Harcèlement moral: le mode d'emploi pour le dénoncer
Le suicide de Rémy Thabard, trader à la banque HSBC, est bien d'origine professionnelle. Il s’est défenestré en 2007. La Cour d'appel de Paris, elle, a confirmé le jugement le 27 octobre 2016. Neuf ans de procédure pour aboutir à une décision rare, tant il est difficile de déterminer la part de vie privée et de vie professionnelle dans un suicide, souvent "multifactoriel", comme s'en défendent systématiquement les employeurs.
"Humiliation ultime"
Dans le cas de ce trader, les faits étaient clairs. Il a mis fin à ses jours quelques jours après un entretien d'évaluation dévastateur. Dans ses poches, les enquêteurs ont retrouvé un post-it faisant directement référence à son harceleur. Sur son bureau, d’autres interpellent son manager direct: "Pourquoi tu me traites comme un chien ?".
"Son chef et lui étaient partis en vacances ensemble, puis alors qu’il avait l’habitude d’être placé au devant du desk, avec les meilleurs, il avait été relégué à l’arrière, avec les stagiaires. Ce qui dans cet univers, traduit une humiliation ultime", illustre Jamila El Berry, avocate de la famille dans cette procédure pour harcèlement moral.
Altération de la santé physique ou mentale
Avant d'en arriver là, il est possible d'enclencher des procédures judiciaires contre ce délit qui "se manifeste par des agissements répétés: remarques désobligeantes, intimidations, insultes... Ces agissements ont pour effet une forte dégradation des conditions de travail de la victime qui risque de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ou d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel." Ils sont interdits, "même en l'absence de lien hiérarchique".
Prévenir l'inspection du travail
Vous pouvez demander l'aide des représentants du personnel ou du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, ou encore, signaler ces agissements directement à l'inspection du travail.
Si cette situation s'avère souvent délicate dans les faits, sachez que "les personnes dénonçant un harcèlement moral ou luttant contre ne peuvent pas être sanctionnées. Il peut y avoir des sanctions seulement dans le cas où cette dénonciation est de mauvaise foi, si la personne dénonce des faits qu'elle sait faux dans un seul but de nuisance", précise le site de l'administration publique.
Réunir des preuves
Avant de saisir les prud'hommes, c'est-à-dire la juridiction du travail pour les salariés du privé, le tribunal administratif pour ceux de la fonction publique, et/ou la justice pénale, il est nécessaire de réunir un maximum de preuves: courriels, témoignages de collègues, d'actes médicaux faisant état de la dégradation de l'état de santé…