BFMTV
Santé

Les huiles essentielles contre les poux, une mauvaise idée

-

- - -

Pour se débarrasser des poux, il est indispensable de suivre un traitement. Mais ceux à base d'huile essentielle de tea tree et de lavande sont déconseillés, rappelle l'association 60 millions de consommateurs qui fait savoir que leurs dangers sont peu documentés mais certaines études indiquent qu'elles pourraient agir comme des perturbateurs endocriniens.

Bruns, blonds ou roux... aucune tête n’est épargnée par les poux même avec une hygiène irréprochable. Pour se débarrasser et éviter de transmettre ces insectes qui apprécient la promiscuité et la vie en collectivité, le seul réflexe consiste à traiter la tête des personnes concernées: toutes celles qui ont des poux doivent être traités le même jour, par exemple le samedi, car une tête non traitée peut transmettre de nouveau des poux à son entourage et tout est à refaire.

Pour cela, on achète en pharmacie un produit qui tue d’un seul coup les poux et les lentes. Mais ce choix ne doit pas se faire à la légère, car un type de produits est fortement déconseillé malgré l'engouement qu'il suscite. L'association 60 millions de consommateurs rappelle en effet que l'usage d'huiles essentielles n'est pas recommandée alors que depuis quelques années, une abondante offre de produits antipoux en contenant s’est développée en pharmacies.

Ce sont surtout deux huiles essentielles très populaires qui sont vendues: celle de lavande et d'arbre à thé (tea tree), également citée dans plusieurs "recettes artisanales antipoux sur le web", précise-t-elle. Un essor sans précédent qui s'explique par l'engouement des consommateurs pour les ingrédients naturels quitte à oublier que les huiles essentielles ne sont pas inoffensives, en particulier chez les enfants.

Un effet sur les hormones de jeunes garçons

Car non seulement les actifs incorporés dans ces produits peuvent provoquer plusieurs effets indésirables en cas de mésusage, mais l'huile de lavande et d'arbre à thé sont aussi soupçonnées de toxicité. Preuve à l'appuie, l'association évoque un bulletin d'information du centre antipoison de Lille publié en 2016 qui décrivait trois cas de poussée mammaire anormale chez des jeunes garçons (le terme médical employé est "gynécomastie").

Des symptômes qui pourraient être provoqués par "une éventuelle stimulation œstrogénique des composants de l’huile essentielle de lavande", selon les auteurs du bulletin qui précisent que l'huile de tea tree est également suspectée. En clair, elles agiraient comme des perturbateurs endocriniens, résume 60 millions de consommateurs. Ces trois cas ne sont pas isolés puisqu'en 2007 déjà, une équipe américaine publiait une mise en garde dans la revue médicale New England Journal of Medecine.

Les chercheurs expliquaient que des cosmétiques formulés avec des huiles essentielles de lavande et d’arbre à thé étaient responsables de poussées mammaires chez trois garçons âgés de 4, 7 et 10 ans. Un phénomène qui s'explique par le fait que ces huiles essentielles "imitent" les hormones sexuelles féminines mais inhibent l’action des hormones masculines. "Ce déséquilibre entraîne ainsi une féminisation qui se manifeste par l’apparition de seins", expliquait alors le quotidien 20 Minutes qui relayait l'étude.

Renforcer l'information auprès de la population

Sur le sujet, l'Assurance maladie déconseille également l'utilisation d'huiles essentielles qui, selon elle, "n'ont pas fait la preuve de leur efficacité et peuvent être responsables d'allergie." Mieux vaut utiliser les produits insecticides qui détruisent le système nerveux des poux. "Ils sont composés soit de pyréthrines, soit de malathion, soit d’un mélange des deux. En première intention, il est recommandé d’utiliser du malathion: les poux y sont moins résistants qu'aux pyréthrines", indique-t-elle.

Si les poux persistent malgré deux traitements distincts bien conduits, la seule solution consiste à consulter un médecin. D'autant que 60 millions de consommateurs fait également savoir que la potentielle toxicité de ces huiles essentielles reste très peu étudiée. Si l'Anses* dit mener des travaux dans ce domaine, "en partie sur des données collectées par les centres antipoison", un porte-parole affirme à l'association que "le caractère de “perturbateurs endocriniens potentiels” n'entre pas dans leurs champs."

C'est pourquoi celle-ci recommande d'appliquer le principe de précaution devant ce constat paradoxal: les autorités de santé déconseillent l’usage des huiles essentielles chez l’enfant mais, dans les faits, des produits qui en contiennent en particulier ceux antipoux, leur sont dédiés. "Les autorités de santé doivent a minima informer la population des données scientifiques qui mettent en cause ces huiles essentielles d’usage très courant. Et la question se pose aussi d’encadrer plus strictement les usages chez l’enfant et l’adolescent", conclut-elle.

Alexandra Bresson