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Trierweiler, piment ou fêlure de la présidence Hollande ?

Les controverses autour de Valérie Trierweiler, la compagne de François Hollande, sont-elles le piment d'une présidence trop "normale" aux yeux de médias nostalgiques de l'"hyperprésidence" de Nicolas Sarkozy ou une véritable fêlure dans l'image du chef d

Les controverses autour de Valérie Trierweiler, la compagne de François Hollande, sont-elles le piment d'une présidence trop "normale" aux yeux de médias nostalgiques de l'"hyperprésidence" de Nicolas Sarkozy ou une véritable fêlure dans l'image du chef d - -

par Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Les controverses autour de la compagne de François Hollande sont-elles le piment d'une présidence trop...

par Emmanuel Jarry

PARIS (Reuters) - Les controverses autour de la compagne de François Hollande sont-elles le piment d'une présidence trop "normale" aux yeux de médias nostalgiques de l'"hyperprésidence" de Nicolas Sarkozy ou une véritable fêlure dans l'image du chef de l'Etat français ?

La question se pose de nouveau, à l'orée d'une nouvelle polémique autour d'un livre consacré à Valérie Trierweiler. Mais les analystes politiques hésitent sur la réponse, quand certains refusent même de s'aventurer sur ce terrain.

La "First Girlfriend", comme la surnomment les médias anglo-saxons, a porté plainte pour diffamation et atteinte à la vie privée contre les auteurs d'une biographie ("La Frondeuse"), les journalistes Alix Bouilhaguet et Christophe Jakubyszyn.

"S'il faut apporter les preuves, on les apportera. Nous avons des témoignages", contre-attaque Alix Bouilhaguet, qui regrette que n'aient été retenues que les quatre pages sur la vie sentimentale de Valérie Trierweiler visées par la plainte - pages dont elle maintient d'ailleurs la teneur.

Ce n'est là qu'un épisode de plus dans l'histoire déjà riche de relations tendues entre celle qu'une émission de radio populaire a récemment sacrée "tête à claques de l'année" et des médias dont elle est elle-même issue.

Selon un sondage Harris Interactive paru au début du mois dans VSD, moins d'un Français sur trois apprécie celle qui a succédé en mai à Carla Bruni-Sarkozy, 44% estiment qu'elle occupe une place trop importante dans la vie publique et 42% que l'image de François Hollande pâtit de sa vie privée.

"Cela introduit une fêlure dans l'image du président et attention à ce qui vient ensuite se greffer sur les fêlures", estime Pascal Perrineau, du Cevipof, le centre de recherches de l'Institut de sciences politiques de Paris.

Frédéric Dabi, de l'institut de sondage Ifop, voit au contraire un "décalage abyssal" entre la place occupée dans les médias par Valérie Trierweiler, qui "fait vendre du papier", et les préoccupations réelles des Français.

"UNE FEMME COMPLEXE"

"Franchement, les Français s'en tapent (...) Qu'est-ce que c'est par rapport à un chômage qui explose, à l'annonce d'un plan social chez Surcouf ou Sanofi ?" estime-t-il.

Il en veut pour preuve un récent sondage d'Ifop pour le journal "people" Point de Vue, selon lequel 60% des Français estiment que Valérie Trierweiler ne doit pas abandonner son métier de journaliste - un débat récurrent depuis son arrivée à l'Elysée - et 73% jugent que ne pas être mariée au chef de l'Etat ne remet pas en cause sa légitimité de "Première Dame".

Les auteurs de "La Frondeuse" entendent décrypter la personnalité de Valérie Trierweiler et son passage du statut de journaliste à celui de "Première Dame".

"Nous la connaissions suffisamment pour nous dire que ça n'allait pas être évident pour elle", explique Alix Bouilhaguet. "C'est une femme complexe, qui a des qualités mais qui est très seule à l'Elysée, y compris vis-à-vis des hommes du président, pour qui elle est une source de nuisance ou un problème. Nous soutenons son combat de femme indépendante."

Son comportement parfois à l'emporte-pièce, son franc-parler et son omniprésence auprès du candidat, puis du chef de l'Etat, ont défrayé à de multiples reprises la chronique pendant la campagne présidentielle et les premiers mois du quinquennat.

Un sommet a sans doute été atteint en juin, en pleine campagne législative, quand elle a pris parti dans un tweet pour le rival de l'ex-compagne de François Hollande, Ségolène Royal, candidate officielle du PS à La Rochelle.

ABCÈS DE FIXATION

Valérie Trierweiler a exprimé des regrets tardifs sur ce tweet embarrassant pour l'Elysée et imputé par des conseillers du chef de l'Etat à une jalousie maladive, et elle s'est astreinte pendant quelques semaines à une relative discrétion.

Mais la voici ce jeudi en couverture de l'Express avec Ségolène Royal, l'ex-première secrétaire du PS Martine Aubry, la ministre Verte du Logement Cécile Duflot ... et la chancelière allemande Angela Merkel sous le titre "Ces femmes qui gâchent la vie" de François Hollande, jugé "en mal d'autorité".

Pour Pascal Perrineau, l'affaire du tweet a été un tournant : "Maintenant, ça s'alimente tout seul. Quoique François Hollande fasse, ça sera très difficile."

Le phénomène a un double inconvénient pour le président de la République, estime le chercheur du Cevipof.

Il constitue d'abord un abcès de fixation récurrent sur lequel "viennent se fixer bien d'autres mécontentements".

Et le chef de l'Etat, qui a vaincu Nicolas Sarkozy en mai en affichant notamment sa volonté de ne pas mélanger vie privée et vie publique, "donne maintenant, à tort ou raison, l'impression que ses affaires privées interfèrent avec la chose publique".

"Il perd sa différence, ça le banalise", explique Pascal Perrineau. "Cela participe à une image générale, je ne dirais pas encore de rejet, mais de trouble."

Le député socialiste Gérard Bapt, abonde dans le même sens.

"Les rebondissements autour de la compagne du président de la République, ce n'est pas bon pour lui, c'est évident", a-t-il dit à Reuters, tandis qu'un de ses collègues estime sous le couvert de l'anonymat que "cela empoisonne le paysage".

Frédéric Dabi maintient qu'il n'y a pas péril en la demeure.

"S'il y a une campagne de presse qui dure quatre ans, ça sera peut-être une mauvaise petite musique pour François Hollande", explique l'analyste de l'Ifop. "Mais de là à ce que ce soit un problème et quelque chose qui plombe le mandat de François Hollande, je n'y crois pas une seconde."

Avec Emile Picy, édité par Yves Clarisse