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Parlement

Cumul des mandats: l'idée de son retour divise la majorité présidentielle et l'Assemblée

Emmanuel Macron devant le Congrès réunissant les deux chambres du Parlement (Assemblée nationale et Sénat) au château de Versailles, le 9 juillet 2018.

Emmanuel Macron devant le Congrès réunissant les deux chambres du Parlement (Assemblée nationale et Sénat) au château de Versailles, le 9 juillet 2018. - CHARLES PLATIAU / POOL / AFP

La proposition Horizons d'un retour au cumul des mandats pour les parlementaires a été rejetée par la Commission des Lois de l'Assemblée ce mercredi 6 mars. Divisée sur la question, la majorité ne trouve pas de consensus, la gauche elle est contre.

Un serpent de mer dans l'hémicycle. La question d'un retour partiel ou non du cumul des mandats agite régulièrement l'Assemblée. En 2021, après la crise des gilets jaunes et défendant l'idée d'une reconnexion des élus au terrain, Emmanuel Macron avait évoqué l'idée de revenir sur la loi instaurée par son prédécesseur François Hollande.

Celle-ci ne permet plus aux parlementaires d'être maires, adjoints, présidents ou vice-présidents d'intercommunalité, de conseil départemental et encore de conseil régional. À l'époque, l'idée de Macron avait été rejetée à l'Assemblée et au Sénat.

Ce mercredi 6 mars, la question a été reposée aux députés de la commission des Lois sur une initiative d'Horizons. Rejetée également, l'idée fait toutefois progressivement son chemin dans la majorité.

Manque de connexion au terrain

Le texte porté par les troupes d'Édouard Philippe à l'Assemblée utilise les mêmes arguments qu'Emmanuel Macron en 2021.

L'objectif est "d'ancrer les parlementaires dans les réalités du terrain", plaide son rapporteur Henri Alfandari, car "pour bien rédiger les lois", les élus doivent avoir "les mains dans le cambouis" et retrouver "un lien qui les unissait avec les citoyens de leur territoire".

L'article unique de la proposition de loi veut autoriser à nouveau députés et sénateurs à exercer des fonctions d'adjoint au maire, de vice-président de département ou encore de région. Mais pas de maire ou de président de conseils départementaux et régionaux.

Pour le député Renaissance, Karl Olive, chantre d'un renouveau de proximité et des remontées de terrain, l'idée est bonne. Avec une dizaine de collègues, il a même défendu des amendements levant l'interdiction de cumul y compris pour les maires, à l'instar des députés Les Républicains.

"Reconnaissons qu’il manque un souffle de cette connexion-là à l’Assemblée Nationale", déclarait-il dans une tribune sur le sujet en novembre dernier, revenant sur l'épisode des gilets jaunes et de la réforme des retraites. "Je crois qu'on s'est trompé", estime désormais le patron du MoDem et maire de Pau François Bayrou, autrefois farouche défenseur de l’interdiction du cumul.

Yaël Braun Pivet toujours opposée

En commission des Lois mercredi, les macronistes de Renaissance avaient toutefois la consigne de s'abstenir, reflétant l'embarras du groupe sur le sujet. "Je suis très opposée au retour au cumul des mandats", a clairement défendu la présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet, quelques heures plus tôt sur France Inter.

"50% de parlementaires exercent un mandat local" non-exécutif comme celui "de conseiller municipal", a-t-elle rappelé.

Comme elle, Sacha Houlié, président de la commission des Lois, conteste "le prétendu déracinement des députés" et souhaite que le texte soit "repoussé". "Je ne crois pas que le cumul soit la réponse à la crise de l'engagement politique", considère la députée MoDem Élodie Jacquier-Laforge, jugeant qu'il faut plutôt "susciter de nouvelles vocations pour les jeunes et notamment les femmes".

Risque d'augmenter la défiance

Les députés Insoumis, socialistes et écologistes se sont aussi opposés à tout retour du cumul. Pour eux, c'est prendre le risque de faire augmenter la défiance des Français envers les parlementaires.

Pour les "reconnecter" aux Français, il faut surtout leur permettre de "voter le budget, sans 49.3", a lancé l'écologiste Jérémie Iordanoff.

La députée LFI Raquel Garrido a même défendu un durcissement du non-cumul, en proposant d'interdire d'être à la fois parlementaire et conseiller régional ou départemental. Comme le sont certains de ses collègues Insoumis, à l'instar de Sophia Chikirou.

Les défenseurs de la loi de François Hollande en 2014 ont aussi fait valoir qu'elle avait contribué à renouveler et féminiser le personnel politique.

Rendez-vous dans l'hémicycle

Silence en revanche du côté du Rassemblement national. Le parti politique s'est abstenu de tout commentaire, réservant sa position "pour la séance", même si le texte Horizons "va dans le bon sens", a estimé l'élu du Pas-de-Calais, Bruno Bilde.

La proposition de loi organique (c'est-à-dire qui précise l'organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics) d'Henri Alfandari sera examinée le 14 mars en débat public. "Je reste convaincu qu'il y a une voie de passage", a assuré son rapporteur, convaincu que "le rapport de force ne sera pas le même dans l'hémicycle".

Hortense de Montalivet