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Santé

Pourquoi la mode des "chicken sashimi" est dangereuse

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Plusieurs médias américains mettent en garde contre une nouvelle pratique culinaire: le chicken sashimi. Un plat qui consiste donc à consommer du poulet cru, ce qui expose au risque d'intoxication alimentaire en raison de la présence de plusieurs bactéries qui n'ont pas été éliminées.

S'il n'est pas impossible de manger des aliments crus au restaurant, comme des sushis ou des tartares, ce type de plat reste néanmoins minoritaire. Aux Etats-Unis, certains restaurant proposent une nouvelle spécialité dans ce domaine, un plat de poulet pratiquement cru appelé "chicken sashimi" (sashimi au poulet). Il s'agit d'un dérivé du sashimi classique à base de thon ou de saumon que l'on trouve dans la gastronomie japonaise, comme le montre des photos postées sur Instagram.

Un phénomène qui trouverait donc son origine au Japon, comme l'explique le site Food & Wine, premier à s'interroger sur sa dangerosité. En cause, la présence de bactéries à l'origine de gastro-entérites ou d'intoxications alimentaires plus ou moins sévères, le Campylobacter et la Salmonella. Car le "chicken sashimi" est souvent préparé en faisant bouillir ou cuire le poulet pendant 10 secondes pas plus, une durée insuffisante pour les tuer.

Les salmonelles sont des bactéries qui peuvent être présentes dans le tube digestif des mammifères (porcs, bovins) et des oiseaux (volailles domestiques) sans que ceux-ci ne présentent de symptômes. Selon l'Anses*, la contamination de l’homme se fait généralement par le biais d’aliments souillés (principalement par les aliments crus) mais aussi par contact avec des individus ou animaux infectés.

Un danger pour les personnes fragiles

"Les aliments les plus fréquemment impliqués sont les œufs et les produits à base d'œufs crus ou ayant subi un traitement thermique insuffisant, les produits laitiers, ainsi que les viandes peu cuites", explique-elle. L'infection par ces bactéries se manifeste par une gastro-entérite aiguë, généralement éliminée en quelques jours mais certaines personnes peuvent présenter une sensibilité particulière, notamment celles sous antibiothérapie et au système immunitaire affaibli.

"Les infections par des bactéries du genre Salmonella représentent la deuxième cause de maladies d’origine alimentaire en Europe.", ajoute l'Anses. La Campylobacter, quant à elle, se retrouve souvent sur les carcasses des volailles.

"Après abattage, cette bactérie présente dans le tube digestif peut se retrouver sur la peau de la volaille, mais jamais dans le muscle", affirme le ministère de l'Agriculture.

Selon un rapport de l'Autorité européenne de sécurité des aliments de 2008, environ 75% des carcasses de poulets sont contaminés par des campylobacters dans l'Union européenne. Cette bactérie est peu résistante au froid et à la chaleur mais son ingestion peut provoquer des campylobacterioses, des maladies relativement fréquentes, "avec plus 300 cas par million d’habitants par an en France".

Des mesures de précaution indispensables

Cette pathologie se caractérise par une entérite aiguë (diarrhée, douleurs abdominales, selles sanguinolentes, fièvre, maux de tête, vomissements) elle-même causée par une infection intestinale. Elles restent cependant généralement bénignes mais les personnes dont le système immunitaire est fragile (à la suite d’un traitement ou d’une maladie, personnes âgées, femmes enceintes) peuvent y être plus sensibles.

"Les symptômes se manifestent de 1 à 10 jours après contamination et l'infection guérit souvent spontanément après 7 à 20 jours, mais peut être traitée par des antibiotiques dans des cas plus graves chez des personnes fragiles", ajoute le ministère de l'Agriculture. En juillet dernier, le ministère de la Santé japonais a donc publié une mise en garde indiquant que manger du poulet cru représentait un risque sérieux d'intoxication alimentaire et a demandé aux restaurants de cuire la viande à au moins 75°.

"Le sashimi au poulet est habituellement coupé à partir de la poitrine intérieure d'un poulet, qui comporte le moins de risques de contamination par la salmonelle. Cependant certains restaurants coupent à partir des cuisses, du foie ou de la poitrine externe, où les bactéries peuvent être plus communes", souligne aussi le site Food & Wine.

C'est pourquoi les experts interrogés recommandent de toujours demander l'origine de ces morceaux de viande avant de les consommer.

Et les sushis classiques?

A noter que le risque n'est pas le même avec les sushis classiques puisque en ce qui concerne le poisson cru, les germes les plus susceptibles de rendre une personne malade sont des parasites. Or, certaines mesures permettent de limiter le risque parasitaire avant consommation, comme le précise l'Observatoire des aliments: l'éviscération, la chaîne du froid (qui empêche le parasite d’évoluer) et la congélation (à -20° au minimum 24 h).

De manière générale, il est possible de prendre des précautions contre ces bactéries en respectant la chaîne du froid et en lavant ses mains, plans de travail et ustensiles après contact avec des aliments crus pour éviter une contamination. Il est aussi recommandé de conserver les aliments crus séparément des autres et, bien sûr, de cuire ou réchauffer les aliments crus d'origine animale ou les plats prêts à consommer à plus de 65°C.

*Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement
et du travail

Alexandra Bresson