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Après la tribune de Hulot, vote sous tension sur le traité Ceta à l'Assemblée

Le vote sur le CETA reporté à mardi à l'Assemblée nationale

Le vote sur le CETA reporté à mardi à l'Assemblée nationale - AFP

Initialement prévu la semaine dernière, le vote solennel sur le traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada (Ceta) doit avoir lieu ce mardi après-midi, à l'issue de la séance de questions au gouvernement. Un moment important pour une majorité en proie aux doutes sur les questions écologiques.

La fibre écologique de la majorité va être à nouveau mise à l'épreuve ce mardi à l'Assemblée nationale. Cet après-midi, à l'issue de la séance de questions au gouvernement, la ratification du traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada (Ceta en anglais) fera l'objet d'un vote solennel des élus du palais Bourbon. 

Négocié pendant plus de sept ans, l'"Accord économique et commercial global" (AECG) avait été approuvé par le Parlement européen en février 2017. Il doit être ratifié par les 38 assemblées nationales et régionales d'Europe, d'où son passage par notre Assemblée, puis au Sénat à une date qui reste à définir. Treize pays dont l'Espagne et le Royaume-Uni l'ont déjà ratifié. Le traité, qui supprime les droits de douanes sur 98% des produits échangés entre UE et Canada, est vivement critiqué par les agriculteurs et ONG, et les oppositions de droite comme de gauche.

Une trentaine d'abstentions LaREM?

Au lendemain d'une tribune très offensive de Nicolas Hulot publiée sur le site de Franceinfo, le scrutin de ce mardi s'annonce sous tension. "Ayez le courage de dire non", a exhorté l'ancien ministre de la Transition écologique en s'adressant principalement au groupe La République en marche. À l'occasion d'un point presse à l'Elysée lundi, Emmanuel Macron lui a répondu en affirmant que le texte allait selon lui "dans le bon sens". Et le président d'appeler l'écologiste à "un sens des responsabilités". 

Les groupes LaREM et MoDem, en surnuméraire, ne devraient pas manquer de voix pour obtenir une majorité favorable au Ceta. Sauf à ce que leurs députés se mobilisent insuffisamment au moment du vote. Des doutes subsistent toutefois au sein même de leurs rangs. Des abstentions devraient, comme à l'occasion d'autres textes clivants, être observées lors du décompte final.

Le député ex-LaREM Matthieu Orphelin, aujourd'hui sans étiquette, essaie de convaincre certains de ses anciens camarades d'aller dans ce sens.

"Beaucoup hésitent", assure-t-il auprès de BFMTV.com. 

Une personnalité issue de l'aile gauche du groupe comme Martine Wonner par exemple, députée LaREM du Bas-Rhin, a exprimé publiquement ses réticences vis-à-vis du Ceta. 

"Nous n’avons plus le temps d’attendre. Aux incantations doivent désormais succéder les actes, même s’il semblerait qu’au regard de l’urgence, ce traité soit passé à côté", déplorait-elle dans l'hémicycle mercredi dernier. 

Interrogée par BFMTV.com, l'élue confirme qu'elle s'abstiendra "activement" lors du scrutin. Une décision motivée par ses "convictions profondes face à l'urgence climatique et les engagements insuffisants de ce traité dans le domaine réel des capacités de contrôle à l'entrée" des produits "sur notre territoire". Selon elle, "au moins" une trentaine de membres du groupe LaREM ira dans le même sens. Le discours prononcé par Greta Thunberg dans la matinée ne risque pas de les en dissuader... 

Le Gendre sur le grill

Les dirigeants de la majorité peuvent-ils tolérer une nouvelle fronde? Hasard du calendrier, ce mercredi doit avoir lieu le renouvellement des postes à responsabilité au sein de la majorité. Au total, comme l'a révélé Le Figaro, la direction du groupe LaREM a reçu 91 candidatures sur 304 membres. Une cohue invraisemblable, qui touche évidemment le poste le plus convoité, à savoir celui de Gilles Le Gendre, actuel patron du groupe.

Confronté à six candidats qui briguent sa succession, notamment le député de Gironde Florent Boudié, l'élu parisien aura à cœur ce mardi, pour être réélu, d'illustrer sa capacité à "tenir" la majorité. D'autant plus que, vote solennel oblige, une partie du gouvernement sera présente dans l'hémicycle. Le ministre de l'Europe et des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, épaulé par son secrétaire d'État Jean-Baptiste Lemoyne, défendra le texte. Le Premier ministre Édouard Philippe devrait également être présent et compter les points. 

Des oppositions résolues

Du côté des oppositions, aucune surprise n'est attendue. Ce sont elles qui ont obtenu, de la part de la conférence des présidents de l'Assemblée nationale, que le scrutin soit reporté. Le format du vote solennel oblige par ailleurs chaque groupe à motiver sa consigne de vote. 

Dans le groupe Les Républicains, une majorité de députés devrait s'opposer au texte, quand bien même la droite, depuis 25 ans, se montre traditionnellement favorable au libre-échange. Sous la houlette de Christian Jacob (qui brigue la présidence de LR), elle reprend néanmoins à son compte les craintes du monde agricole.

À gauche, il y a relatif consensus entre La France insoumise, les communistes et les socialistes. Les trois groupes devraient unanimement voter contre le Ceta pour des raisons principalement liées à son impact écologique. Quant aux élus sans étiquette comme ceux du Rassemblement national ou Nicolas Dupont-Aignan, c'est une opposition globale à l'extension de la mondialisation qui motivera leur opposition. 

Restent les groupes modérés, majoritairement contre, qu'il s'agisse des UDI et indépendants ou de Libertés et territoires, où se trouvent les ex-LaREM François-Michel Lambert et Paul Molac.

"Le traité pose de vrais problèmes sur le plan environnemental", a argué le député de la Meuse Bertrand Pancher mercredi dernier. 
Jules Pecnard