercheurs de cette même université en 2013.

La myéline est réparée...

Mais cet essai clinique de phase II dont les résultats viennent d'être publiés montre pour la première fois qu'il peut restaurer toute fonction cérébrale endommagée par une maladie neurologique chez des humains. "C'est la première fois qu'une thérapie a réussi à inverser les déficits causés par la SEP. Ce n'est pas un remède, mais c'est un premier pas vers la restauration du fonctionnement cérébral des millions de personnes atteintes de cette maladie chronique", indique le chercheur principal de l'étude, le Pr Ari Green.

Ces résultats sont d'autant plus intéressant que les patients de l'essai clinique souffrent de symptômes depuis plusieurs années, en raison des dommages causés à leur myéline. Car étant donné que les neurones perdent progressivement leur capacité à transmettre des signaux électriques de manière fiable, des symptômes comme une perte de la vision, de l'équilibre et de la coordination et des difficultés à marcher apparaissent.

"Les gens pensaient que ce n'est qu'avec les nouveaux cas que le médicament pourrait être efficace car si les dommages à la myéline sont récents, les chances de réparation sont fortes. Chez nos patients, la maladie dure depuis des années, mais nous avons vu des preuves de réparation.", ajoute le Pr Jonah R. Chan. À ce jour, aucun traitement ne guérit la sclérose en plaques, aucune molécule ne favorise la régénération de la myéline.

Et la transmission des signaux électriques rétablie

Ceux proposés visent à soulager les symptômes et réduire le nombre et l'intensité des poussées et l'inflammation aiguë liée à la maladie. Parce que le système visuel est souvent l'une des premières et plus importantes parties du cerveau touchées, et parce qu'il existe des outils pour mesurer la vitesse de la transmission neuronale dans les zones du cerveau consacrées à la vision, les chercheurs ont utilisé une méthode connue sous le nom de visual evoked potentials (VEPs) pour évaluer les effets thérapeutiques du médicament.

L'essai clinique d'une durée de cinq mois, a inclus 50 patients atteints de sclérose en plaques récidivante de longue date dont les VEP reflétaient des déficits de la transmission au niveau du système nerveux. Les chercheurs leur ont montré des images de "scintillement" sur un écran et ont utilisé des électrodes placées au-dessus des zones visuelles du cerveau, à l'arrière de la tête, pour évaluer le temps nécessaire au signal présenté à l'œil pour générer une réponse électrique pouvant être détectée par les électrodes.

Pendant les périodes où chaque groupe prenait le médicament, le signal neuronal de l'œil à l'arrière du cerveau était significativement accéléré par rapport aux mesures prises avant que les patients commencent l'étude. Les chercheurs ont constaté que l'effet a persisté dans un groupe de patients qui est passé au placebo, ce qui suggère une réparation durable de la myéline.

Ils ont cependant été limités dans leurs conclusions car il n'existe pas de méthode d'imagerie cérébrale capable de détecter la "remyélinisation" dans le cerveau. Outre la poursuite de leurs essais cliniques, ces derniers souhaitent maintenant mettre au point un système capable de mesurer de manière fiable et directe les signes de reconstruction de la myéline chez les participants.

Alexandra Bresson