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Bientôt un étiquetage obligatoire sur certains produits? Ce que l'on sait des risques des nitrites pour notre santé

Les marques que les Français achètent le plus en supermarché sont Herta et Fleury Michon.

Les marques que les Français achètent le plus en supermarché sont Herta et Fleury Michon. - SYLVAIN THOMAS / AFP

Un député MoDem défend ce mardi un amendement visant à rendre obligatoire la mention de la présence des nitrites sur certaines étiquettes de charcuterie.

E250. C’est une mention qui passe souvent inaperçue pour les consommateurs. Cette lettre et ces trois chiffres symbolisent la présence de nitrites, des additifs destinés à faciliter la conservation du jambon et lui donner sa couleur rose. Comme le rapporte le JDD, le député MoDem Richard Ramos doit défendre ce mardi un amendement visant à rendre obligatoire la mention "contient du sel nitrité" sur les lardons et les rillettes. Que sait-on des risques que font peser les nitrites sur notre santé? Nous avons posé la question à un spécialiste.

"En passant dans l’intestin, les nitrates, et surtout les nitrites, vont entraîner la formation de nitrosamines et de fer nitrosylé. Or ces deux substances sont des cancérigènes avérés", nous explique Axel Kahn, président de la Ligue contre le cancer et cosignataire d’une pétition pour réclamer l’interdiction des nitrites avec l’ONG Foodwatch et l’application Yuka.

Lancée le 20 novembre, elle recueille plus de 162.000 signatures ce mardi.

"Suspicion mais pas de preuve", pour Agnès Buzyn

En 2015, après avoir passé au crible 400 études, le centre de recherche sur le cancer (Circ) de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a classé la viande transformée parmi les cancérogènes avérés. "Le risque augmente avec la quantité de viande consommée, mais les données disponibles pour cette évaluation ne permettent pas de conclure quant à l’existence d’un niveau de sécurité", peut-on lire sur le site de l’OMS.

Pour autant, sur BFMTV, le 20 novembre dernier, la ministre de la Santé s’était dite "un peu troublée que la Ligue contre le cancer signe" la pétition. Agnès Buzyn estime qu’il y a une "suspicion mais pas de preuve" sur le rôle des nitrites dans la survenue du cancer.

Quant à l’ANSES, l’Agence de sécurité sanitaire, elle nous renvoie vers l’EFSA, l'Agence européenne de sécurité des aliments. En juin 2017, l’autorité européenne a conclu à l’absence de risque sanitaire pour l’usage de nitrates en tant qu’additifs alimentaires.

Assez d’éléments pour décider d’interdire les nitrites

"Même la filière charcuterie ne nie pas les risques", estime Axel Kahn. "Selon les estimations, entre 8 et 10% des cancers colorectaux seraient liés à la formation des deux substances nocives quand on consomme des viandes conservées nitrosylées. Si ce chiffre est exact, cela veut dire qu’entre 3000 et 3300 cancers sont liés à ces produits, et qu’ils entraînent 1200 décès. Il y a largement assez d’éléments pour décider d’interdire les nitrites dans les deux années qui viennent", poursuit le scientifique.

Pour limiter le risque, les spécialistes recommandent de consommer de la charcuterie en quantité limitée, et/ou d’associer des fruits et légumes car l’ajout de vitamine E ou C diminue l’effet cancérigène. Axel Kahn rappelle qu’il existe aujourd’hui de nombreuses alternatives aux jambons avec nitrites: "le jambon de Parme ou le jambon de Bayonne par exemple, qui sont très salés mais pas nitrosylés. On voit aussi fleurir les gammes sans nitrites dans les rayons des supermarchés", estime-t-il.

"Encore une fois, nous aimons les charcutiers. Je dis à cette belle confrérie: sauvez-vous, soyez proactifs! Si vous ne proposez pas à vos mandants de se passer de nitrites d’ici deux ans, vous aurez à subir les conséquences d’une très mauvaise réputation", juge le nouveau président de la Ligue contre le cancer.
Margaux de Frouville