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Epilepsie: les traitements sont-ils tous risqués?

L’acide valproïque, commercialisé en France depuis 1967, est un traitement majeur de l’épilepsie.

L’acide valproïque, commercialisé en France depuis 1967, est un traitement majeur de l’épilepsie. - iStock

Le risque de malformations congénitales provoquées par l'antiépileptique Dépakine pendant la grossesse pose la question de l'utilisation de cette famille de médicament lors de cette période.

Les résultats de l'étude sur le "scandale" Dépakine étaient très attendus, tant le danger lié au valproate de sodium, la substance active de cet antiépileptique, était pointé du doigt depuis plusieurs années. Dévoilés le 24 août par le ministère de la Santé, ces derniers ont révélé qu'entre 2007 et 2014, plus de 14.000 femmes enceintes ont été exposées à ce médicament nocif pour le foetus.

Produit par le laboratoire Sanofi depuis 1967, l'antiépileptique Dépakine est sur la sellette car son principe actif est susceptible de provoquer dans 10% des malformations congénitales et de l'autisme et de retards intellectuels dans 40% des cas. Au total, 8701 enfants sont nés sur cette période mais l'ANSM* qui a mené l'étude, ne précise pas le nombre d'enfants touchés par ces troubles.

Outre la Dépakine, le document a également regroupé le nombre de grossesses exposées à d'autres médicaments contre l'épilepsie et les troubles bipolaires entre 2007 et 2014. Ces médicaments alternatifs ne sont pas non plus exempts de risque tératogène, c'est-à-dire "susceptible de provoquer des malformations chez les enfants dont la mère a été traitée pendant la grossesse", explique le Centre de Référence sur les Agents Tératogènes (CRAT).

Ne pas négliger le bénéfice thérapeutique

Selon ce dernier, l'acide valproïque "est à proscrire pendant au moins les 2 premiers mois de grossesse, et si possible au-delà" pour cette raison, mais il n'est pas le seul médicament à éviter. Le CRAT évoque aussi le Soriatane (Acitretine) contre le psoriasis, l'isotrétinoïne (Contracné, Curacné, Roaccutane) contre l'acné sévère ou encore le misoprostol (Cytotec, Gymiso) contre les ulcères d'estomac.

D'autres médicaments tératogènes sont utilisables en cours de grossesse "en l’absence d’alternative thérapeutique plus sûre", et c'est le cas de certains antiépileptiques. Trois médicaments couramment prescrits sont cités: la Carbamazépine (Tégrétol) Phénobarbital (Gardénal) Topiramate (Epitomax). Au sujet des deux premiers médicaments, l'ANSM précise que: 

"Le risque tératogène est 2 à 3 fois plus élevé suite à une exposition aux médicaments d’ancienne génération (le phenobarbital, la phénytoïne, la carbamazepine, et l’acide valproïque) que dans la population générale".

L'agence confirme également que "selon les données actuellement disponibles, l’acide valproïque est considéré comme le plus tératogène des traitements antiépileptiques". Cependant, "le risque de crise épileptique non contrôlée au cours de la grossesse est considéré supérieur au potentiel risque tératogène de ces traitements", précise-t-elle.

Trouver la molécule qui convient le mieux au patient

C’est pourquoi il est toujours conseillé aux femmes présentant une épilepsie active de continuer un traitement antiépileptique pendant la grossesse. Concernant l'acide valproïque, celui-ci n'est plus autant prescrit ces dernières années chez les femmes en âge de procréer, comme le précise l'ANSM: en 2015, l'antiépileptique lamotrigine est devenu le médicament le plus fréquemment délivré (52 422 femmes).

Un médicament "dont les données chez les enfants exposés in utero ne retrouvent pas de répercussion particulière sur leur développement psychomoteur" et dont "l’utilisation est possible quel que soit le terme de la grossesse", précise le CRAT. Mais selon les agences sanitaires, les femmes toujours sous valproate ne doivent pas arrêter brutalement le traitement, mais déterminer avec un neurologue si une alternative médicamenteuse est possible.

Dans tous les cas, "la patiente devra être informée des risques associés à la grossesse", précise la Haute Autorité de Santé. Selon la Fondation française pour la recherche sur l'épilepsie, il existe actuellement plus de 30 molécules disponibles, prescrites en fonction du profil du patient. 

"Aucune molécule n’est plus efficace qu’une autre. Le choix d’un médicament est principalement fondé sur l’analyse d’une situation particulière et d’un profil de tolérance. Il faut tenir compte du syndrome, de l’âge, du genre, de l’étiologie de l’épilepsie", précise-t-elle.

Si le patient supporte bien le traitement et respecte son observance, environ 70% à 80% des crises sont contrôlées grâce à celui-ci.

*Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé 
Alexandra Bresson