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La Rochelle: la mairie prend des mesures de précaution en prévention d'une pollution de l'eau potable

Photo d'illustration d'un robinet

Photo d'illustration d'un robinet - Lionel Bonaventure/AFP

La présence de métabolites de chlorothalonil, des résidus d'un pesticide interdit depuis 2019, a été révélée par l'Anses en avril dans de très nombreux captages d'eau en France.

Une mesure de précaution. L'agglomération de La Rochelle a décidé de fermer quinze de ses captages en eau potable, le temps d'évacuer un pesticide interdit. Le chlorothalonil R471811 est présent dans l'eau sur tout le territoire français, mais les autorités rochelaises veulent prendre les devants.

Cet été, des résidus de ce fongicide interdit en 2019 ont été détectés dans la totalité des forages de l'agglomération. Toutefois, pas d'inquiétude, les taux détectés ne dépassent pas le seuil de 3 microgrammes par litre, le seuil de potabilité.

Les résultats rochelais ont révélé des teneurs de chlorothalonil R471811 comprises entre 1,4 et 2,9 microgrammes par litre. Une fois traitée, l'eau du robinet affichait une teneur comprise entre 0,1 et 1,9 microgramme par litre.

"Le problème avec cette substance, c'est que l'on retrouve ses métabolites, c'est-à-dire ses produits de dégradation, un peu partout, en quantité importante", explique à BFMTV François Veillerette, porte-parole de l'association Générations futures.

"Transparence"

L'eau reste donc potable à La Rochelle, comme l'assure à France Bleu le président de l'agglomération et maire, Jean-François Fountaine: "On vise un meilleur seuil de qualité et on n'est pas en situation critique, mais en toute transparence, on doit annoncer des traces de ce produit".

"Ce sont des niveaux bien supérieurs à la consommation maximale admissible, même si en théorie on n'est pas au-dessus, on n'est pas au-delà des valeurs sanitaires, l'application du principe de précaution veut qu'on agisse rapidement", poursuit François Veillerette.

Même son de cloche du côté de l'ARS de Charente-Maritime. "L'eau est tout à fait potable aujourd'hui, le choix de changer l'origine de l'eau est un principe de précaution prise par la communauté d'agglomération de La Rochelle", explique à BFMTV Laurent Flament, directeur de la délégation départementale.

Il a été décidé de fermer quinze captages de la plaine d'Aunis pendant plusieurs semaines pour laisser le temps à l'évacuation des résidus. En attendant, d'autres captages vont prendre le relais pour assurer l'approvisionnement en eau des foyers et bâtiments concernés.

Le tiers des habitants de l’agglomération rochelaise était jusque-là alimenté par ces captages. D'ici la fin du mois, ils seront raccordés aux eaux du fleuve Charente traitées dans l'usine de Coulonges.

"Cela ne veut pas dire aux gens qu'ils vont être empoisonnés parce qu'ils ont bu de cette eau dans les mois passés. Cela veut dire qu'on ne peut pas exclure sur le long terme qu'il y ait des problèmes. C'est ça l'application du principe de précaution: il ne faut pas attendre de constater la catastrophe pour agir", détaille François Veillerette.

Retrouvé dans plus d'un prélèvement sur deux

En avril dernier, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a publié les résultats de sa dernière campagne d’analyse de l’eau potable, initiée en 2019.

Les prélèvements concernaient 157 pesticides et métabolites de pesticides (sous-produit de dégradation des pesticides) et 89 d'entre eux ont été détectés au moins une fois dans les eaux brutes et 77 dans les eaux traitées.

Parmi les sept composés "émergents" ayant conduit à des dépassements de la limite de qualité de 0,1 microgramme par litre, un cas en particulier se dégage: le métabolite du chlorothalonil R471811.

C’est, en effet, le métabolite de pesticide le plus fréquemment retrouvé: dans plus d’un prélèvement sur deux. En outre, il conduit à des dépassements de la limite de qualité plus d'une fois sur trois.

"Modification des pratiques agricoles"

Peut-on consommer de l'eau de robinet sans risque en France? "Aujourd'hui, c'est le principe de précaution qui fait que lorsque les niveaux sont trop élevés, les autorités déconseillent la consommation pendant un moment, le temps que les taux redescendent, mais on ne peut pas courir le risque de constater d'éventuelles maladies donc il faut agir de manière préventive", abonde François Veillerette.

Le spécialiste n'estime toutefois pas qu'acheter des bouteilles d'eau soit la solution. "On va produire des montagnes de déchets et on n'est pas sûrs que les plastiques soient complètement sûrs", affirme-t-il, plaidant pour "une modification des pratiques agricoles" en "réduisant l'usage des pesticides de manière très importante et en retirant les plus dangereux d'entre eux".

Margaux de Frouville et Salomé Robles