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Politique

Les devoirs de vacances de Nicolas Sarkozy

Nicolas Sarkozy partira dès la fin du conseil des ministres du 3 août pour le Cap Nègre et une pause de trois semaines. Le chef de l'Etat, au plus bas dans les sondages, a matière à réflexion à l'orée de la dernière ligne droite du quinquennat, à 21 mois

Nicolas Sarkozy partira dès la fin du conseil des ministres du 3 août pour le Cap Nègre et une pause de trois semaines. Le chef de l'Etat, au plus bas dans les sondages, a matière à réflexion à l'orée de la dernière ligne droite du quinquennat, à 21 mois - -

par Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Le président Nicolas Sarkozy partira dès la fin du conseil des ministres du 3 août pour le Cap Nègre, dans le...

par Emmanuel Jarry

PARIS (Reuters) - Le président Nicolas Sarkozy partira dès la fin du conseil des ministres du 3 août pour le Cap Nègre, dans le sud de la France, et une pause de trois semaines qu'il mettra à profit pour préparer la rentrée.

Officiellement, ce seront des vacances "familiales et sportives", avec vélo, footing, natation et lecture.

Mais le chef de l'Etat, au plus bas dans les sondages, a aussi matière à réflexion à l'orée de la dernière ligne droite du quinquennat, à 21 mois de l'élection présidentielle de 2012.

L'année a été marquée par les suites de la crise économique de 2009, celle des dettes européennes et de l'euro, une déroute de la droite aux élections régionales, une fronde intermittente au sein de la majorité et des polémiques à répétition sur les écarts de conduite présumés ou avérés de ministres.

La rentrée s'annonce délicate, avec la préparation d'un budget d'austérité, une probable révision à la baisse des prévisions de croissance économique de la France pour 2011 et une journée d'action programmée par les principaux syndicats le 7 septembre, contre la réforme des retraites.

"Je pense que l'été du président va être occupé. C'est l'été où il joue gros", juge un responsable de son parti, l'UMP. "Son problème est de reprendre la main. On a vu avec l'histoire de notre otage au Mali que ce n'était pas le cas."

L'exécution de Michel Germaneau, revendiquée par Al Qaïda au Maghreb islamique après un raid militaire franco-mauritanien de la dernière chance pour tenter de le libérer, a mis fin à une série de succès de la France dans ce type d'affaires.

Le fiasco des Bleus lors de la Coupe du Monde de football en Afrique du Sud a également contribué à la morosité ambiante, accentuée par la perspective d'économies draconiennes pour ramener les déficits publics français à 6% du PIB en 2011.

GARDER FILLON OU PAS ?

"Tout ça concourt à créer un climat pas enthousiasmant", admet le même responsable. "On le voit à la consommation des ménages, qui a fortement baissé en juin. Le président doit trouver le moyen de recréer la confiance en l'avenir."

Nicolas Sarkozy devra se pencher sur la réorganisation du gouvernement, qu'il a annoncée pour octobre afin de calmer les ténors de la majorité qui réclamaient un remaniement rapide.

Ce faisant, il a pris le risque de démobiliser ses ministres ou de susciter des tensions entre rivaux potentiels, comme l'a illustré lundi un échange acerbe entre la secrétaire d'Etat aux Sports Rama Yade et l'ancien judoka David Douillet.

"On est parti pour trois mois d'intox, de rumeurs et de contre-rumeurs", soupire un ministre.

Le Premier ministre, François Fillon, habitué aux spéculations sur son sort, s'est dit prêt à tourner la page.

Deux noms circulent pour lui succéder : ceux du ministre de l'Ecologie Jean-Louis Borloo et de sa collègue de la Justice, Michèle Alliot-Marie. Peuvent-ils incarner la "nouvelle étape" annoncée par le président de la République ? Beaucoup en doutent.

"Une nouvelle étape, c'est de nouvelles réformes ou un changement de politique, pas la préparation d'une élection", souligne le dirigeant d'Ipsos, Jean-François Doridot.

Des membres du gouvernement et des dirigeants de l'UMP font le pari que Nicolas Sarkozy gardera finalement François Fillon.

"Je pense que le président ne le sait pas encore lui-même", tempère un ministre. "On réfléchit, on réfléchit, et tout se décide au dernier moment", confirme un proche du chef de l'Etat.

Seule semble acquise, sous réserve d'inventaire, sa volonté de sabrer dans le nombre de ministres et de secrétaires d'Etat.

Deux ministres sont donnés partants : celui des Affaires étrangères Bernard Kouchner, symbole d'ouverture à gauche, qui ne souhaiterait pas être associé à la campagne présidentielle de 2012 ; et celui de la Défense, Hervé Morin, qui souhaite lui être candidat, contre la volonté du chef de l'Etat.

NICHES FISCALES, INSÉCURITÉ ET G20

Le sort du ministre du Travail, Eric Woerth, éclaboussé par des soupçons de conflit d'intérêts en marge du procès entre l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt et sa fille, est suspendu à l'évolution de cette affaire. Son maintien après le vote de la réforme des retraites en octobre paraît incertain.

Le chef de l'Etat aura peut-être aussi à s'interroger sur une réorganisation à l'Elysée et à l'UMP, dont le secrétaire général Xavier Bertrand a monté une équipe d'une quinzaine de personnes pour commencer à réfléchir à un programme.

Il aura des arbitrages délicats à rendre sur les niches fiscales et sociales à sacrifier sur l'autel des déficits ou de nouvelles économies à trouver si la croissance n'est pas là.

"Les mesures de rigueur doivent être contrebalancées par des mesures de justice sociale", souligne un responsable de l'UMP.

La lutte contre l'insécurité, thème de prédilection de Nicolas Sarkozy, a brutalement été ramenée sur le devant de la scène politique par des faits divers sanglants et un climat quasi insurrectionnel dans des cités, comme à Grenoble.

"Les discours et les statistiques ne suffisent plus", souligne le même responsable du parti présidentiel.

Mais c'est encore sur la scène internationale que Nicolas Sarkozy cherchera à créer les conditions d'un rebond politique, à la faveur de la présidence française du G20 et du G8, à partir de novembre, comme en 2008 avec celle de l'Union européenne.

Il veut en faire un tremplin pour sa croisade en faveur de la régulation des marchés financiers, d'une moralisation du capitalisme et d'un nouveau système monétaire international.

Edité par Sophie Louet