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Retraites et déficits, nicolas sarkozy en proie à la défiance

Le sentiment dans l'opinion que sa politique est injuste complique les choses pour Nicolas Sarkozy, au moment où sa réforme des retraites affronte l'épreuve de la rue et où la lutte contre les déficits s'installe comme une priorité pour son gouvernement.

Le sentiment dans l'opinion que sa politique est injuste complique les choses pour Nicolas Sarkozy, au moment où sa réforme des retraites affronte l'épreuve de la rue et où la lutte contre les déficits s'installe comme une priorité pour son gouvernement. - -

par Yann Le Guernigou PARIS (Reuters) - Le sentiment dans l'opinion que sa politique est injuste complique les choses pour Nicolas Sarkozy, au...

par Yann Le Guernigou

PARIS (Reuters) - Le sentiment dans l'opinion que sa politique est injuste complique les choses pour Nicolas Sarkozy, au moment où sa réforme des retraites affronte l'épreuve de la rue et où la lutte contre les déficits s'installe comme une priorité pour son gouvernement.

Présentée comme la réforme emblématique de son quinquennat, le projet de loi sur les retraites illustre cette défiance.

Trois Français sur quatre (73%) soutiennent la mobilisation nationale prévue mardi contre cette réforme, qu'ils jugent injuste (64%) et qui ne résoudra pas, pour 68% d'entre eux, le problème des retraites sur le long terme, selon un sondage Obea-InfraForces pour France Info et 20 Minutes publié lundi.

"Tout ce que fait ce gouvernement économiquement est perçu dans l'opinion comme injuste et inefficace", déclare Gaël Sliman, directeur de l'institut BVA Opinion.

Le bouclier fiscal et le slogan de 2007 "travailler plus pour gagner plus" quand il s'est heurté à la dure réalité de la crise ont alimenté ce sentiment déjà très perceptible dans les bilans de mi-mandat du chef de l'Etat.

Les retraites n'ont fait que le conforter, ses opposants accusant le gouvernement de pénaliser les catégories modestes et ceux qui sont entrés tôt dans la vie active.

Le mouvement de mardi bénéficie d'un niveau de soutien comparable aux grandes mobilisations du passé sur le même sujet quand on enlève la catégorie des 65 ans et plus, qui échappera à la réforme, souligne Gaël Sliman.

LE FEU DANS LA RUE

Nicolas Sarkozy, dont la popularité est au plus bas, a exclu de revenir sur la mesure symbole de sa réforme, le passage de 60 à 62 ans pour l'âge légal de départ à la retraite.

Mais l'Elysée, soucieuse de tenter de désamorcer les tensions, a indiqué que le gouvernement proposerait dans les jours qui viennent des "avancées" sur des sujets annexes comme la prise en compte de la pénibilité ou les carrières longues.

"Le risque est que, pour s'en sortir, le gouvernement fasse beaucoup de concessions, lâche du lest avec une multiplication des clauses particulières", dit Gaël Sliman, pour qui Nicolas Sarkozy, à 18 mois de la prochaine présidentielle, "aborde une séquence où il ne peut se permettre d'avoir le feu dans la rue".

"La réforme ne serait alors qu'un affichage", ajoute-t-il.

La politique de lutte contre les déficits, qui doit trouver sa concrétisation dans le projet de budget 2011 en préparation, se heurte aux mêmes problèmes d'efficacité et de justice.

Deux conseillers de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant et Henri Guaino, ont laissé entendre dimanche que le bouclier fiscal, qui limite l'imposition à 50% des revenus et bénéficie donc aux plus aisés, pourrait évoluer sous la forme d'une obligation faite à leurs bénéficiaires d'investir dans des PME.

Défendu contre vents et marées par le chef de l'Etat, ce dispositif très impopulaire est le "coeur du sarkozysme économique et fiscal, sa matrice originale, un des seuls liens qui reste entre 2007 et 2010 alors qu'il est passé entretemps d'un libéralisme assumé à un interventionnisme à tous crins pour lutter contre la crise", estime Gaël Sliman.

PERDRE SUR LES DEUX TABLEAUX

"Revenir dessus reviendrait à dire 'oui, je peux mener une politique plus juste' mais il risque alors de perdre sur les deux tableaux en mécontentant à droite sans pour autant convaincre ses opposants".

Pour Jean-Daniel Lévy, directeur du département politique-opinion de CSA, "l'injustice pour les Français, c'est aussi l'absence de politique de redistribution".

"Et il est difficile de leur parler lutte contre les déficits sans leur expliquer à quoi cela servira, sans leur donner de perspectives sur la place de l'Etat et du politique dans la société française", ajoute-t-il.

Dans ce contexte, Nicolas Sarkozy aura de "gros signaux" à donner à l'opinion pour qu'elle cesse de penser qu'il mène une politique pour les riches, estime-t-il.

Claude Guéant a concédé dimanche sur Europe 1 que "quelques images" des premières heures du quinquennat avaient pu troubler l'opinion et accréditer cette thèse.

Il faisait allusion, sans les nommer, à la célébration de la victoire de Nicolas Sarkozy dans un établissement célèbre des Champs-Elysées en compagnie notamment de quelques grands patrons amis puis du séjour qui a suivi sur le yacht d'un industriel.

Mais le secrétaire général de l'Elysée a déclaré que le chef de l'Etat était aujourd'hui totalement mobilisé par sa tâche et que des mesures comme la revalorisation du minimum vieillesse ou pour favoriser l'accès des grandes écoles aux élèves issus des quartiers difficiles montraient qu'il n'est "absolument pas un président des riches".

édité par Yves Clarisse