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Couvre-feu, fermeture des écoles... Une étude compare l'efficacité des mesures contre le Covid-19

Couvre-feu, fermeture des écoles... Une étude compare l'efficacité des mesures contre le Covid-19

Couvre-feu, fermeture des écoles... Une étude compare l'efficacité des mesures contre le Covid-19 - BFMTV

Les chercheurs se basent sur les mesures prises pendant la deuxième vague dans sept pays européens.

Alors que la situation sanitaire française se dégrade un peu plus chaque jour, une question revient sans cesse: faut-il laisser un peu de temps aux mesures actuelles ou être plus strict, par exemple en fermant les écoles? Cette deuxième option est ce mercredi matin le scénario privilégié par l'exécutif, à quelques heures d'une allocution d'Emmanuel Macron, qui doit s'adresser aux Français à 20 heures.

Mais quel est l'impact de ces restrictions sur la pandémie? Une étude sur "l'efficacité des interventions gouvernementales en Europe pendant la seconde vague de Covid-19" vient d'être prépubliée par des chercheurs principalement issus d'universités britanniques (Oxford, Cambridge, Imperial College London...).

L'infographie ci-dessous, basée sur leurs résultats, compare l'effet des mesures gouvernementales sur le transmission du virus. Les chercheurs préviennent que certaines "sont susceptibles d'interagir avec d'autres" comme le couvre-feu, qui limite forcément les rassemblements privés et publics. Ils concluent néanmoins que la fermeture de tous les commerces "non essentiels" - bars, restaurants, lieux de divertissement... - est de la moins la mesure dont l'impact est le plus important.

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Une étude très différente de la première

Si elle n'a pas encore été validée par leurs pairs, une première version de cette même étude avait été publiée dans la prestigieuse revue Science en décembre 2020. Les chercheurs s'intéressaient alors aux mesures prises dans 41 pays entre janvier et mai 2020 et avaient conclu que l'interdiction des grands rassemblements et la fermeture des établissements scolaires étaient les mesures les plus efficaces pour lutter contre la propagation du coronavirus.

Cette fois, les chercheurs se sont concentrés sur les mesures prises entre août 2020 et janvier 2021. Une période très différente de celle de la première étude, expliquent les auteurs:

"Entre la première et la deuxième vague, les comportements ont considérablement changé: les distances de sécurité sont davantage respectées, l'hygiène s'est améliorée, des protocoles sanitaires ont été appliquées un peu partout, les pièces sont davantage aérées..."

Autre nouveauté, contrairement à la première étude, qui comparait 41 pays du monde entier, la seconde s'est elle concentrée sur 7 États européens: l'Allemagne, l'Angleterre, l'Autriche, l'Italie, les Pays-Bas, la République Tchèque et la Suisse.

Selon les chercheurs, la fermeture des commerces et des lieux dits "non essentiels" est "particulièrement efficace" pour réduire le fameux R, le taux de reproduction du virus.

Lorsque les boîtes de nuits, les restaurants, les bars, les lieux de divertissements (cinéma, théâtres, musées, casinos, salles de sports...) et les magasins non-essentiels sont fermés, le taux de reproduction du virus se réduit d'environ 35%, selon leurs résultats. Attention, il s'agit de bien de la combinaison simultanée de toutes ces fermetures. Tous ces types d'établissements ne propagent pas autant le virus l'un que l'autre:

"Les fermetures des restaurants, pubs et café ont un effet important sur la transmission avec une réduction estimée de 12%. (...) Nous trouvons un effet substantiel similaire pour la fermeture des boîtes de nuit. (...) La fermeture des commerces de détail et des services de contact rapproché (comme les coiffeurs et les salons de beauté) est également élevée."

En revanche, la "fermeture des lieux de loisirs et de divertissement tels que les zoos,
les musées et les théâtres ont eu un faible effet" sur la transmission du virus, selon leurs recherches.

La limitation des rassemblements privés, l'autre pilier

Sans surprise, la limitation des rassemblements joue également un rôle majeur dans la lutte contre la propagation du Covid-19. Les auteurs constatent d'ailleurs que l'interdiction des rassemblements privés réduit davantage le taux de reproduction que la limitation des rassemblements publics:

"L'interdiction générale de tous les rassemblements, y compris les réunions individuelles, a un effet important: une réduction de 26% du R. Nous avons pu tester l'impact de différents seuils (...) mais seuls des seuils stricts avaient un effet statistiquement significatif" assurent les chercheurs, pour qui par exemple la limitation de rassemblements à 6 personnes a un "faible impact".

Des mesures de ce type ont été appliquées à l'étranger comme la Belgique, avec son concept de "bulles de contacts".

Impact modéré pour la fermeture des écoles

La fermeture des établissements scolaires semble elle avoir un impact modéré sur le taux de reproduction dans les pays étudiés. Un constat pas si surprenant pour les chercheurs:

"Pendant la deuxième vague, les écoles européennes fonctionnaient avec des protocoles sanitaires inédits: tests massifs, recherche des cas-contacts, désinfection des salles, ventilation, distanciation, réduction de la taille des groupes en classe, étalement des horaires..."

Attention, le cas des écoles françaises n'est pas étudié ici - le protocole sanitaire mis en place au sein de l'Éducation nationale, s'il a été maintes fois renforcé, reste souvent critiqué. "L'école devrait être bien davantage sécurisée", a estimé par exemple ce mercredi matin l'épidémiologiste Antoine Flahault sur RTL. "On devrait faire des tests de façon très massive plusieurs fois par semaines si on voulait les laisser  ouvertes. On doit ventiler bien davantage et le vérifier par des capteurs de CO2."

Les chercheurs restent d'ailleurs prudents, prévenant que "sans mesures suffisantes, l'ouverture d'écoles pourrait conduire à une résurgence" de l'épidémie. La vaccination de masse pourrait également changer la donne car, à terme, les écoles regrouperont la majorité des personnes non-vaccinées.

Enfin, l'étude ne prend pas en compte les variants, en particulier le britannique, plus contagieux que la souche originelle du Covid-19.

Louis Tanca Journaliste BFMTV