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Santé

Le Défenseur des droits Jacques Toubon déplore un accès aux soins "difficile" pour les étrangers malades

Le Défenseur des droits Jacques Toubon

Le Défenseur des droits Jacques Toubon - Christophe Archambault / AFP

Dans un nouveau rapport publié ce lundi, le Défenseur des droits Jacques Toubon fustige un "accès aux soins difficile" en France pour les étrangers malades. Il pointe du doigt les "préjugés" qui entourent ces personnes.

Objets de "suspicion", les étrangers malades ont souvent du mal à se faire soigner, tant leurs droits sont "fragiles" et parfois entravés par des pratiques "illégales", s'est inquiété le Défenseur des droits Jacques Toubon dans un rapport publié ce lundi.

Trois ans après un premier rapport, Jacques Toubon renouvelle son constat d'"idées préconçues" irriguant les règles applicables aux étrangers, avec une "suspicion" qui "rend plus difficile l'exercice des droits des personnes malades étrangères".

"Un recul imprévu des droits"

Ainsi, pour les étrangers en situation régulière, la réforme de l'assurance maladie instaurant la "Protection universelle maladie" en 2015 a conduit à "un recul imprévu" des droits pour de nombreuses personnes: contrôle de la régularité du séjour "plus restrictif qu'auparavant", difficultés d'affiliation pour les étrangers récemment installés en France... 

Le rapport souligne aussi des "difficultés accrues" des étrangers malades à obtenir un titre de séjour pour se faire soigner, depuis une réforme de 2016 qui a conduit à une "baisse drastique des avis médicaux favorables au maintien sur le territoire". Notamment "l'accès au séjour des personnes porteuses du VIH demeure préoccupant", note le Défenseur.

Jacques Toubon revient ainsi sur les "préjugés" entourant les étrangers malades, et notamment celui d'un "appel d'air" censément créé par le système de soins français. Or cette idée est "contredite par plusieurs études", la majorité des malades découvrant leur pathologie "à l'occasion de bilans de santé réalisés bien après" l'entrée sur le territoire.

"Un dispositif dérogatoire, coûteux et favorisant des pratiques discriminatoires"

Seuls 2% des 255.550 titres de séjour délivrés l'an dernier l'ont été pour raison médicale, rappelle le rapport.

Pour les étrangers en situation irrégulière, le Défenseur déplore avec l'Aide médicale d'Etat (AME) "un dispositif dérogatoire, coûteux et favorisant des pratiques discriminatoires", avec des "refus de soins" illégaux mais souvent justifiés "par le surcoût administratif voire financier" pour les médecins.

Cela peut passer par "un refus direct" de prise en charge ou être "indirect", via des horaires limités de rendez-vous ou la demande de justificatifs administratifs supplémentaires, ajoute le rapport.

Enfin, alors que certains appellent régulièrement à supprimer l'AME jugée trop coûteuse, le rapport rappelle son "enjeu majeur de santé publique", et met en garde contre le risque de réserver à certains un "accès résiduel" aux soins: la prise en charge tardive d'une personne non soignée "sera plus lourde qu'une prise en charge précoce", rappelle-t-il.

Jeanne Bulant avec AFP