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Les impôts des groupes du CAC 40 dans le collimateur des députés

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Les plus grandes entreprises françaises paient proportionnellement beaucoup moins d'impôt sur les sociétés que les PME, une situation qui pourrait être corrigée en modifiant certains mécanismes financiers jugés trop avantageux, conclut un rapport parlementaire publié mercredi.

Il préconise notamment de revoir le régime des "prix de transfert" qui régit les transactions internationales entre les différentes entités d'une multinationale, ainsi que celui des reports de déficits.

Ce rapport sur l'application de la loi fiscale rédigé par le rapporteur général du budget à l'Assemblée, l'UMP Gilles Carrez, souligne que le taux moyen "implicite" de l'impôt sur les sociétés payés par les plus grands groupes français n'est que de 18,6%, contre 39,5% pour les petites et moyennes entreprises et 27,5% en moyenne pour l'ensemble des sociétés. Soit un écart de près de 21 points entre PME et groupes du CAC 40.

Le taux facial de l'impôt sur les sociétés (IS) en France est fixé à 33,3% mais les observateurs prennent comme référence le taux "implicite", c'est-à-dire l'impôt payé rapporté à l'excédent d'exploitation.

Autre élément mis en avant par le rapport de l'Assemblée : les entreprises qui réalisent plus de 2,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires ne paient que 15% à 20% des recettes totales de l'IS alors qu'elles représentent 50% à 70% du chiffre d'affaires global.

Et en enlevant d'une part les crédits d'impôt, d'autre part l'impôt payé par les quatre groupes dont l'Etat est actionnaire (EDF, GDF-Suez, France Télécom et Renault), l'IS annuel moyen des autres groupes est inférieur à deux milliards d'euros, précise le document.

"Le niveau d'imposition de beaucoup des entreprises du CAC 40 apparaît donc anormalement faible", conclut-il.

L'IS devrait rapporter au total environ 45 milliards d'euros à l'Etat cette année, contre 52,2 milliards pour l'impôt sur le revenu et 130,9 milliards pour la TVA.

Dans un entretien aux Echos mercredi, Gilles Carrez suggère un plafonnement des charges financières déductibles qui créerait "une sorte d'IS minimum".

MÉCANISMES "PARTICULIÈREMENT AVANTAGEUX"

Très technique en apparence, le sujet est aussi un enjeu politique: au début de l'année, les informations montrant que le groupe pétrolier Total ne payait pas d'IS en France tout en affichant plus de 10 milliards d'euros de bénéfice net annuel avaient suscité un début de polémique.

Plus de 100 députés avaient demandé dans la foulée la création d'une commission d'enquête parlementaire sur l'IS et les moyens utilisés par les grandes entreprises pour le réduire ou y échapper.

Selon l'étude du Trésor citée par le rapport publié mercredi, deux facteurs permettent d'expliquer 75% de l'écart entre le taux moyen d'IS des PME et celui des grandes entreprises: ces dernières ont des charges financières nettes beaucoup plus élevées et elles bénéficient davantage des mécanismes de report des déficits.

Sans remettre en question l'exonération des dividendes versés par des filiales aux maisons mères et celle des plus-values sur les participations, le rapport de l'Assemblée juge "urgent" de travailler sur certains mécanismes de déductions de charges.

Il cite entre autres le taux réduit en matière de brevets, qui prive l'Etat de 800 millions d'euros de recettes et s'ajoute au crédit impôt recherche. Et il préconise surtout un réexamen des régimes de report des déficits, jugés "particulièrement avantageux" par rapport aux règles allemandes pour un coût "extrêmement élevé".

Gonflé par la crise, le "stock" des déficits reportables s'élève à 315 milliards d'euros, soit une réduction potentielle des recettes de l'IS de 53 milliards, précise-t-il.

Marc Angrand, édité par Jean-Baptiste Vey

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