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Politique

Marseille ne peut pas devenir la capitale du FN !

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno, c'est tous les jours à 8h25 sur RMC.

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno, c'est tous les jours à 8h25 sur RMC. - -

Marine Le Pen tient ce week-end l’université de son parti à Marseille alors que les sondages montrent la progression du FN dans la 2ème ville de France, à 6 mois des municipales.

Voilà 30 ans que le FN est un acteur majeur à Marseille : il y a fait de gros scores électoraux, il a eu des élus, il pèse sur la vie politique locale et régionale. Mais il y a un double facteur qui interdit au FN d’espérer conquérir la mairie: la sociologie de la ville fait qu’il reste une population bourgeoise importante, qui rejette les extrêmes ; et le mode de scrutin municipal qui découpe la ville en 8 secteurs (un peu comme à Paris et à Lyon) et qui, arithmétiquement, interdit au FN d’être majoritaire. Sans compter l’histoire de cette ville, qui en fait une capitale de la tolérance et du métissage, et non une citadelle de l’extrémisme et du repli identitaire.

Il n'empêche que le climat d'insécurité doit profiter à Marine Le Pen et à son parti, puisque les sondages placent la liste FN en 2è position derrière l'UMP...

Qu’il y ait une vague de crimes qui bouleverse les Marseillais est une évidence. Que l’exaspération qui en résulte fasse le jeu du seul parti qui n’a jamais été au pouvoir (ni à Marseille ni dans le pays) c’est logique. Seulement Marseille n’est pas seulement un haut lieu de la délinquance. C’est aussi la capitale européenne de la culture, qui attire des millions de visiteurs et d’immenses manifestations publiques sans le moindre incident. C’est une ville tournée vers la Méditerranée et le Maghreb, où les communautés religieuses coexistent depuis toujours. C’est une ville pauvre, mais riche de ses différences. Autrement dit : c’est un contre-exemple géant de tout ce que professe le FN.

Peut-être, mais est-ce que le parti de Marine Le Pen ne peut pas profiter aussi de l'état de délabrement de la classe politique locale ?

On a les politiques qu’on mérite. Avec les hommages que je viens de rendre à Marseille, j’ai le droit de dire que les Marseillais alimentent leur propre caricature : ils sont indisciplinés et égoïstes, stationnent n’importe où, salissent les rues – parfois, ce n’est pas « Plus belle la vie » mais la ville-poubelle. Les Marseillais réclament de l’ordre mais ils fabriquent du désordre. La politique locale est à cette image : c’est le grand bazar du clientélisme, du népotisme et des combines. Quand le préfet tient une réunion sur l’insécurité avec les élus, on compte les mis en examen !

Justement, les « affaires » qui impliquent des élus locaux ne risquent-elles pas de faire le jeu du FN ?

C’est possible – à Marseille comme ailleurs. Mais il faut se rappeler que dans les villes que le FN a dirigé, ça s’est souvent terminé par des faillites et des scandales aussi. Ensuite, c’est vrai que les scandales qui impliquent de grands élus du PS contribuent à affaiblir la gauche : Jean-Noël Guérini, malgré toutes les malversations dont il est suspecté, préside toujours le Conseil général et tire les ficelles du PS local. C’est ubuesque, mais ça ne suffit pas à faire gagner le FN ; cela dit, ça ne peut pas lui nuire – comme la passivité de la droite marseillaise, qui finit par être suspecte. La vérité, c’est que Marseille aurait besoin d’une grande lessive mais que les politiques locaux s’en lavent les mains.

Hervé Gattegno