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Santé

L'anisakidose, ce parasite du poisson cru

Sushis, sashimis, ceviche… Autant de plats à la mode qui peuvent être à l'origine d'une maladie parasitaire: l'anisakidose. En cause, une larve de ver présente dans certains poissons et qui peut causer des dommages sur le tube digestif ou entraîner des réactions allergiques.

C’est une maladie méconnue liée à la consommation de poissons crus: l’anisakidose. Trois jours après avoir acheté un plateau de sushis à emporter, les ennuis de santé d’Alexandre Urwicz ont débuté. Mi-novembre, ce père de famille est pris de douleurs abdominales inédites :

"Je ne pouvais pas me mettre debout, donc j’ai été évacué en ambulance de chez moi. Je suis arrivé aux urgences de l’hôpital Saint-Antoine (Paris). On m’a administré des doses de morphine pour faire baisser la douleur parce que c’était terrible, je gémissais, j’étais allongé, je n’ai jamais eu un truc pareil", nous raconte ce patient.

"Les médecins, les chirurgiens ne connaissent pas l’anisakidose"

Trois nuits d’hospitalisation et une batterie d’examens plus tard, le médecin conclut à une anisakidose… Une maladie provoquée par les larves d'un ver parasite appelé Anisakis. Chaque année, seuls une dizaine de cas sont déclarés en France, mais la pathologie serait largement sous diagnostiquée.

"Les médecins, les chirurgiens ne connaissent pas l’anisakidose. Les espagnols le connaissent, les Japonais aussi. Mais pas encore les Français. On peut être certains d’une explosion de ce phénomène avec la consommation de poisson cru qui est exponentielle", estime Laurent Beaugerie, chef de service gastro-entérologue à l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP).

Saumon, thon, flétan, carrelet, morue, merlu, maquereau… de nombreux poissons peuvent être touchés par ce ver.

Quelles complications possibles?

"Après l’ingestion d’un poisson cru contaminé, il y a trois complications principales qui peuvent survenir : la première, c’est le parasite qui entre dans la paroi de l’estomac, cela va causer des douleurs atroces qui vont durer quelques heures. Quelques jours après, les parasites vont finir par mourir", détaille le professeur Beaugerie.

Deuxième cas de figure, les parasites descendent plus loin dans la paroi du petit intestin, l’intestin grêle. Ils vont alors déclencher un épaississement de la paroi qui dans le pire des cas va bloquer complètement l’intestin, c’est une occlusion. Cela implique une hospitalisation et une opération dans certains cas : "quand le circuit n’est pas rétabli, il faut aller couper le bout d’intestin concerné. C’est donc une conséquence fâcheuse en termes de santé publique", poursuit le spécialiste.

Dernière complication possible, une allergie aux parasites du poisson… C’est ce qui est arrivé à Bertrand Auboyneau. Il y a 3 ans, ce restaurateur a fait un œdème de Quincke, une réaction potentiellement mortelle, après avoir mangé des tapas de poisson cru. Depuis, il a révisé ses menus :

"Vu ce qui m’est arrivé, je ne me vois pas prendre de risque pour un client. Nous avons arrêté les carpaccios, les ceviche. Récemment, on a fait du carpaccio de mulet, mais on les avait tous congelés avant", relate le propriétaire de trois restaurants parisiens, et d’un en Bretagne.

Congéler "à une température ne dépassant pas -20 °C"

Car le seul moyen de consommer du poisson cru sans risque est de le surgeler. Depuis 2004, le règlement européen n°853/2004 indique: "Les produits de la pêche suivants doivent être congelés à une température ne dépassant pas - 20 °C en tous points du produit pendant une période d’au moins vingt-quatre heures".

Une règle encore trop peu connue, ce que regrette Alexandre Urwicz :

"Aux États-Unis, la norme est de congeler 7 jours à moins 20 degrés le poisson destiné à être consommé cru. En France, elle serait de congeler un seul jour. Certains disent que ce n’est pas suffisant. En tout cas, que l’on nous dise lorsqu’on achète du poisson cru s’il a été traité ou pas. Et si on a envie d’en consommer en connaissance de cause. Ce que je voudrais, c’est que le consommateur ait l’information de ce risque potentiel".

En principe, les poissons d’élevage ne sont pas infestés par le parasite contrairement aux poissons sauvages, mais il n’est pas toujours évident d’avoir cette information lors d’un achat.

Margaux de Frouville