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Sarkozy promet de fournir les documents sur le dossier Karachi

Nicolas Sarkozy a promis samedi de transmettre à la justice française tous les documents nécessaires à l'enquête sur l'attentat de Karachi, une affaire dans laquelle deux présidents et deux anciens Premiers ministres français sont cités. /Photo prise le 2

Nicolas Sarkozy a promis samedi de transmettre à la justice française tous les documents nécessaires à l'enquête sur l'attentat de Karachi, une affaire dans laquelle deux présidents et deux anciens Premiers ministres français sont cités. /Photo prise le 2 - -

PARIS/LISBONNE (Reuters) - Nicolas Sarkozy a promis samedi de transmettre à la justice française tous les documents nécessaires à l'enquête sur...

PARIS/LISBONNE (Reuters) - Nicolas Sarkozy a promis samedi de transmettre à la justice française tous les documents nécessaires à l'enquête sur l'attentat de Karachi, une affaire dans laquelle deux présidents et deux anciens Premiers ministres français sont cités.

Dominique de Villepin a renforcé vendredi les soupçons judiciaires de corruption pesant sur la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995, suscitant une réaction en deux temps de Nicolas Sarkozy, jusqu'alors très discret.

De son côté, son prédécesseur Jacques Chirac, cible d'une plainte pour mise en danger d'autrui et homicides volontaires, n'a pas à témoigner devant un juge dans cette affaire, dit son avocat.

La piste d'une vengeance après l'arrêt du versement de commissions a pris de l'ampleur dans l'enquête sur l'attentat suicide qui fit en 2002 15 morts, dont onze Français de la Direction des constructions navales (DCN). Ceux-ci travaillaient à la construction de sous-marins vendus par Paris.

Plusieurs témoins-clés, dont l'ancien ministre de la Défense Charles Millon et Dominique de Villepin, secrétaire général de l'Elysée sous Jacques Chirac, ont confirmé que, tout juste élu en 1995, le chef de l'Etat avait demandé de mettre fin aux contrats pouvant donner lieu à des rétro-commissions, dont celui des ventes de sous-marins signé en septembre 1994.

L'argent, selon une piste suivie par la justice, pourrait avoir servi à financer la campagne présidentielle du Premier ministre de l'époque, Edouard Balladur. Nicolas Sarkozy était à l'époque porte-parole de sa campagne et ministre du Budget.

"La justice est saisie, qu'elle fasse son travail, qu'on n'essaye pas de coller dessus des commentaires politiciens", a dit l'actuel chef de l'Etat, interrogé sur le sujet lors d'une conférence de presse à Lisbonne, en marge du sommet de l'Otan.

PAS D'OBSTRUCTION, ASSURE SARKOZY

Vendredi soir, le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, a publié un long communiqué à la suite de la sortie médiatique de Dominique de Villepin. Il a dénoncé des "insinuations" et qualifié de "rumeur malveillante" la piste mettant en cause Edouard Balladur.

"Le communiqué était extrêmement précis (...) Il dit tout ce qu'il y avait à dire, il fait lit de toutes les calomnies, il montre la réalité des choses", a déclaré Nicolas Sarkozy. "Je n'entretiendrai pas une polémique qui n'a pas lieu d'être."

Alors que des familles de victimes dénoncent une obstruction politique à la bonne marche de l'enquête, Nicolas Sarkozy s'est engagé à transmettre tous les documents dont la justice aurait besoin, assurant que pas un n'avait été refusé.

L'ex-ministre de la Défense Hervé Morin a revendiqué vendredi la déclassification de tous les documents autorisés par la commission chargée du secret de la défense nationale.

La mission d'information parlementaire a déploré des refus d'auditions et de transmission de documents.

Les juges d'instruction Marc Trévidic et Renaud Van Ruymbeke n'ont pas obtenu l'accès aux témoignages livrés aux députés et aux délibérations du Conseil constitutionnel lors de la validation des comptes de campagne d'Edouard Balladur.

CHIRAC VA SE TAIRE, PAS VILLEPIN

Renaud Van Ruymbeke, qui multiplie les auditions sur cette piste du financement politique, dispose de témoignages concordants mais pas de preuves des rétro-commissions.

Il peut tenter de suivre la trace de l'argent passé par deux sociétés créées au Luxembourg, selon un ancien dirigeant de la DCN et un rapport de la police luxembourgeoise - un transit qui aurait été organisé, selon ces sources, par Nicolas Sarkozy.

Jacques Chirac n'a pas, jusqu'à présent, été sommé de dire ce qu'il sait ou soupçonne de ce système de corruption présumée, rappelle son entourage, persuadé que ce ne sera pas le cas.

Pour son avocat Jean Veil, qui ne confirme pas que le président a ordonné l'arrêt du versement de commissions en 1995, "on va trop vite dans ce dossier".

En vertu de la séparation des pouvoirs, "les juges ne peuvent pas examiner des actes commis ou accomplis par le pouvoir exécutif d'une part, et d'autre part la Constitution prévoit que le chef de l'Etat ne peut pas témoigner (...) sur des faits qu'il a accomplis dans le cadre de ses fonctions", a-t-il dit sur RTL.

Mais la détermination des familles des victimes et la rivalité opposant Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin, qui souhaite être entendu la semaine prochaine, peuvent encore alimenter l'affaire Karachi.

Clément Guillou à Paris, Emmanuel Jarry et Julien Toyer à Lisbonne, édité par Jean-Loup Fiévet