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Parlement

Loi prostitution: le Défenseur des droits contre la pénalisation des clients

Jacques Toubon se dit contre la pénalisation des clients de prostituées, mesure selon lui inefficace.

Jacques Toubon se dit contre la pénalisation des clients de prostituées, mesure selon lui inefficace. - François Guillot - AFP

Le Défenseur des droits Jacques Toubon se dit contre la réintégration de la pénalisation des clients de prostituées lors des prochaines discussions sur la loi prostitution.

C'est un des points les plus problématiques d'une loi déjà polémique en elle-même. L'article concernant la pénalisation des clients de prostituées, retiré du projet de loi par les sénateurs en octobre, a été restauré le 15 décembre par les députés. L'Assemblée nationale ayant le dernier mot sur une proposition de loi, la mesure, de nouveau débattue à partir du 27 janvier, pourrait donc être actée. Une éventualité impensable pour Jacques Toubon, dans un avis dont l'AFP a pris connaissance.

Pour le Défenseur des droits, "l'interdiction de l'achat d'un acte sexuel basée sur le modèle suédois n'est pas la mesure la plus efficace pour "réduire la prostitution et pour dissuader les réseaux de traite et de proxénétisme de s'implanter sur les territoires", et encore moins "la solution la plus protectrice pour les personnes qui resteront dans la prostitution" comme annoncé dans la proposition de loi".

Le modèle suédois controversé

Il souligne notamment "que le modèle suédois cité en référence est aujourd'hui fortement controversé" et juge que "l'impact d'une telle disposition sur le phénomène prostitutionnel en France s'annonce limité, voire nul". De plus, la France comme la Suède manquent "de chiffres fiables" permettant "de quantifier les effets de la loi sur le système prostitutionnel", insiste-t-il.

Dans son argumentaire, Jacques Toubon souligne que la pénalisation des clients "accentuera la précarité des personnes prostituées en les forçant à davantage de clandestinité", "rendra plus difficile l'action des services de police dans la lutte contre la traite et le proxénétisme", exposera "davantage les prostitué-e-s à la violence de certains clients et aux contaminations au VIH et/ou aux hépatites virales", et les forcera "à accepter certaines pratiques ou rapports non protégés".

Les associations partagées

L'avis du Défenseur des droits "nous conforte dans ce qu'on dit, sans cependant se faire d'illusions quant à sa future prise en compte", a réagi Morgane Merteuil, porte-parole du Syndicat du travail sexuel (Strass), opposé à la pénalisation des clients. "Toutes les organisations de défense des droits de l'Homme sont contre cette loi (...) Mais les politiques s'en foutent. Ils refusent de voir la vérité", a-t-elle ajouté.

Pour l'Amicale du Nid, une association qui milite pour la sanction des clients, en revanche, l'avis est "consternant" et "montre que le Défenseur des droits ne sait rien du système prostitutionnel et reprend sans recul les propos des pro-prostitution alors qu'il est chargé de défendre les droits dans un pays abolitionniste (pour l'abolition de la prostitution, ndlr)".

H. M. avec AFP