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Quel est le rôle du président de l'Assemblée nationale, dont l'élection a lieu ce mardi?

La députée macroniste des Yvelines Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des Lois lors de la dernière législature, est pressentie pour accéder au Perchoir.

Sauf improbable coup de théâtre, la présidence de l'Assemblée nationale devrait ce mardi échoir à la députée La République en Marche (LaREM) des Yvelines, Yaël Braun-Pivet, qui deviendrait la première femme à occuper ce prestigieux et convoité poste. Élue députée pour la première fois en 2017, elle a présidé la commission des Lois au cours de son premier mandat, avant d'être une éphémère ministre des Outre-mer dans le gouvernement d'Élisabeth Borne. Un poste qu'elle a quitté ce week-end, en vue de sa très probable accession au Perchoir.

L'élection du ou de la présidente de la Chambre basse se déroule lors d'un vote à bulletin secret lors de la première séance, qui est par défaut présidée par le doyen de l'Assemblée nationale. En l'occurrence, c'est le député des Bouches-du-Rhône primo-élu du Rassemblement national (RN) - une première - José Gonzalez, 79 ans, qui endosse ce rôle dans la nouvelle composition de l'Assemblée.

Sauf démission, le président de l'Assemblée nationale est élu pour la durée de son mandat de député. Sous la dernière législature, c'est le député de Loire-Atlantique François de Rugy qui a d'abord occupé le poste jusqu'à son entrée au gouvernement en septembre 2018. Depuis, c'était le député du Finistère Richard Ferrand, personnage emblématique de la macronie, qui a pris la suite. Pressenti pour rempiler, il a été battu aux législatives. Tour d'horizon des principales prérogatives de l'occupant du Perchoir.

· Assurer la conduite des débats

"Le président (du Palais Bourbon, NDLR) a pour première mission d’assurer la conduite des débats dans de bonnes conditions au sein de l'hémicycle et de veiller au respect du règlement de l'Assemblée nationale", souligne le site de l'hémicycle.

Aux côtés de six vice-présidents qui peuvent le suppléer et diriger les séances, l'occupant de l'hôtel de Lassay est aussi "le garant de la bonne tenue des discussions" et doit veiller "à la discipline et au respect des députés entre eux dans l'hémicycle", indique le même site.

Ainsi, le président a aussi une fonction disciplinaire, en ayant la possibilité de prononcer un rappel au règlement à l'encontre d'un élu. Il déclare aussi la suspension d'une séance, qui est de droit si elle émane de lui-même, du gouvernement, du président de séance (par exemple un vice-président) notamment.

"Par ordre honorifique aujourd'hui, c'est le quatrième personnage de l'État, mais sur le plan politique il a sans doute perdu un peu de son pouvoir par rapport à un régime parlementaire", observe l'historien Jean Garrigues, joint par BFMTV.com.

Le spécialiste d'histoire politique estime cependant que dans les circonstances actuelles, avec la majorité relative dont dispose Ensemble, ce poste pourrait "retrouver un peu de lustre". Pour Jean Garrigues, le président de l'Assemblée nationale va avoir un "rôle accru d'intermédiaire et de négociation, d'arbitre des débats, car l'on risque d'avoir une assemblée un peu chahutée". Un avis partagé par François de Rugy, ancien locataire du Perchoir de 2017 à 2018, qui voit dans cette législature un vrai défi pour sa probable future occupante.

"C'est une Assemblée éclatée, dans laquelle il y a beaucoup de groupes d'opposition virulente. Évidemment, cela fera des questions d'actualité sans doute très difficiles à présider, et des séances autour de textes qui vont être compliquées à gérer", prédit l'ancien ministre de l'Écologie.

· Superviser la fixation des ordres du jour

Autre prérogative cruciale, le président de l'Assemblée nationale dirige également la conférence des présidents, qui regroupe les vice-présidents, les présidents des commissions permanentes, les rapporteurs généraux de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, le président de la commission des affaires européennes et les présidents des groupes, énumère le site de l'Assemblée.

"Au cours de sa réunion hebdomadaire, la Conférence examine l'ordre des travaux de l'Assemblée pour la semaine en cours et les trois suivantes", indique ledit site.

Une tâche pour laquelle "il va falloir là encore être dans la négociation, la transaction, l'arbitrage", note Jean Garrigues, auteur de La Tentation du sauveur, paru en mars 2022 aux éditions Payot.

· Présider plusieurs structures internes à l'Assemblée

Le titulaire du Perchoir préside aussi le bureau de l'Assemblée nationale, qui est composé par les six vice-présidents, les trois questeurs ainsi que douze secrétaires.

"C’est au bureau qu’il revient notamment de représenter collégialement l’Assemblée nationale dans les manifestations extérieures, d’interpréter et d’appliquer le règlement, de régler les incidents de séance majeurs, de nommer aux grades les plus élevés de l’administration de l’Assemblée nationale, d’agréer les groupes d’études, de coordonner les activités internationales, ou d’assurer l’équité de traitement au regard de la communication audiovisuelle", peut-on lire dans le lexique de l'Assemblée nationale.

Il préside également le Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC). Cette prérogative a été créée par la révision constitutionnelle de 2008. Désormais, à son article 24, la Constitution prévoit aussi que le Parlement "évalue les politiques publiques", en plus de voter la loi et de contrôler "l'action du gouvernement".

On surnomme son siège le "Perchoir", "tout simplement parce que le siège du président se situe au-dessus de la tribune", indique Jean Garrigues, qui rappelle que Jacques Chaban-Delmas, qui présida l'Assemblée entre 1958 et 1969, puis par intermittence jusqu'en 1988, "parlait de vigie".

· Des pouvoirs de nomination

Le président de l'Assemblée nationale possède également des pouvoirs de nomination. En plus des anciens présidents de la République qui en sont membres de droit, le Conseil constitutionnel est composé de neuf autres membres, nommés pour neuf ans. Ces derniers sont renouvelés tous les trois ans par tiers. Le président de l'Assemblée nationale nomme trois de ces membres, à la fréquence d'un tous les trois ans.

Le président de l'Assemblée nationale peut par ailleurs saisir, au même titre que le président du Sénat ou soixante députés ou soixante sénateurs, le Conseil constitutionnel. Il peut aussi effectuer une saisine du Conseil d'État pour avis, depuis la révision constitutionnelle de 2008.

"C'est un poste qui marque une étape dans une carrière politique, mais qui n'a pas pour l'instant été un tremplin vers d'autres fonctions. Il est plus apparu comme une sorte de couronnement", analyse aussi Jean Garrigues.

· Un rôle de représentation

Lors de déplacements, nationaux ou internationaux, l'Assemblée nationale peut être représentée par son président. Et ce, notamment au sein d'instances internationales comme la coprésidence du groupe français à l'Union interparlementaire ou lors de sommets des présidents des Parlements du G7 par exemple.

Clarisse Martin Journaliste BFMTV