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ENQUÊTE LIGNE ROUGE - L’hôpital au coeur de la seconde vague

Pour la deuxième fois au cours de l'année 2020, les hôpitaux français enregistrent un afflux de patients inédit en raison de la crise sanitaire. Ils s'organisent pour y faire face.

"C’est dur, il n’y a pas d’autres mots." Sept mois après le pic de la première vague de Covid-19, les hôpitaux retiennent leur souffle alors que le nombre de nouveaux patients ne cesse d’augmenter. À Saint-Etienne dans la Loire, le taux de contamination a grimpé, fin octobre, jusqu’à 1200 pour 100.000 habitants, plus haut niveau de contamination du pays. Les autorités sanitaires de la région redoutent que le système de santé ne résiste pas à cette deuxième vague.

Aux urgences, près d’un tiers des malades sont des personnes infectées au Covid-19. "On enlève le masque 5 minutes et c’est mort. Il faut faire gaffe", commente un patient de 55 ans testé positif quelques jours plus tôt. À son âge, il ne pensait pas avoir besoin d’être pris en charge à l’hôpital. Mais il semble que le profil des malades ait quelque peu évolué depuis les mois de mars-avril.

"On a toujours des patients qui ont des antécédents, mais ils sont plus jeunes par rapport à la première vague. On a aussi des trentenaires qui ont du mal à s’en remettre", énumère Gaëlle Capot, infirmière aux urgences depuis 5 ans.

"On se doit d’être là pour les malades"

Face au nouvel afflux de patients, les hôpitaux se réorganisent pour ne pas étouffer. À Rouen, des infirmiers de tous services viennent prêter main forte en réamination, après une formation express. "On se doit d’être là pour les malades. Ce serait compliqué de rester chez moi en me disant que je n’ai rien fait alors que mes collègues en ont besoin", raconte Lila Toutah, infirmière en hémovigilance qui n’imaginait pas rester en retrait durant la seconde vague.

Projetée dans un service de réanimation après avoir reçu un stage condensé, elle découvre des tours de garde loin d’être calmes. Il faut avoir l'œil partout et réagir vite aux états de santé qui se dégradent subitement.

"Tout est important, on a la vie des gens entre nos mains, on ne peut faire l’impasse sur rien", souligne Agathe Durand, infirmière en réanimation.

Outre ces renforts, les hôpitaux misent également sur de nouveaux équipements. À Saint-Etienne, le CHU s’est doté de dispositifs d’oxygénation à haut débit. "Sur la machine, on a deux gros tuyaux qu’on insère dans les narines et qui délivrent de l’oxygène", nous détaille Benoît Crémilleux, médecin réanimateur. Une aide respiratoire moins invasive et moins périlleuse que l’intubation qui nécessite de plonger le patient dans un coma artificiel.

L'hypnose pour apaiser

Des séances plus inédites trouvent également leur place dans la prise en charge des malades du Covid-19. Christine Allary, infirmière anesthésiste, intervient d’habitude auprès des patients qui s’apprêtent à subir une opération chirurgicale, mais en ce moment, elle met ses talents au profit des malades atteints par la maladie infectieuse en les hypnotisant. "Ce patient était en souffrance respiratoire et très stressé par rapport à ça. Après une séance d’hypnose de 45 minutes, il a réussi à s’endormir tranquillement", explique-t-elle.

"Je me suis senti de nouveau respirer avec presque toutes mes capacités respiratoires alors que juste avant j’avais l’impression d'avoir soif d’air en permanence. Je suis très heureux de cette expérience", commente le patient.

"La réanimation, une épreuve physique et morale"

Malgré ces quelques améliorations par rapport au printemps dernier, les soignants doivent encore faire des choix difficiles car le fort afflux de patients les obligent à trancher une question éthique particulièrement délicate: le malade ira-t-il en réanimation si son état se dégrade soudainement?

"La réanimation c’est une vraie épreuve physique et morale. Pour la supporter, il faut avoir des ressources physiologiques suffisantes. Donc on pèse le bénéfice versus le risque de basculer dans l’acharnement thérapeutique", détaille Laurent Gergelé, médecin réanimateur.

Ainsi, un homme de 81 ans actuellement hospitalisé à l’hôpital de Saint-Etienne, "en pleine forme, sans antécédents particuliers", n’aura pas accès à la réanimation. Un autre octogénaire dont l’état s’est dégradé subitement, ne sera pas réanimé. Une décision "très dure" à vivre pour les proches mais aussi pour le personnel hospitalier, indique l’infirmière Elodie Montrobert.

Ambre Lepoivre Journaliste BFMTV