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Covid-19: en quoi consiste le traitement aux anticorps que la France vient d'autoriser?

Des recherches sur les traitements à base d'anticorps monoclonaux sont en cours comme ici dans un laboratoire de Buenos Aires, en Argentine

Des recherches sur les traitements à base d'anticorps monoclonaux sont en cours comme ici dans un laboratoire de Buenos Aires, en Argentine - JUAN MABROMATA / AFP

Olivier Véran a annoncé jeudi soir que la France devrait recevoir des milliers de doses supplémentaires d'une "génération supérieure" de ce traitement novateur d'ici la mi-mars. Ces anticorps de synthèse créés en laboratoire miment l'action des anticorps naturellement produits par le système immunitaire.

"Ce sont des espoirs nouveaux (...) qui renforcent notre arsenal anti-Covid." Lors de la conférence de presse de Jean Castex jeudi soir, au cours de laquelle il a été annoncé que des mesures supplémentaires pourraient localement être prises le 6 mars prochain dans 20 départements, Olivier Véran s'est également exprimé.

Lors de sa prise de parole, le ministre de la Santé a confirmé qu'un nouveau traitement par anticorps de synthèse, nommé Bamlanivimab, venait d'être autorisé en France pour les patients les plus à risque de formes graves, avec l'espoir de leur éviter hospitalisation et passage en réanimation.

· Où et par qui seront-ils testés en France?

Il s'agit du traitement qui avait été utilisé pour soigner l'ancien président des États-Unis Donald Trump, brièvement hospitalisé en octobre dernier après avoir été contaminé par le Covid-19. Comme l'a précisé l'Académie de Médecine à la mi-février, ce type de traitement est autorisé et utilisé "depuis deux mois aux États-Unis et au Canada, plusieurs milliers de patients ayant été traités et une tolérance très satisfaisante.

"Quelque 83 centres hospitaliers ont déjà reçu des milliers de ce traitement qui pourront commencer à être administrés avec prudence initialement dans un cadre hospitalier pour des patients âgés de 80 ans et plus, et qui ont des troubles de l'immunité", a ajouté Olivier Véran. Des milliers de doses supplémentaires d'une "génération supérieure" seront reçues d'ici la mi-mars, a également indiqué le ministre.

Selon une note de la Direction générale de la Santé (DGS), il sera aussi à destination des transplantés d'organes comme les greffés du rein, les dialysés, les patients sous chimiothérapies.

· Comment fonctionnent-ils?

Fabriqués et "clonés" en laboratoire, ces anticorps de synthèse miment l'action des anticorps naturellement produits par le système immunitaire en cas d'infection. Un "anticorps monoclonal" est précisément conçu pour reconnaître et cibler un agent infectieux.

Ce traitement doit être administré à l'hôpital via une transfusion de 700 mg qui dure en moyenne une heure après la prescription d'un médecin hospitalier, et doit "être administrée dans un délai maximal de 5 jours après le début des symptômes [...] pour garantir un maximum d’efficacité."

"L'idée est d'aller chercher les anticorps les plus performants et de les produire en laboratoire - donc ce sont bien des anticorps artificiels - et de stimuler, par une injection, une immunité passive", expliquait fin janvier sur BFMTV Yves Coppieters, médecin épidémiologiste.

S'ils sont déjà utilisés depuis une trentaine d'années pour traiter cancers ou maladies inflammatoires, leur principe a été adapté au Sars-CoV-2, virus à l'origine du Covid-19: ils s'attaquent à la fameuse protéine S, qui forme les petites pointes à la surface du virus, qui lui servent de porte d'entrée dans l'organisme. L'anticorps s'agrippe alors à ces pointes, les empêchant de s'arrimer à la cellule humaine pour l'infecter.

Selon Brigitte Autran, experte en immunologie à Sorbonne Université, cet anticorps "marche bien contre le variant britannique, ce qui est précieux, alors que ce variant va devenir dominant". Ce variant, plus contagieux, représente désormais "près de la moitié des cas positifs", a indiqué Jean Castex jeudi soir.

En revanche, "l'efficacité de ce traitement sur les variants dits sud-africain et brésilien n'est pas démontrée", a souligné la DGS. Certaines de leurs mutations peuvent leur permettre d'échapper aux anticorps, qu'ils soient naturels ou artificiels.

· Qui les produit, à quel prix?

Pour l'heure, c'est le traitement mis au point par la société Eli Lilly, qui fabrique ce produit en France, qui est autorisé en France. Outre cette dernière, le laboratoire Regeneron (américain également) a lui aussi mis au point un traitement de ce type, ainsi que le sud-coréen Celltrion.

Dans un article des Échos, on apprend que la société a dû "aller très vite" afin de mettre en place la production de ce traitement, Marcel Lechanteur, président et directeur général de Lilly France évoquant même des "délais records." En 2020, l'unité de production alsacienne a ainsi produit un million de doses, le plus souvent à destination des États-Unis, un chiffre qui devrait encore augmenter dans les semaines à venir.

Bien que prometteurs, les anticorps monoclonaux ont un coût assez élevé. Interrogé par l'AFP, Hervé Watier, coordinateur du laboratoire MAbImprove, dédié aux anticorps thérapeutiques note que ce type de traitement coûte entre 1000 et 2000 euros, un prix qui reste toutefois inférieur à une journée d'hospitalisation en réanimation, souligne-t-il.

Le 24 janvier, l'Allemagne a annoncé avoir acheté "200.000 doses pour 400 millions d'euros" de traitements à base d'anticorps monoclonaux, ceux d'Eli Lilly et de Regeneron, soit 2000 euros par dose.

https://twitter.com/Hugo_Septier Hugo Septier Journaliste BFMTV