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Hyperactifs: les prescriptions de Ritaline, "la cocaïne des enfants", continuent d'augmenter

Image d'illustration - Les prescriptions de Méthylphénidate sont en augmentation constante depuis plus de dix ans.

Image d'illustration - Les prescriptions de Méthylphénidate sont en augmentation constante depuis plus de dix ans. - iStock - DNY59

La prescription de ce produit, classé comme stupéfiant, est banalisée pour les enfants atteints de troubles de l'attention, alors que plusieurs spécialistes de la Santé dénoncent les risques qu'il comporte, et le recommandent uniquement en dernier recours.

Sous le nom de Ritaline (parfois Quazym LP ou Concerta), les prescriptions de méthylphénidate ont augmenté de 24% ces deux dernières années, ce qui inquiète certains spécialistes de la Santé. Le méthylphénidate est un "psychostimulant indiqué dans le cadre d’une prise en charge globale du trouble du déficit de l’attention/hyperactivité (TDAH), chez l'enfant de 6 ans et plus", explique l'Agence nationale de sécurité du médicament (Ansm).

"Toutes spécialités de méthylphénidate confondues, ville et hôpital compris, 738 419 boites ont été vendues en France en 2016 et 809 225 en 2017 soit une augmentation de 24% depuis le rapport précédent", assure un rapport de l'Ansm daté d'octobre 2018 et publié fin février 2019.

"Même si elle est parfois indispensable, les médecins ont tendance à prescrire [la Ritaline] trop rapidement car il n’y a pas d’autres solutions et qu’ils doivent aller vite", déclare dans Le Parisien, Hélène Fresnel, journaliste et coauteure de l'ouvrage "Homo Drogus", publié ce 6 mars. Selon le quotidien, l'augmentation des ventes de ce produit est directement liée à la hausse du nombre d'enfants diagnostiqués avec un TDAH.

Il n'existe en effet pas de traitement miracle pour soigner le TDAH, et la Ritaline augmente les capacités de concentration de la personne qui la prend, supprimant efficacement les symptômes du trouble. Mais elle devrait être donnée uniquement "lorsque les mesures correctives psychologiques, éducatives, sociales et familiales seules s'avèrent insuffisantes", soit en dernier recours, selon l'Ansm.

"Effets indésirables cardiovasculaires et neuropsychiques"

Les ventes de méthylphénidate sont en augmentation depuis une dizaine d'années. Elles étaient déjà passées de 283.000 boîtes vendues en mars 2008 à 476.900 en mars 2013, soit une augmentation de presque 70% en 5 ans. Il y a peu, en juin 2018, le portail des professionnels de la santé Vidal avait même annoncé une rupture de stock concernant les gélules de Ritaline à libération prolongée.

Etant donné le succès de la Ritaline dès la fin des années 2010, l'Ansm avait publié une méthode pour encadrer son utilisation. On peut y lire que le méthylphénidate peut "ralentir la croissance et la prise de poids" chez l'enfant, et en cas de mauvais dosage, "peut entraîner un comportement anormal, des hallucinations, des idées délirantes, une dépendance (...) et une accoutumance". C'est pourquoi il est appelé "cocaïne des enfants". Ce produit se trouve d'ailleurs officiellement parmi les "substances classées comme stupéfiants".

Dans un article du 1er février 2019, la revue médicale Prescrire souligne également "ses effets indésirables cardiovasculaires et neuropsychiques parfois graves. Il est à proposer uniquement en dernier recours, en cas d'échec de mesures non médicamenteuses."

"Un électrocardiogramme avant la mise sous traitement"

Dans son dernier rapport, l'ANSM déclare que "la toxicité cardiaque long terme est mal connue", pour la Ritaline mais que "le risque de troubles du rythme, en particulier, ne peut être exclu". L'agence demande donc "la mise en place d’un bilan cardiovasculaire comprenant un électrocardiogramme (ECG) avant la mise sous traitement", en attendant le résultat d'études sur le long terme.

L’utilisation du méthylphénidate en France "reste faible notamment en comparaison à d’autres pays européens", note toutefois l'Ansm.

Salomé Vincendon