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Présidentielle: les politiques tiennent salon chez les coiffeurs

En trois jours, Alain Juppé, Emmanuel Macron et Bruno Le Maire ont déambulé chacun leur tour dans les allées du Salon international de la coiffure, à Paris. L’occasion d’évoquer des sujets de campagne comme la formation professionnelle ou la ruralité, auprès de potentiels électeurs.

Entre les stands de barbier et de coloristes, les caméras s'agitent. "C'est qui, le Premier ministre?", demande une jeune fille, prête à réclamer un selfie. Raté. Mais le Salon international de la coiffure n'avait sans doute jamais vu autant de responsables politiques défiler dans ses allées: en trois jours, il a vu passer Alain Juppé, Emmanuel Macron et Bruno Le Maire. Campagne pour la présidentielle oblige – Alain Juppé et Bruno Le Maire sont candidats à la primaire à droite, Emmanuel Macron n'a encore rien officialisé – tous trois sont venus saluer les professionnels de la coiffure porte de Versailles, et afficher leur soutien à la profession.

Après Alain Juppé dimanche, Emmanuel Macron lance le bal lundi midi. Souriant et sans cravate, l'ancien ministre se prête au jeu des selfies et répète une fois de plus qu'il s'apprête à rendre son "diagnostic" sur l'état de la France, comme promis avant l'été. Il justifie son appel aux dons lancé en fin de semaine, rappelant que "'En marche!' (son mouvement politique fondé au printemps, Ndlr) ne touche aucune subvention publique".

Interrogé sur les sujets d'actualité, Emmanuel Macron fait penser à un candidat en campagne, même s'il n'en dira pas plus. Sa communication dit le reste: venu avec une petite barbe de trois jours, il n'a pas manqué l'occasion de se faire raser devant les caméras… et ressort de l'expérience avec une coupure au menton.

"Nous, on crée des emplois"

Les exposants, eux, observent le ballet, perplexes. "Serrer des mains, c'est quand même la partie la plus facile de leur métier", lance Jean-Philippe, coiffeur à Marseille, qui a eu droit à sa poignée de mains. "Mais tant mieux s'ils viennent tous, ça montre qu'on prend de l'ampleur".

Surtout, les coiffeurs sont des artisans, et intéressent les candidats en tant que tels. Véronique Fontan, présidente de la formation à l'Unec (Union nationale des entreprises de coiffure), se souvient que l'artisanat "a longtemps été négligé par les politiques. Mais peu à peu, ils réalisent que face à des dossiers compliqués comme celui d'Alstom, nous, nous sommes concrets, nous créons de l'emploi régulièrement et nous ne délocalisons pas. Certes nous sommes petits, mais nous sommes massifs. L'artisanat, c'est une manne électorale".

Courtisés, les coiffeurs? Les politiques semblent en tout cas avoir compris le pouvoir dont ils disposent: la discussion avec leur clientèle, le relais d'idées et de commentaires au quotidien. "C'est comme dans un taxi: dans un salon de coiffure, on commente l'actualité, on parle énormément", abonde Patrick Toulmet, proche d'Emmanuel Macron et président de la Chambre des métiers de Seine-Saint-Denis.

Les coiffeurs sont-ils de droite?

Bruno Le Maire l'a compris lui aussi. Après avoir échangé une poignée de mains avec Emmanuel Macron sur le perron du Parc des expositions, et donné rendez-vous en mai "quand j'aurai gagné la primaire", le candidat de la droite s'engouffre à son tour dans le bâtiment. "On va tous chez le coiffeur, c'est un moment important, ils sont partout sur le territoire. Cela fait la société française, et puis c'est le commerce, des dizaines de milliers d'emplois."

Mais pas question d'admettre que les coiffeurs peuvent représenter un électorat pour la droite: "Bien malin celui qui sait qui vote pour qui. Je ne classe pas les profs, je ne vais pas me mettre à classer les coiffeurs", répond-il… Avant de se lancer dans la réalisation d'un lissage brésilien dans un stand consacré à la discipline.

"On nous aime tous en période électorale"

Réforme du RSI, développement de la formation professionnelle, ruralité… Bruno Le Maire "n'est pas seulement venu pour écouter, mais aussi pour développer ses propositions" auprès des exposants. Bernard Moreau, qui dirige un lycée professionnel en Occitanie, écoute poliment mais n'en pense pas moins.

"J'ai 48 salariés, je ne suis pas du tout assez soutenu et je ne sais pas comment je vais finir l'année. Alors les visites de politiques, je n'en attends rien. On nous aime tous en période électorale, mais vous croyez vraiment qu'il y en a un qui va dire que l'apprentissage c'est nul et qu'on en a rien à faire? Moi, il n'y a que les actes qui me convainquent."

Il faudra aux candidats plus qu'un passage au Salon de la coiffure pour achever de convaincre. Mais il semble bien qu'à quelques mois de la présidentielle, la visite du Salon de la coiffure soit devenue aussi indispensable que celui de l'agriculture.
https://twitter.com/ariane_k Ariane Kujawski Journaliste BFMTV