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Santé

Lutte contre le tabac, les raisons d'un échec

Le rapport de la Cour des comptes préconise une augmentation des prix.

Le rapport de la Cour des comptes préconise une augmentation des prix. - -

Un rapport publié par la Cour des comptes dresse un bilant très critique de la politique de lutte contre le tabac. En fait, le nombre de fumeur n'a pas baissé, malgré les nombreuses augmentations de prix et les nouvelles lois anti-cigarettes.

La lutte contre le tabac est un échec. C'est le constat fait par un rapport de la Cour des comptes. Intransigeant, le texte pointe les failles et les échecs de la politique française de lutte contre le tabagisme : discontinuité des décisions, manque de contrôle, lobbies trop puissants. Et, non, la France n'a pas réussi à réduire le nombre de ses fumeurs.

Depuis 2005, la consommation ne baisse plus. Pire, depuis 2011, "on observe une inquiétante progression du tabagisme, en particulier chez les femmes, les jeunes et les personnes en situation de précarité", estime Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes.

"Les risques liés au tabagisme, qui constitue de très loin, avec 73.000 décès par an - soit 200 morts par jour -, la première cause de mortalité évitable en France, sont encore gravement sous-estimés par la population", ajoute-t-il.

"Le tabac est de loin la première cause de décès évitable, bien plus que l'alcool (environ 30.000 décès), les suicides (10.000 décès) et les accidents de la route (4.000 décès)", a-t-il martelé en constatant que les moyens : prévention, contrôles et sanctions n'étaient pas à la hauteur des enjeux.

Consommation en augmentation chez les femmes, les jeunes et les pauvres

Le Monde.fr relève "a titre d'exemple" qu'un buraliste a statistiquement une "chance" sur 100 d'être contrôlé par les Douanes. L'interdiction de vendre du tabac au mineur fait tout de suite moins peur. 

Les campagnes de sensibilisation ? L'Etat y consacre 100 fois moins d'argent que pour la Sécurité routière alors que le tabac fait presque vingt fois plus de morts que la route, note Europe 1.

Quant à l'augmentation des prix, elle ne produit des effets que si la hausse est radicale (comme en 2003). Or, depuis qu'un moratoire fiscal a été décidé, les hausses de prix nombreuses, mais peu élevées, n'ont plus eu d'influence sur la consommation.

Autres exemples d'incohérence : les 300 millions d'euros par an (2,6 milliards entre 2004 et 2011) d'aides aux buralistes, alors que "seulement quelques dizaines de millions d'euros au tabac en terme de communication sont consacrés à la prévention".

Augmenter les prix et interdire l'exposition des paquets sur les lieux de vente

La Cour recommande donc de revenir à "une politique volontariste de relèvement des prix du tabac, suffisamment marquée" pour diminuer la consommation. Elle demande également l'adoption des paquets neutres et l'interdiction de les exposer sur les lieux de vente... apparemment persuadée qu'un voile noir (par exemple) devant les paquets de cigarettes pourrait faire baisser la consommation

La Cour des comptes préconise plus généralement de redéployer les moyens en faveur de la prévention, de l'aide à l'arrêt du tabac et d'un renforcement des contrôles.

Les recommandations seront-elles toutes suivies ? Le rappot point en tout cas un paradaxe, note Europe 1, si l’Etat veut dissuader les fumeurs, le tabac lui rapporte quand même 15 milliards d’euros par an. Un conflit d’intérêts notable.

La Commission européenne prépare son projet de loi

De son côté, la Commission européenne devrait présenter mercredi prochain un projet de loi sur le tabac. "Nous proposerons de modifier les paquets de cigarettes avec des avertissements de santé plus grands, entre autres, et de davantage réguler les arômes et ingrédients", a rapporté le porte-parole du commissaire en charge de la Santé, Frédéric Vincent.

Plusieurs fois annoncée, la révision de la directive sur le tabac avait reportée a maintes reprises. "Si tout se passe bien, la directive Tabac sera effectivement adoptée mercredi prochain", a ajouté Fédéric Vincent.