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Politique

Salaire minimum, mécontentement maximum

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Le gouvernement a confirmé mardi que le Smic augmenterait de 2% au 1er juillet : une hausse dérisoire qui se retourne contre François Hollande. C’est un peu salaire minimum, mécontentement maximum...

En politique, une décision qui provoque à la fois les critiques de vos opposants et les reproches de vos électeurs, c’est ce qui s’appelle un mauvais coup. La revalorisation qu’annonce le gouvernement, elle est infime : 8 euros par mois (pour 35 h) ; et sur les 2% prévus, il y a 1,4% automatique, qui correspond à l’inflation. Donc en fait de coup de pouce, c’est un coup d’auriculaire ! Résultat : les syndicats (CGT et FO en tout cas) trouvent que c’est insuffisant ; les patrons de PME (qui emploient les ¾ des smicards), que c’est au-dessus de leurs moyens ; et une partie de la droite, que c’est démagogique. Le pire, c’est qu’ils ont tous raison !

Autrement dit, le gouvernement aurait mieux fait de ne pas toucher au Smic du tout ?

Au départ, c’était la préférence de François Hollande : il était contre la revalorisation du Smic, au nom du réalisme économique – c’est le PS qui voulait l’augmenter, comme Ségolène Royal en 2007, et Jean-Luc Mélenchon encore plus. Pendant la campagne, il a fini par l’inscrire dans son projet quand la montée de Mélenchon dans les sondages est devenue inquiétante pour lui : comme la tranche supérieure d’impôt de 75%, c’était un symbole pour « gauchir » son discours. A l’arrivée, on peut considérer que c’est plutôt à son honneur de vouloir tenir ce qu’il a promis. Mais la vérité, c’est qu’il aurait dû se dispenser de faire cette promesse.

Est-ce qu’avec la crise et les inquiétudes venues de Grèce ou d’Espagne, l’opinion ne peut pas se montrer plus réceptive à des politiques d’économie ?

Peut-être mais le problème, c’est que cette hausse du Smic est à peine perceptible pour ceux qui en bénéficient (21€/mois…) mais pas indolore pour les entreprises. Jadis, le salaire minimum était un instrument qui permettait de tirer les revenus vers le haut et la société avec. En 68, Pompidou l’a augmenté de 35% et Mitterrand, en 81, de 20%. Avec la crise et le chômage, la société s’habitue au nivellement par le bas : on ne rêve plus d’améliorer les bas salaires mais de plafonner les plus hauts revenus. De ce point de vue, François Hollande est l’homme de son temps : faute de moyens, il cherche des solutions moyennes – avec le risque de conséquences médiocres.

Est-ce qu’il faut y voir un mauvais présage pour les catégories les plus défavorisées ?

Oui. Ce n’est pas la marque d’une politique antisociale – il ne faut pas exagérer – mais c’est un contre-signal évident. La gauche au pouvoir en France a toujours commencé par du rêve et fini par des désillusions. Hollande sait que le temps et l’argent lui sont comptés : il économise sur le rêve et commence par les désillusions.

Pour écouter Le Parti Pris d'Hervé Gattegno de ce mercredi 27 juin, cliquez ici.

Hervé Gattegno