BFMTV
Politique

Une éventuelle enquête sur Lagarde durerait plusieurs années

Une éventuelle enquête judiciaire en France sur Christine Lagarde, candidate à la direction du Fonds monétaire international, durerait plusieurs années avec une possible mise en examen et de nombreux développements. /Photo prise le 25 mai 2011/REUTERS/Jac

Une éventuelle enquête judiciaire en France sur Christine Lagarde, candidate à la direction du Fonds monétaire international, durerait plusieurs années avec une possible mise en examen et de nombreux développements. /Photo prise le 25 mai 2011/REUTERS/Jac - -

Une éventuelle enquête judiciaire en France sur Christine Lagarde, candidate à la direction du Fonds monétaire international, durerait plusieurs années avec une possible mise en examen et de nombreux développements.

Ce dossier sur l'arbitrage rendu en 2008 en faveur de Bernard Tapie, sur lequel une commission de trois magistrats de la Cour de justice de la République doit se prononcer courant juin, pèse sur la candidature de la ministre de l'Economie.

Jeudi soir, Christine Lagarde a semblé se placer dans la perspective d'une ouverture d'enquête pour déterminer si elle n'a pas abusé de son pouvoir en décidant d'un arbitrage, mais a dit pouvoir diriger le FMI tout en faisant face à la justice.

"Si (la commission) décidait de poursuivre cette enquête, ce ne serait pas particulièrement surprenant. Personnellement, ça ne me dérangerait pas du tout", a-t-elle déclaré sur France 2. Elle estime avoir agi légalement, dans l'intérêt de l'Etat.

Une instruction devant la Cour de justice, dont l'ouverture a été demandée le 10 mai par le procureur général de la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, dure généralement plusieurs années. Le dernier dossier qui visait Charles Pasqua, ouvert en 2004, s'est terminé par sa condamnation en 2010.

Trois juges d'instruction de cette institution chargée de juger les ministres pour les actes commis dans l'exercice de leurs fonctions devraient conduire de nombreuses investigations dans l'entourage de Christine Lagarde.

Elle-même serait nécessairement interrogée, avec le risque d'une mise en examen et d'un renvoi devant la formation de jugement, qui mêle parlementaires et juges professionnels.

La commission des requêtes, qui se réunira le 10 juin, peut soit rendre sa décision ce jour-là soit la mettre en délibéré, à une date indéterminée, aucun délai légal n'étant prévu.

Il est donc possible que la nomination de Christine Lagarde à la direction générale du FMI, qui doit intervenir au plus tard le 30 juin, soit décidée sans que le résultat soit connu.

DEUX AUTRES INSTANCES SAISIES

Le dossier porte sur la revente de l'équipementier sportif Adidas en 1993, dans laquelle Bernard Tapie dit avoir été floué par le Crédit lyonnais, alors banque publique.

Le procureur reproche à Christine Lagarde le choix en 2007, contre l'avis des services du ministère, d'un arbitrage privé pour régler ce litige, conclu finalement par un chèque de 285 millions d'euros de fonds publics à Bernard Tapie en 2008.

L'arbitrage a été préféré à la voie judiciaire alors même que l'Etat avait gagné en 2006 devant l'Assemblée plénière de la Cour de cassation, la plus haute juridiction du pays.

Les conditions dans lesquelles la convention d'arbitrage a été modifiée pour permettre l'attribution de 45 millions d'euros au seul titre du "préjudice moral" sont mises en cause.

Enfin, le procureur reproche à Christine Lagarde le fait d'avoir renoncé, au nom de son ministère, à un recours contre le résultat de l'arbitrage, pourtant recommandé par ses services.

Des extraits du rapport du procureur général, publié par le site internet d'information Mediapart, montrent que le magistrat a été sévère.

"La ministre a explicitement donné instruction d'inclure dans le champ de la sentence arbitrale l'indemnisation du préjudice moral, pourtant exclu du champ prévu par la loi en tant que créance non chiffrable non prévue dans la liste des matières susceptibles de compromis", écrit le procureur.

"Madame la ministre a constamment exercé ses pouvoirs ministériels pour aboutir à la solution favorable à Bernard Tapie que l'assemblée plénière de la Cour de cassation paraissait pourtant avoir compromise", ajoute-t-il.

La saisine de deux autres instances alourdit le problème judiciaire. D'une part, deux hauts fonctionnaires ayant agi sur ordre de la ministre, Jean-François Rocchi et Bernard Scemama, devraient être traduits devant une juridiction financière spécialisée, le parquet l'ayant demandé dans des réquisitions dévoilées jeudi par plusieurs médias.

D'autre part, le député Charles de Courson tente de remettre en cause la sentence arbitrale par un recours devant le Conseil d'Etat. Bernard Tapie a conservé, après règlement de ses passifs fiscal et social, environ 210 millions d'euros, selon les députés et non 30 millions comme l'avait dit Christine Lagarde.

Thierry Lévêque, édité par Yves Clarisse

REUTERS