BFMTV
Politique

Les réformes et les Français, une relation compliquée

Emmanuel Macron, à Bucarest.

Emmanuel Macron, à Bucarest. - Capture BFMTV

A Bucarest, ce jeudi, Emmanuel Macron a assuré que les Français "détestaient les réformes". Les éditorialistes de BFMTV ont donné leur point de vue sur cette sortie du chef de l'Etat.

Ce jeudi, Emmanuel Macron, face aux expatriés français, a déclaré la chose suivante: "Le peuple français, c’est un peuple qui déteste les réformes. Mais la France n’est elle-même que quand elle mène des combats qui sont plus grands qu’elle". Dépeindre les Français comme "irréformables" est un thème classique parmi les personnalités libérales de la scène hexagonale, notamment en ce qui concerne Emmanuel Macron. Pour autant, le propos se vérifie-t-il? La question a été posée dans la soirée à différents observateurs de notre vie politique sur le plateau de BFMTV. "La réponse est oui! C’est évident", a répondu sans hésiter Christophe Barbier, éditorialiste de notre chaîne.

"Les réformes, on les aime quand elles concernent le voisin"

Il a ensuite dressé un rapide panorama historique de ce sujet: "On peut le formuler de diverses manières. Certains dirigeants disent : ‘On ne peut pas gouverner les Français’. De Gaulle disait : ‘Il y a trop de fromages dans ce pays’ et que ça signalait bien notre incapacité à fonctionner collectivement." Christophe Barbier a martelé:

"Oui, on n’aime pas les réformes, on déteste les réformes, ou plus exactement, on aime bien les réformes quand elles concernent le voisin. Quand c’est au voisin de payer plus, de faire des sacrifices, là on est d’accord. Mais pour soi, quand on est cheminot, fonctionnaire, journaliste ou autre là on ne les aime pas. Donc, c’est une réalité."

Emmanuel Lechypre, éditorialiste de BFMTV et économiste, a abondé dans le même sens, à une nuance près. Selon lui, cette hostilité devant les réformes ne serait pas propre aux Français. "Ce n’est pas les Français qui n’aiment pas la réforme. Connaissez-vous des peuples qui aiment la réforme? est-ce que vous pensez que les Anglais sautaient de joie quand Margareth Thatcher faisait des réformes?" a-t-il lancé. Pour Emmanuel Lechypre, cette attitude tient moins au peuple français qu'à ses dirigeants: "Le problème de la France, c’est que ses dirigeants n’ont jamais vraiment osé réformer. Les Allemands n’étaient pas ravis sous Schroeder de la réforme du marché du Travail mais ça a été imposé parce qu’il y avait de la pédagogie, parce qu’il y a eu du courage politique. Ce qui nous a manqué en France depuis trente ans, c’est le courage politique."

Emmanuel Macron parle peu de "réformes"

Eric Hacquemand, grand reporter politique à Paris match et invité sur notre plateau ce jeudi soir, a lui vu les choses sous un autre prisme. Revenant sur la citation présidentielle du jour, il a d'abord estimé: "Il y a un petit geste de main sur les images, qui laisse à penser à un peu de dédain". Mais Eric Hacquemand a surtout vu une discordance entre cette déclaration et ce qu'Emmanuel Macron a voulu incarner durant sa campagne présidentielle: "Mais c’est étonnant car c’est quand même lui la réforme, c’est lui qui a été élu sur la réforme durant la campagne présidentielle. On se souvient, lui c’était la ‘réforme’, les autres ‘l’immobilisme’, ‘la continuité’, ‘la poursuite des mêmes politiques’." Mais d'après lui, Emmanuel Macron lui-même se méfie du terme "réforme": "Donc, je trouve ça étonnant même si sur le fond, le mot ‘réforme ‘, Emmanuel Macron l’a rarement utilisé pendant la campagne. Ce n’est pas pour rien s’il a écrit un livre qui ne s’appelait pas Réforme, ou Réformisme mais Révolution".

Le journaliste a lui aussi confirmé que les Français entretenaient un lien conflictuel avec l'idée de réformes.

"Si on s’en tient à la lecture de quelques sondages récents, sur la loi Travail, on ne peut pas dire qu’il y a un emballement des Français pour cette réforme-là. Et pour cause, en trente ans, on en est je crois à la quinzième réforme des lois du travail et on en est à combien de chômeurs? Cinq millions? Donc, on peut comprendre que la réforme ait parfois un goût amer."

La réforme du Code du travail dans sa dernière phase

Alors que les concertations sur la réforme du Code du travail entrent dans leur dernière phase, et que des manifestations ont été annoncées pour septembre, cette donnée pourrait s'avérer incontournable pour le gouvernement dans les semaines à venir.

Robin Verner