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Fermeture des services d'urgences: les hôpitaux concernés toujours plus nombreux

Du personnel médical transporte un patient infecté par le Covid-19 aux urgences de l'hôpital de Strabourg après son arrivée en avion depuis la région lyonnaise le 6 novembre 2020  (Photo d'illustration)

Du personnel médical transporte un patient infecté par le Covid-19 aux urgences de l'hôpital de Strabourg après son arrivée en avion depuis la région lyonnaise le 6 novembre 2020 (Photo d'illustration) - PATRICK HERTZOG © 2019 AFP

Le ministre de la Santé a reçu jeudi les représentants des dirigeants d'établissements, administratifs et médicaux, après que le Conseil scientifique a tiré la sonnette d'alarme.

L'hôpital public est en situation d'urgence. Faute de médecins, la série de fermetures de lits d'hôpitaux se poursuit dans différents établissements à travers la France. Au total, un lit sur cinq est actuellement fermé dans le public une partie de la journée ou parfois pendant plusieurs jours voire semaines.

Les annonces se succèdent, relayées par la presse régionale depuis plusieurs semaines, les urgences de Laval ferme pour quatre nuits, celles de Bastia pour une semaine... Cette situation dramatique inquiète car elle met directement en danger la vie de certains patients, pris en charge moins rapidement.

Entre réduction des effectifs et difficultés à recruter

Dans le Puy-de-Dôme, les urgences de l'hôpital d'Ambert sont à l'arrêt depuis le 27 octobre selon France 3 Auvergne-Rhône-Alpes. La raison? Le désistement des médecins intérimaires. Sans solution, le service a été contraint de fermer. Si le président (LR) du Conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez a affirmé ce mercredi vouloir mettre fin à cette situation, ce sont en attendant 28.000 personnes qui doivent faire une heure de route pour gagner les urgences les plus proches.

Du côté de Givors, dans le Rhône, les urgences sont également touchées, mais continuent de fonctionner en journée. Le service de nuit, de 20h30 à 7h30 n'est en revanche plus assuré, provoquant l'inquiétude de certains patients. "Ils vont faire une expérience à mon avis d'un mois et si ça marche, ils fermeront [le service des urgences] de manière définitive", s'était alarmée l'une d'elles à notre micro. Dans cet hôpital, deux postes de médecins ne sont plus occupés depuis plusieurs mois, laissant craindre que le milieu médical ne suscite plus autant de vocations.

À Bastia, le service de soins non programmés de Maymard a tout simplement fermé pour congés ce lundi jusqu'au 9 novembre par manque de médecins remplaçants. Ce service, qui fait office de service d'urgence, accueille de 60 à 80 patients par jour pour seulement deux médecins.

"Ça fait depuis janvier 2019 qu'on ne prend pas un seul jour de repos. On a besoin de faire un break", a justifié Marc Bandittini-Landucci, l'un des médecins, à Corsenetinfos.

À Draguignan, l'attente sera longue pour les patients de cet hôpital du Var. Les urgences doivent en effet fermer la nuit depuis vendredi dernier pour cinq semaines. Alors que le service devrait compter 18 médecins, il n'en compte actuellement que 6, soit le tiers, obligeant le personnel à réaliser 24 heures de garde tous les deux jours. Bonne nouvelle: le 1er décembre, deux nouveaux médecins doivent rejoindre le service.

"Environ 20%" de lits fermés dans les hôpitaux

Suite à ces annonces, le Conseil scientifique a tiré la sonnette d'alarme la semaine dernière, estimant à "environ 20%" la proportion de lits fermés dans les hôpitaux faute de personnel, résultat d'une enquête flash conduite début octobre.

"C'est pire à l'automne 2021 que ça n'a jamais été", a affirmé Frédéric Valletoux, président du Conseil de direction de la Fédération hospitalière de France et maire de Fontainebleau sur BFMTV. "On voit partout ces chiffres qui nous alertent sur ce problème d'attractivité, de fidéliser les soignants, cette incertitude liée à l'épidémie alors que notre système de santé est en crise profonde", a-t-il alerté.

Si la crise sanitaire est en partie à l'origine de l'absentéisme ou du départ de certains soignants, le manque profond d'attractivité de la profession expliquerait aussi cette situation, Frédéric Valletoux évoquant "une démotivation face à un hôpital qui va de crise en crise."

L'inquiétude est également de mise du côté des urgences pédiatriques. Le collectif Inter-Hôpitaux a dénoncé une situation "catastrophique" dans ces services la semaine dernière. "Des enfants en situation d'urgence ne peuvent plus être pris en charge par les services compétents", ont-ils alerté.

"Pas d'alerte globale"

Les conséquences d'une telle situation sont importantes pour les patients, pris en charge moins rapidement et parfois obligés de faire des heures de route pour trouver un service ouvert. "C'est le côté humain de prise en charge qui est dégradé puisqu'on va faire vite, moins bien", avait de son côté regretté Gérard Raymond, président de l'association France assos santé à RMC.

Du côté du gouvernement, on assure que les fermetures de lits d'hôpitaux par manque de personnels soignants sont "préoccupantes", notamment en Ile-de-France où "la situation est plus tendue qu'ailleurs", mais qu'il n'y a "pas d'alerte globale", a indiqué jeudi à nos confrères l'AFP l'entourage du ministre de la Santé, Olivier Véran.

"La situation est compliquée" dans les hôpitaux, a toutefois aussi reconnu le ministre de la Santé dans une interview à Libération la semaine dernière, évoquant "une hausse de près d'un tiers des postes vacants chez les paramédicaux par rapport à l'automne 2019".

"Il n'y a pas de tri" dans les services d'urgence pédiatriques, a assuré de son côté jeudi dernier au Sénat la ministre déléguée à l'Autonomie, Brigitte Bourguignon, après l'intervention d'une sénatrice relayant une alerte du Collectif Inter-Hôpitaux. "Il est hors de question de ne pas prendre un enfant en urgence vitale", a-t-elle voulu rassurer.

Juliette Desmonceaux avec AFP