BFMTV
Politique

Valls demande aux Corses de briser la loi du silence

Manuel Valls demande aux Corses de briser l'Omerta qui sévit sur l'île

Manuel Valls demande aux Corses de briser l'Omerta qui sévit sur l'île - -

Manuel Valls, le ministre de l’Intérieur, en déplacement sur l’île jeudi matin, après l’assassinat mercredi de Jacques Nacer le président de la Chambre de commerce de Corse-du-Sud, a demandé aux Corses de parler. « On demande aux corses de parler sur ce qu’ils ne savent pas », dénonce I Muvrini.

Comme l’avait annoncé le Premier ministre le 22 octobre, Manuel Valls a redit jeudi que les moyens d’enquête seraient renforcés en Corse après l’assassinat mercredi soir à Ajaccio du président de la chambre de Commerce et d’Industrie de Corse-du-Sud. Jacques Nacer était un proche d'Alain Orsoni, le président de l'ACA, club de foot d'Ajaccio. Dans l'entourage de cette personnalité, trois personnes ont déja été abattues ces dernières années. Alain Orsoni a d'ailleurs confié jeudi soir avoir peur pour lui et sa famille. Il penserait même à quitter ses fonctions.
Christine Taubira, la Garde des Sceaux, s’est, elle, engagée à protéger tous ceux qui aident à la manifestation de la vérité. Selon Manuel Valls, des mesures de sécurité ont été prises pour protéger des personnalités qui pourraient être visées. Les deux ministres doivent revenir en Corse le 29 novembre prochain, comme le prévoyait leur agenda initial. Avec 16 homicides en moyenne tous les ans depuis 20 ans, la Corse est aujourd’hui la zone la plus criminogène d’Europe au vu de sa population de 310 000 habitants.

« On n’est pas des balance »

Face aux pratiques mafieuses et à la violence qui gangrènent la Corse, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls appelle les Corses à parler, à briser les tabous. Une pratique qui s’avère difficile à faire passer sur une île où l’omerta est une culture ancestrale. « On n’est pas des balances » lance un groupe de pêcheurs dont un ajoute : « Si je suis témoin d’un assassinat dans la rue, je tourne les yeux, je ne veux pas me faire tuer aussi ». Même si les Corses sont évidemment contre toute forme de violences, dans les faits, il est difficile de briser la loi du silence. « Il y a une difficulté à participer à la recherche de la vérité parce qu’il n’y a jamais de vérité, jamais d’assassinat élucidé », explique sur RMC André Pacou de la Ligue des droits de l’Homme Corse. S’il existe une perte de la confiance en la justice, c’est aussi la confiance en la police qui ne dispose pas de moyens suffisamment efficaces. Vous allez témoigner et on vous dit que vous risquez votre vie, que la police n’a pas les moyens de vous protéger. Je vous pose la question : vous risquez la vie de votre famille ?», s’interroge Raphaël Valette, représentant du syndicat policier Unité SGP Fo en Corse. Les gens estiment que c’est notre travail. Ils ne vont pas risquer leur vie pour quelqu’un qu’ils ne connaissent pas. Si on leur demande de l’aide, il faut aussi qu’on leur en apporte de notre côté au maximum ».

« Vous croyez que les criminels racontent ça à la grand-mère ? »

Jean-François Bernardini est le fondateur du très populaire groupe de chants corses « I Muvrini ». Avec l’association pour la Fondation de Corse, il va à la rencontre des jeunes pour lutter contre la violence. Pour lui, demander aux Corses de parler, c’est mal connaître la situation de la population. « Les Corses, ils sont comme les autres, ils n’ont qu’une vie, leurs enfants n’ont qu’une vie, explique-t-il sur RMC. Qu’est-ce que vous savez, vous, quand un mec arrive dans une station-service et abat un homme en quinze secondes ? Et vous croyez que les Corses sont compétents pour élucider ce genre d’affaires ? Donc on demande aux Corses de parler sur ce qu’ils ne savent pas. Vous croyez que les criminels de ce genre, la veille, disent à la grand-mère qu’ils vont aller attaquer quelqu’un ? Ca fait sourire, véritablement. Et ce qui est terrible, c’est qu’avec ce genre de déclarations selon lesquelles la Corse est une zone de non-droit, je crois que les vrais criminels se frottent les mains ».

T.de Dieuleveult avec C.Martelet