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Santé

Les porteuses d'implants PIP, entre peur et colère

Colère, peur et sentiment d'avoir été trahies par leur chirurgien : les Françaises porteuses de prothèses mammaires défectueuses de la société PIP, qui utilisait un gel non conforme, se demandent comment ce scandale a pu arriver. /Photo prise le 26 décemb

Colère, peur et sentiment d'avoir été trahies par leur chirurgien : les Françaises porteuses de prothèses mammaires défectueuses de la société PIP, qui utilisait un gel non conforme, se demandent comment ce scandale a pu arriver. /Photo prise le 26 décemb - -

par Alice Cannet PARIS (Reuters) - Colère, peur et sentiment d'avoir été trahies par leur chirurgien : les Françaises porteuses de prothèses...

par Alice Cannet

PARIS (Reuters) - Colère, peur et sentiment d'avoir été trahies par leur chirurgien : les Françaises porteuses de prothèses mammaires défectueuses de la société PIP, qui utilisait un gel non conforme, se demandent comment ce scandale a pu arriver.

Atteinte d'une mastite, une infection du sein, Hélène Guillois, de Valenciennes (Nord), porte des implants PIP depuis juin 2006. Cette étudiante de 29 ans, opérée pour un coût de 4.000 euros, cherche toujours une solution pour financer l'explantation de ses prothèses et la pose de nouvelles.

L'opération, décidée au terme de deux années de réflexion, visait à remonter et élargir la poitrine de la patiente, victime d'un affaissement mammaire, suite à une période d'allaitement.

Son chirurgien l'a convaincue que les prothèses PIP étaient les mieux adaptées et a garanti qu'elles dureraient toute sa vie. Peu après l'opération pourtant, Hélène Guillois a décelé un problème avec sa prothèse gauche.

"La prothèse n'avait pas la même qualité en apparence que la droite et j'ai vite ressenti des petites brûlures", a-t-elle déclaré par téléphone à Reuters. "J'ai vérifié ma carte de porteuse et j'ai contacté mon chirurgien. Il était très optimiste et selon lui, il n'y avait rien d'alarmant. J'étais en colère car c'est lui qui m'avait mis les implants."

"Mon sein gauche me faisait de plus en plus mal ces dernières semaines et mois. Maintenant, j'ai du liquide autour de mes deux prothèses, on me dit que ce n'est pas grave. J'ai attrapé une mastite au sein gauche et j'ai un gros terrain inflammatoire", déplore-t-elle.

A Istres (Bouche-du-Rhône), Nathalie Lopez a décidé en décembre 2004 de se faire poser des implants pour mettre un terme à un complexe hérité d'un retard de croissance dû à un accident vasculaire cérébral quand elle avait 11 ans.

CONFIANCE

Le chirurgien qu'elle a rencontré lui a proposé les implants PIP à base de silicone malgré son souhait d'avoir des implants à base de sérum physiologique.

"Il m'a dit que c'étaient les seules prothèses avec lesquelles il travaillait. Je n'ai pas trop posé de questions. J'ai fait confiance à mon chirurgien comme une patiente ferait confiance à n'importe quel autre docteur."

Cette femme de 38 ans n'a pas été mise au courant de la marque de ses implants et n'a pas reçu de carte de porteuse comportant le numéro de série des implants.

Il y a dix jours, Nathalie Lopez a commencé à s'inquiéter après avoir appris qu'une porteuse de prothèses PIP opérée par le même chirurgien était victime d'un cancer de la peau.

"On m'a dit que je portais des PIP. Et là, ça a été le choc total. J'ai pris rendez-vous chez le chirurgien qui m'avait opéré et qui m'a proposé 3.500 euros pour une nouvelle opération", souligne-t-elle.

"Je lui ai demandé pourquoi il ne m'avait pas contacté alors qu'il savait que je portais des PIP. Il m'a répondu : 'vous croyez que nous n'avons que ça à faire' ?"

Finalement, une mammographie a révélé une fissure à la prothèse gauche. Par la suite, la femme, qui a porté plainte contre PIP, a fait appel à un médecin basé à Nice qui opère les femmes victimes d'implants défectueux à des tarifs bas.

Pour l'opération, qui a eu lieu le 23 décembre, et a coûté 1.600 euros, dont une partie prise en charge par la sécurité sociale, Nathalie Lopez a dû emprunter l'argent à une amie. La première opération avait coûté 3.500 euros.

"Aujourd'hui, je suis au chômage et j'ai du mal à m'en sortir. J'ai un gros découvert sur mon compte. Je ne sais pas comment je vais faire. Donc c'est très dur", explique-elle.

GANGLIONS DOULOUREUX

Dans le Var, à Six-Fours, Emmanuelle Maria a également été opérée en juin 2010 pour remplacer ses prothèses PIP qui s'étaient fissurées, provoquant des ganglions douloureux.

"Je me suis fait poser des implants car j'ai une maladie orpheline. J'avais besoin de retrouver un regard positif sur moi-même", dit la jeune femme, qui a aujourd'hui 29 ans.

Elle a fait appel à un médecin de Toulon qui lui a proposé la marque PIP, dont la forme se rapproche du sein naturel.

L'opération, qui a eu lieu en septembre 2007, a coûté 4.000 euros et les prothèses devaient durer de 15 à 20 ans.

"Au mois de février 2010, peu avant que l'affaire explose au grand jour, des douleurs sont apparues. Par la suite, des ganglions sont sortis au niveau des aisselles", dit-elle.

Après des diagnostics divergents, son médecin traitant lui a indiqué que les deux prothèses étaient bel et bien fissurées.

"C'est trois mois à ne pas dormir, à ne pas manger, à se demander ce qui se passe. Le chirurgien me disait que mes douleurs étaient dans ma tête. Il a fallu que je prouve que j'avais réellement un problème avec les prothèses", dit-elle.

Si elle se dit satisfaite de la prise en charge de l'extraction des implants promise par le gouvernement français, elle estime que la responsabilité du chirurgien reste à déterminer et regrette le peu d'attention porté au problème.

A Cannes, Audrey Gilles, dont les implants PIP posés en juin 2007 pour un montant de 8.000 euros avaient été garantis à vie par le chirurgien, a également dû être réopérée en mai 2011.

"Je n'étais pas au courant que j'étais porteuse PIP", dit-elle. Lorsqu'elle a compris en 2011 que c'était le cas, elle a eu "l'impression que le ciel (lui) était tombé dessus."

Son chirurgien suisse lui a conseillé de ne pas s'alarmer et lui a proposé d'être réopérée pour un montant de 5.000 euros. L'assistante maternelle de 32 ans a préféré se tourner vers un médecin français pour la nouvelle opération (2.600 euros).

Edité par Yves Clarisse