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Passible des assises, Strauss-Kahn entend se battre en appel

Désormais passible de 20 ans de réclusion criminelle après un éventuel procès en cour d'assises, Dominique Strauss-Kahn entend faire appel de sa mise en examen pour "proxénétisme", dont ses avocats contestent vivement la validité juridique. /Photo prise l

Désormais passible de 20 ans de réclusion criminelle après un éventuel procès en cour d'assises, Dominique Strauss-Kahn entend faire appel de sa mise en examen pour "proxénétisme", dont ses avocats contestent vivement la validité juridique. /Photo prise l - -

Désormais passible de 20 ans de réclusion criminelle après un éventuel procès en cour d'assises, Dominique Strauss-Kahn entend faire appel de sa mise en examen pour "proxénétisme", dont ses avocats contestent vivement la validité juridique.

L'ancien patron du Fonds monétaire international (FMI), placé lundi à Lille sous contrôle judiciaire par trois juges d'instruction avec obligation de verser une caution de 100.000 euros, a cependant techniquement peu de chances d'obtenir dans l'immédiat l'annulation de ces poursuites. Ses avocats devaient, pour la première fois depuis l'apparition de son nom dans ce dossier fin 2011, donner une conférence de presse mardi après-midi pour protester contre l'orientation de l'affaire. "Cette histoire ne tient pas une seule seconde et les juges le savent très bien", dit-on mardi dans son entourage, qui estime qu'une interprétation extensive et erronée de la notion de proxénétisme a été faite au préjudice de leur client.

L'ancien favori socialiste des sondages pour la présidentielle est mis en cause pour des rencontres avec cinq prostituées organisées en 2010 et 2011 par deux amis entrepreneurs et un policier, à Paris et Washington. Lors de son audition, il a nié avoir su que ces femmes étaient des prostituées et parlé de simple libertinage sexuel. "Il déclare avec la plus grande fermeté n'être coupable d'aucun de ces faits et en particulier n'avoir jamais eu la moindre conscience que certaines femmes rencontrées pouvaient être des prostituées", a dit dès lundi soir l'un de ses avocats, Me Richard Malka, à la presse. "A supposer même qu'il aurait connu le statut des femmes dont il est question, il faut rappeler que le fait d'avoir une relation avec une 'escort' ne constituerait pas une infraction au regard de la loi française et relèverait d'un comportement privé, parfaitement licite entre adultes", a-t-il ajouté.

Une accusation sans précédent pour un élu

Mais les juges d'instruction, qui poursuivent au total une dizaine de personnes dans ce dossier, font une autre analyse. En se basant, selon une source proche de l'enquête, sur les échanges de textos avec ses amis à propos des femmes, ils retiennent le proxénétisme "aggravé en bande organisée". La définition légale de ce délit est notamment "le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit, d'aider, d'assister ou de protéger la prostitution d'autrui, de tirer profit de la prostitution d'autrui, (...) d'embaucher, d'entraîner ou de détourner une personne en vue de la prostitution". Le choix de cette qualification criminelle, plutôt que celle de "recel d'abus de biens sociaux" un instant envisagée - les amis de Dominique Strauss-Kahn ayant payé les femmes avec des fonds de leurs sociétés - est un coup dur pour l'ancien ministre de l'Economie, car sans précédent pour un élu de ce niveau.
L'ancienne juge d'instruction et candidate écologiste à la présidentielle Eva Joly a formulé des commentaires très sévères. "Comment est-ce possible que, lorsqu'on est patron du FMI, on ait pu réunir des suspicions graves de proxénétisme en bande organisée ? C'est gravissime", a-t-elle dit mardi sur Canal+.

Audiences à New-York mercredi

"Le devoir d'exemplarité des hommes politiques est mis à mal et on peut se demander quand il avait le temps de s'occuper réellement du FMI quand on voit son emploi du temps avec les filles", a-t-elle ajouté. Le candidat socialiste François Hollande s'est refusé à tout commentaire. "C'est une affaire privée, pénible, mais sur laquelle je n'ai pas de jugement politique à formuler", a-t-il dit sur France Bleu Nord. L'ancien lieutenant de Dominique Strauss-Kahn, Pierre Moscovici, a fait part de son côté de sa "tristesse" sur France Info, tout en refusant de se prononcer. "C'est à la justice de faire son travail", a-t-il dit.

Cette procédure intervient alors que les audiences au civil doivent débuter mercredi dans l'affaire Nafissatou Diallo devant un tribunal de New York, où l'ancien patron du FMI et la femme de chambre du Sofitel de Manhattan qui l'accuse d'agression sexuelle seront représentés par leurs avocats. Nafissatou Diallo accuse Dominique Strauss-Kahn de l'avoir violée le 14 mai dernier dans la suite 2806. Arrêté alors qu'il s'apprêtait à décoller pour l'Europe, Dominique Strauss-Kahn a passé plusieurs jours en prison mais le parquet de New York a abandonné les poursuites faute de preuves formelles.
A son retour à Paris, Dominique Strauss-Kahn a été interrogé sur la supposée agression sexuelle de la journaliste Tristane Banon en 2003. Le parquet de Paris a jugé les faits établis mais classé l'affaire sans suite pour cause de prescription.