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Santé

Pourquoi « il faut se faire vacciner »

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A quelques jours du début de la campagne de vaccination contre la grippe A, qui inquiète beaucoup de Français, un médecin tente de rassurer.

La vaccination des professionnels de santé contre la grippe A connaît un succès mitigé. Et les enquêtes d'opinion suggèrent qu'il en sera de même pour la campagne à destination de l'ensemble des Français, qui débutera le 12 novembre et durera 4 mois. Mais Patrick Berche, médecin bactériologiste, chef du service de microbiologie à l'hôpital Necker-Enfants malades de Paris, se veut rassurant.

« Tous les tests classiques ont été faits »

Si le vaccin contre la grippe A inquiète, c'est notamment parce qu'on sait que pour tester un vaccin, il faut des années et que celui-ci est très vite apparu. « Je n'ai aucune crainte, affirme Patrick Berche. Je me suis fait vacciner et j'attends avec impatience d'avoir le vaccin pour mes enfants. Je n'ai eu qu'une rougeur pendant 48h, c'est tout, et je me sens en pleine forme !
On a quand même du recul sur le vaccin antigrippe, puisqu'on l'utilise depuis 30 ou 40 ans. Là, la nouveauté c'est que l'on met un nouveau virus dedans. Un virus qui ne mute pas, très stable pour l'instant ; donc le vaccin est efficace. Tous les tests classiques d'efficacité et d'innocuité ont été faits, sur environ 22 000 volontaires. Et selon l'OMS, 22 millions de personnes ont reçu l'adjuvent avec le vaccin antigrippe saisonnier. »

« Une grippe bénigne... sauf pour les personnes fragiles »

Convaincu de l'efficacité de ce vaccin, Patrick Berche en souligne l'intérêt pour les plus fragiles [pour savoir si vous êtes concerné, consultez la liste des personnes prioritaires] : « Il y a un problème de perception du risque. 85% des Français pensent - et ils ont raison - que c'est une grippe bénigne, sauf pour les 13 millions de personnes fragiles [dont les enfants de moins de 2 ans, les diabétiques et toutes les personnes qui ont des infections pulmonaires chroniques...] Le problème de la vaccination, c'est le bénéfice-risque, qui est énorme pour les personnes fragiles : une femme enceinte qui peut perdre son enfant et qui peut mourir, a intérêt à se faire vacciner. »

« Médecins et infirmières ont une grande responsabilité »

Rappelant qu'« au point de vue mortalité, cette grippe A est à peu près similaire à la grippe saisonnière », Patrick Berche appelle fermement ses confrères réticents à se faire vacciner : « Dans la grippe saisonnière, on vaccine, ajoute-t-il. L'année dernière, 8 millions de Français ont été se faire vacciner. Et dans mon hôpital par exemple, le taux de vaccination des médecins pour la grippe saisonnière est de 45% - ce qui n'est pas encore suffisant. Les médecins et les infirmières portent une responsabilité formidable. Parce que s'ils ne sont pas vaccinés et qu'ils introduisent le virus de la grippe dans des secteurs de l'hôpital où il y a des patients très fragiles - des transplantés rénaux, des cancéreux sous chimiothérapie... - on aura des épidémies catastrophiques. Donc il faut qu'ils se fassent vacciner. »

« Toutes les vaccinations donnent ce taux d'incidents »

Interrogé sur la dangerosité du vaccin, il poursuit : « La médecine est basée sur des preuves. Or, actuellement on est dans le fantasme. On est le pays de Pasteur, où la vaccination a fait disparaître un certain nombre de maladies. Le risque est faible : 1 chance sur 10 000 de mourir. Mais quand ça vous arrive à vous ou à vos enfants... Je pense que prendre ce risque, contre une petite rougeur qui peut vous apparaître ou un risque complètement hypothétique, non basé sur des preuves, de moins de 1 pour 100 000 incidents. Toutes les vaccinations donnent des incidents au même taux que ça. Si vous vous faites vacciner contre la diphtérie ou le tétanos, vous aurez des réactions secondaires. »

« Que les experts disent leurs liens avec les laboratoires »

Les conditions dans lesquelles le gouvernement français a commandé 94 millions de vaccins continuent de faire débat. Le groupe d'expertise et d'information sur la grippe A (Geig) serait en effet financé à 100% par 5 grands laboratoires pharmaceutiques. « C'est vrai apparemment, confirme Patrick Berche, avant de poursuivre : il faut travailler dans la transparence. Je pense qu'il faut que les experts qui s'expriment disent leurs liens avec les laboratoires. Je n'en ai aucun ; je suis totalement libre et n'ai jamais été dans un comité scientifique pour la grippe et de toute façon je refuserais. [...] C'est normal que les experts soient consultés par l'industrie. Le problème, c'est qu'il ne faut pas qu'il y ait de conflit d'intérêts. Et je pense qu'il ne faut pas mélanger les deux débats. Il y a "faut-il se faire vacciner ?", d'une part - c'est un problème médical -, et d'autre part "est-ce que les experts ont été sous pression de quoi que ce soit ?". Moi je crois à l'honnêteté des gens : on peut très bien être pour la vaccination et avoir donné des conseils à tel ou tel laboratoire. »

Pour écouter l'intégralité de l'interview de Patrick Berche, cliquez ici.

La rédaction-Bourdin & Co