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Sarkozy en première ligne dans l'affaire Bettencourt

Visé par plusieurs perquisitions effectuées mardi, Nicolas Sarkozy est plus que jamais en ligne de mire dans l'enquête sur la fortune de l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt. /Photo d'archives/REUTERS/Eric Feferberg/Pool

Visé par plusieurs perquisitions effectuées mardi, Nicolas Sarkozy est plus que jamais en ligne de mire dans l'enquête sur la fortune de l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt. /Photo d'archives/REUTERS/Eric Feferberg/Pool - -

Visé par plusieurs perquisitions, une "première" pour un ex-chef d'Etat, Nicolas Sarkozy est plus que jamais en ligne de mire dans l'enquête sur la fortune de l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt.

Les juges de Bordeaux Jean-Michel Gentil, Valérie Noël et Cécile Ramonatxo, accompagnés de leurs greffiers, de quatre policiers et de deux membres du conseil de l'ordre des avocats ont mené mardi les perquisitions, dit-on de source proche du dossier.

Elles ont été effectuées au domicile de Nicolas Sarkozy et Carla Bruni, dans les locaux financés sur fonds publics en qualité d'ancien président et dans les locaux de son ancien cabinet d'avocats. Les résultats n'étaient pas connus mercredi.

Ce traitement est sans précédent pour un ancien chef d'Etat et avait été épargné en 2007-2011 à Jacques Chirac, pourtant interrogé dans plusieurs affaires et devenu finalement en décembre 2011 le premier ex-président de l'histoire de la République condamné en correctionnelle.

Alors que Jacques Chirac était poursuivi pour des faits vieux de deux décennies, c'est cette fois un financement présumé illicite de la campagne présidentielle de 2007 avec des espèces qui auraient été soustraites à une Liliane Bettencourt en état de "démence" qui est visé.

Le maire UMP de Nice Christian Estrosi a condamné la démarche des juges sur Europe 1 mercredi, parlant de "justice-spectacle" et estimant que les magistrats avaient attendu le départ de Nicolas Sarkozy en vacances pour le Canada, intervenu lundi. Il doit y passer quelques jours.

Le ministre PS de l'Intérieur Manuel Valls ne voit au contraire rien d'anormal dans les perquisitions. "C'est un justiciable comme un autre. La justice, sur ces sujets-là, doit faire la lumière", a-t-il déclaré, sur Europe 1 également.

Pour plusieurs acteurs du dossier, l'audition de Nicolas Sarkozy paraît désormais inéluctable procéduralement, ne serait-ce que parce qu'il a le droit d'accéder à un dossier riche désormais de très nombreuses investigations le concernant directement.

DEUX RETRAITS DE 400.000 EUROS ET UNE VISITE

"Il ne me paraît pas absolument illogique qu'un juge d'instruction saisi d'une affaire dont un des volets concerne un présumé financement illicite mène des perquisitions chez le principal intéressé, voire décide son audition", a dit à Reuters Me Antoine Gillot, avocat de l'ex-comptable des Bettencourt Claire Thibout, témoin à charge.

"Je comprends qu'on s'en émeuve compte tenu de la qualité éminente de la personne en question, mais personne ne s'est ému quand il y a eu des perquisitions chez d'autres personnes", a-t-il ajouté.

Les juges ont déjà saisi les comptes de la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy, fait interroger les fournisseurs de cette campagne ainsi que, selon RTL, l'ex-ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux, proche de l'ancien président.

Plusieurs interrogatoires de l'ex-gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt Patrice de Maistre, écroué durant trois mois, ont été menés sur les quatre millions d'euros en espèces qu'il a fait extraire des comptes suisses de Bettencourt en 2007-2009, particulièrement sur deux retraits de 400.000 euros chacun au moment de la campagne Sarkozy.

Patrice de Maistre, membre du Premier cercle, club des donateurs fortunés de l'UMP, était un proche du trésorier de la campagne Sarkozy, Eric Woerth, qu'il a rencontré au moment des retraits d'espèces et qui est aussi mis en examen.

Réélu député le 17 juin, Eric Woerth, dont l'épouse a été embauchée par Patrice de Maistre après les faits et qui a remis personnellement la Légion d'honneur au gestionnaire de fortune en 2008, nie tout financement occulte de la campagne.

L'ex-comptable de Liliane Bettencourt Claire Thibout maintient depuis trois ans son récit sur un autre retrait de 150.000 euros, pour partie en France et partie en Suisse, ordonné selon elle par Patrice de Maistre pour la campagne Sarkozy.

Par des interrogatoires du personnel de maison, les juges ont établi que Nicolas Sarkozy s'était rendu chez les Bettencourt en février 2007. Les magistrats se sont fait remettre mardi à Paris l'agenda de l'ex-président que ce dernier avait déposé chez un huissier. Nicolas Sarkozy a dit aux médias ne pas voir en quoi cette visite pouvait être un élément à charge.

Son avocat Thierry Herzog a donné aux juges l'identité des personnes chargées en 2007 de la sécurité de Nicolas Sarkozy, à même selon lui de démontrer "l'impossibilité absolue de 'rendez-vous secrets' avec madame Liliane Bettencourt".

Thierry Lévêque avec Nicolas Bertin, édité par Patrick Vignal

La Rédaction, avec Reuters