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Politique

Moralisation: le Parlement va jouer les prolongations pour l'adoption définitive

Hémicycle de l'Assemblée nationale

Hémicycle de l'Assemblée nationale - CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Nouveau rebondissement sur la moralisation politique: faute d'un accord total entre députés et sénateurs mardi, l'exécutif va retarder les vacances des parlementaires d'une semaine pour faire adopter définitivement ces projets de loi emblématiques du début du quinquennat.

A deux jours de la fin initialement programmée, les 14 députés et sénateurs chargés de trouver un compromis en commission mixte paritaire sont parvenus à un accord sur un seul des deux textes pour la confiance dans la vie politique, le projet de loi ordinaire. 

Ce texte, qui prévoit notamment l'interdiction des collaborateurs familiaux pour les élus et la suppression de l'enveloppe pour frais de mandat des parlementaires, devrait être approuvé définitivement au Sénat mercredi, à l'Assemblée jeudi.

Echec sur le projet de loi organique

Echec en revanche sur le projet de loi organique: les positions ont été irréconciliables sur la réserve parlementaire.

Alors que l'Assemblée avait voté vendredi, après cinq heures de débats passionnés, la suppression de cette réserve (LR s'y étant opposé et la gauche s'étant abstenue), le Sénat, hostile, proposait son remplacement par un dispositif de soutien aux communes.

"En supprimant sèchement la réserve parlementaire, le gouvernement prive les territoires ruraux et les associations de 146 millions d'euros indispensables au financement de petits projets d'intérêt général", a dénoncé le président de la commission des Lois du Sénat Philippe Bas (LR). Les sénateurs socialistes ont déploré une "position de non-recevoir de la majorité de l'Assemblée". 

Selon la rapporteure à l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet (REM), la proposition du Sénat "revenait peu ou prou à maintenir ce qui existe, avec un système arbitraire et discrétionnaire", et "cela n'aurait pas été accepté par l'Assemblée".

"Terminer le travail"

Alors que les parlementaires s'attendaient à finir la navette fin septembre-début octobre, l'exécutif a finalement décidé que ce texte serait, après nouvelle lecture jeudi à l'Assemblée et vendredi au Sénat, définitivement adopté le 9 août par l'Assemblée, qui a le dernier mot.

Une surprise pour les députés, dont certains expriment leur fatigue après une campagne électorale et une session extraordinaire intenses. D'autant qu'ils avaient reçu comme message initial du secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement Christophe Castaner et du président de l'Assemblée François de Rugy qu'ils arrêteraient le 3 août.

"L'Assemblée nationale convoquée le 9 août ! Le renouveau politique En Marche : voter la nuit, se réunir en août", a tweeté le chef de file des Insoumis Jean-Luc Mélenchon. 

"On bosse 70-80 heures par semaine (...) Quand on veut bien faire son boulot, il faut être en forme", a renchéri Philippe Gosselin (LR), et "on fait subir à sa famille pas mal de contrecoups".

C'est la première fois, depuis l'instauration de la session unique en 1995, que les députés siègent aussi tard l'été. "On termine le travail jusqu'au bout quand on est élu", a lancé Sacha Houlié, vice-président de l'Assemblée (REM). 

Pour Boris Vallaud (Nouvelle Gauche), ce report "n'est pas un sujet" mais "le caractère expéditif interroge".

L'exécutif, qui avait visiblement pensé que le Sénat serait moins mobilisé sur la réserve, a privilégié une adoption rapide d'un des engagements phares de la campagne d'Emmanuel Macron, au coeur d'une alliance avec François Bayrou.

Le Sénat mi-juillet, l'Assemblée dans la nuit de vendredi à samedi après 50 heures de débats parfois chaotiques, avaient largement adopté les deux projets de loi, mais dans des versions différentes. 

Sur le premier texte, la version commune est proche de celle adoptée par l'Assemblée, avec notamment le maintien du "verrou" de Bercy pour les poursuites sur la fraude fiscale et une peine complémentaire d'inéligibilité en cas notamment de manquements à la probité. Celle-ci sera inscrite au casier judiciaire.

Députés et sénateurs se sont mis également d'accord sur l'interdiction pour les collaborateurs des parlementaires, mais aussi des ministres et du président de la République, d'être rémunérés par des représentants d'intérêts. 

Pour les ministres, un principe de déport en cas d'éventuel conflit d'intérêts a été inscrit, comme le souhaitait le Sénat, et un décret devra fixer modalités et limites de leurs frais de représentation.

P.A., avec AFP