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Politique

Sarkozy et « le nouvel extrémisme européen »

« Les coulisses de la politique », tous les matins à 7h20 sur RMC et RMC.fr avec C. Jakubyszyn.

« Les coulisses de la politique », tous les matins à 7h20 sur RMC et RMC.fr avec C. Jakubyszyn. - -

Un journal : Newsweek. Une photo en gros plan : Nicolas Sarkozy. Un titre : « Le nouvel extrémisme européen ». Et un sous-titre : « Sarkozy et la montée de l’extrême-droite ». A 18 mois de la Présidentielle, drôle d’image de la France que nous renvoient là les Américains.

La photo de notre Président n’est pas très avantageuse. Et si l'on s’arrête à la couverture du Newsweek en date du 4 octobre, c’est une drôle d’image de la France que nous renvoient les Américains. « En France, le président Nicolas Sarkozy, à la recherche d'un nouvel élan populiste pour relancer une aura politique en berne, a lancé une campagne de violentes accusations et d'expulsions forcées visant la minorité Rom », juge l'hebdomadaire. Il ajoute que « la commissaire européenne à la Justice, Viviane Reding, a été "à deux doigts de traiter Sarkozy de nazi" ».

Pourtant, Newsweek est un journal sérieux et pas militant. C’est pour cela qu’il faut prendre cet article au sérieux. C’est un peu comme un miroir qui nous est tendu. Que lit-on dans le corps de cet article sur la France ? La vérité. Que Nicolas Sarkozy n’est pas un homme d’extrême droite. Qu’il est plutôt un homme du centre. Qu’il ne pense sans doute pas ce qu’il dit. Mais qu’il a pris peur face à la montée de l’extrême droite, la progression des idées extrémistes auprès d’une partie de la population qui, comme partout en Europe, est déstabilisée par la mondialisation, par la montée de l’individualisme, et aussi par l’arrivée d’une nouvelle vague d’immigration plus difficile à assimiler.
Mais pourquoi Nicolas Sarkozy flirte-t-il avec certaines idées de l’extrême droite, du Front national notamment, s’il n’en partage pas les idées ? Probablement fait-il un calcul politique. Et il est obligé d’aller vite. L’élection présidentielle, c’est dans 18 mois. Or, Nicolas Sarkozy a peur. Il redoute le premier tour de ce scrutin. Il craint notamment Marine Le Pen et un « 21 avril à l’envers », c'est-à-dire une situation ou Marine Le Pen serait devant lui au premier tour. Selon les sondages, 5 à 7% des Français seraient à la frontière entre l’UMP et le FN. 7%, ça fait une élection. Ça fait l’élection de 2012. Alors, le calcul de Nicolas Sarkozy est simple : il faut conserver cet électorat-là. On n’a pas le temps de lui expliquer, de le convaincre. Il faut le séduire, le rassurer. D’où le discours de Grenoble cet été sur la sécurité. Rajoutons-y le combat de coq avec la Commission européenne sur les expulsions de gens du voyage et de Roms.

La tactique prime sur la démagogie

Mais est-ce vraiment la bonne stratégie politique ? C'est l’avenir qui nous le dira. Ce qui est sûr, c’est que c’est une stratégie à double tranchant. D’abord, il banalise les idées du FN, il les dédiabolise. La preuve, un tiers des sympathisants UMP a désormais une bonne image de Marine Le Pen, selon l’institut CSA.
Ensuite, il n’est pas certain que les Français soient dupes. Cette stratégie avait déjà été utilisée en 2007. Et il n’est pas sûr que les électeurs sensibles à ces idées ne préfèrent pas, cette fois-ci, l’original. « J’ai bien senti que j’étais marquée à la culotte par Nicolas Sarkozy », explique Marine Le Pen, tout en nuançant : « Le problème, c’est que Nicolas Sarkozy ne peut pas aller au bout de sa politique ». Et puis, évidemment on peut se demander si la politique c’est uniquement du calcul. Si le Président ne joue pas avec le feu.
Et s’il n’aurait pas intérêt à faire davantage de pédagogie que de tactique.

Christophe Jakubyszyn