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Politique

Ramadan : « Le signe religieux de la loi, c'est le signe musulman »

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Auteur controversé, Tariq Ramadan est revenu dans les GG sur trois sujets sensibles : la laïcité, les écoles musulmanes et la discrimination positive.

Tariq Ramadan, directeur du Centre islamique de Genève et auteur de « Islam, la réforme radicale » (Editions Presses du Châtelet), était l'invité des Grandes Gueules mardi 14 octobre. Il est revenu sur certains sujets qui lui tiennent à cœur, dont la laïcité :
« Je demande simplement l'application de la loi de 1905 telle qu'elle est dans son esprit et dans sa lettre tout simplement. Telle qu'elle est, et de façon égalitaire. Mais ça gêne, parce qu'on a l'impression que quand les Français de confession musulmane demandent la même chose que les chrétiens... »

La France pousse les musulmans au communautarisme

« Par exemple, je suis moi-même contre les écoles privées musulmanes. Je pense que ce n'est pas la solution. Moi, je viens de l'école publique où l'on était mélangés. Mais avec les lois qu'on a pu prendre comme la loi de 2004 sur la question du foulard, dont je pense qu'elle était discriminatoire, on pousse un peu les gens à aller dans le secteur privé. Je pense que c'est une mauvaise solution. Mais là où on a tort, c'est qu'on pousse les gens à faire des écoles privées musulmanes, et qu'ensuite on leur dit « Vous êtes pour le communautarisme », quand on a des écoles privées juives et catholiques. La loi française le permet, on devrait l'accepter pour tous. La vraie question n'est pas que les musulmans fassent comme les autres : ils ont le droit alors il faut arrêter de les traiter de communautaristes quand en plus la politique générale du pays a été de les pousser dans cette direction ».

Entre le foulard et l'école, il faut choisir l'école

« Les trois écoles musulmanes qui sont sur la métropole ont été pensées et conceptualisées après la loi de 2004, c'est clair. Vous avez aussi énormément de musulmans qui partent dans des écoles privées catholiques parce qu'ils y trouvent plus de liberté. Il faut savoir ce que l'on veut : une école pour tous qui intègre tout le monde, ou une école qui stigmatise les gens. Quand on parle de signes religieux, il faut arrêter de nous faire rigoler : le signe religieux à ce moment là, c'était clairement le signe musulman qui était considéré comme ostentatoire. Je trouve que c'est une loi stupide. Mais comprenez-moi bien. Dans l'application de la loi, quand une jeune fille me pose la question, je lui dis : s'il faut choisir entre l'école et le foulard, il faut aller à l'école ».

Un déficit de lecture égalitaire

« La laïcité positive (prônée par Nicolas Sarkozy, ndlr), ça ne veut rien dire, comme la discrimination positive. Tout ce qui est « positif » met simplement en évidence pour moi le déficit qu'il y a de lecture égalitaire de ce que c'est. La laïcité, il faut qu'elle soit ce qu'elle est. Quand on parle de discrimination positive, ça ne m'intéresse pas beaucoup, parce que si aujourd'hui il faut montrer Rachida Dati comme exemple de la discrimination positive pour cacher tout ce qui est en train de se passer en termes de discriminations réelles des banlieues, sur la vie quotidienne des gens, la discrimination à l'emploi, à l'habitation... Je ne veux pas de symbole à la Colin Powell pour nous cacher la réalité de la discrimination réelle, négative, absolument inacceptable dans le pays ».

Je suis très critique vis-à-vis de Fadela Amara

« Je me méfie des symboles, parce que les symboles jouent sur l'affectif et ils ne jouent pas sur les politiques réelles. Fadela Amara devrait être embêtée de ce parcours : elle est passée de la gauche militante à l'acceptation des positions de Sarkozy. Mon positionnement politique par rapport à elle est extrêmement critique, je ne suis pas le seul : tous ceux qui ont pu la soutenir un temps sont aussi critiques. Ce qui m'intéresse, c'est qu'est-ce qu'elle a apporté comme politique réelle sur le plan social, sur des populations qu'elle dit connaître, et dont j'ai toujours dit qu'elle les connaissait moins que ce qu'elle disait. Soutenir des évènements médiatiques, c'est une chose, développer des vraies stratégies de terrain, c'en est une autre ».

La rédaction-Les Grandes Gueules