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Les chirurgiens visés pour les implants mammaires PIP

Me Laurent Gaudon, avocat de quatre porteuses d'implants mammaires de la société française PIP compte assigner au civil les chirurgiens qui auraient manqué à leur devoir d'information ainsi que la société allemande Tüv, qui certifiait leur qualité. Le but

Me Laurent Gaudon, avocat de quatre porteuses d'implants mammaires de la société française PIP compte assigner au civil les chirurgiens qui auraient manqué à leur devoir d'information ainsi que la société allemande Tüv, qui certifiait leur qualité. Le but - -

par Natalie Huet MARSEILLE (Reuters) - L'avocat de quatre porteuses d'implants mammaires de la société française PIP a annoncé mardi qu'il allait...

par Natalie Huet

MARSEILLE (Reuters) - L'avocat de quatre porteuses d'implants mammaires de la société française PIP a annoncé mardi qu'il allait assigner au civil les chirurgiens qui auraient manqué à leur devoir d'information et la société allemande Tüv, qui certifiait leur qualité.

Le but est d'obtenir pour les victimes de prothèses défectueuses l'indemnisation qu'elles risquent de ne pas obtenir dans le volet pénal, Poly Implants Prothèses (PIP) ayant été déclaré en faillite en 2010, a dit Laurent Gaudon.

L'avocat se fonde sur un arrêt de la cour d'appel d'Aix de 2008 qui a déjà ciblé la responsabilité d'un chirurgien pour "manquement au devoir d'information" dans des faits qui remontent à 1996 mais concernaient déjà des prothèses PIP.

Outre les sociétés PIP et Tüv, Me Gaudon veut cibler les chirurgiens qui auraient continué à opérer des patientes avec des implants PIP malgré des ruptures en saisissant le tribunal de grande instance de Toulon dès la semaine prochaine.

Dans l'arrêt de la cour d'Aix, la patiente a subi quatre déchirures d'implants PIP et se serait vu réinsérer à chaque fois cette marque sans en avoir été informée, a-t-il dit.

"Le chirurgien est débiteur d'une obligation d'information, comme tous les médecins", a dit Me Gaudon à Reuters.

"Il ne doit pas seulement vous informer sur l'opération elle-même - les risques de cicatrisation, les risques liés à l'anesthésie - mais sur les avantages, les inconvénients des prothèses qu'il va vous insérer et le choix qu'il y a entre les différents types de prothèses", a-t-il ajouté.

D'après l'arrêt, le chirurgien doit apporter la preuve écrite qu'il a bien informé sa patiente des risques de rupture ou de dégonflement des prothèses qu'il envisageait d'implanter.

SILENCE ACHETÉ ?

L'avocat de PIP, Yves Haddad, qui reconnaît que la majorité des implants de la société étaient fabriqués avec du gel non conforme depuis sa création en 1991, a lui aussi pointé du doigt la responsabilité des chirurgiens.

"Ce sont quand même les chirurgiens qui ont implanté ces prothèses mammaires dans le corps des femmes, ils devraient intervenir un peu plus pour dire quel est leur sentiment et quelle est leur position", a-t-il déclaré à Reuters.

De son côté, Philippe Courtois, l'avocat de 1.300 autres plaignantes, demande que Jean-Claude Mas, le président fondateur de PIP, soit mis sous contrôle judiciaire pour éviter toute fuite avant son procès.

Les protagonistes de l'affaire devraient se retrouver avant fin 2012 au centre d'un procès pour "tromperie aggravée", mais aussi d'une instruction judiciaire ouverte pour "blessures et homicide involontaire".

Pour Philippe Courtois, PIP a tenté d'acheter le silence des femmes mécontentes bien avant que le scandale éclate en 2010.

"PIP a traité directement avec les femmes porteuses de ses prothèses en 2007-2008 et cela aussi bien en France qu'en Grande-Bretagne", affirme-t-il.

L'avocat de PIP a reconnu cette pratique, mais a expliqué qu'il s'agissait d'une décision contractuelle.

Les choses sont, pour Yves Haddad, claires puisque Jean-Claude Mas reconnaît avoir violé la législation.

"Il y a un produit fabriqué par la société PIP qui n'a pas reçu formellement l'agrément et à ce titre il y a une infraction à la réglementation", a-t-il dit à Reuters, expliquant que PIP avait un produit d'appel bon marché et un autre, de luxe.

CHARGE CONTRE L'AFSSAPS

Me Haddad a amorcé une contre-attaque en s'interrogeant sur l'intervention, tardive selon lui, des autorités de contrôle.

Il souligne ainsi que l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) n'est ainsi intervenue qu'à la suite d'une dénonciation anonyme.

Pour Yves Haddad, la question que l'on pourrait poser à l'Afssaps, c'est de savoir si des contrôles avaient été réalisés avant cette dénonciation anonyme .

Si des produits étaient fabriqués avec du gel non conforme, l'Afssaps "n'avait pas le droit de l'ignorer. Si elle l'ignorait, c'est qu'elle est négligente", estime l'avocat.

Dès 2000, les autorités sanitaires américaines avaient adressé une mise en garde à PIP sur la qualité de ses implants fabriqués à l'aide de sérum physiologique.

L'Afssaps a déclaré mardi ne pas avoir trouvé trace d'un avertissement de son homologue américaine, ajoutant qu'elle n'avait pas à être obligatoirement mise au courant pour un problème qui n'était pas de type sanitaire à l'époque.

A terme, Me Gaudon espère la création par l'Etat d'un "fonds de garantie" qui prendrait en charge l'explantation et la réimplantation des prothèses PIP.

"On milite pour la création d'un fonds qui, sur le modèle de ce qui a été fait pour le Mediator, indemniserait les victimes et se substituerait à elles dans les poursuites contre PIP, les chirurgiens esthétiques", souligne-t-il.

Le gouvernement français a recommandé le retrait des implants à titre préventif même si le lien entre les prothèses PIP et neuf cas de cancers suspects signalés sur son territoire, dont deux mortels, n'est pas démontré.

On estime à 60 millions d'euros le coût de l'opération d'explantation, qui sera prise en charge par la Sécurité sociale. La pose de nouveaux implants sera à la charge de la patiente, sauf pour les femmes ayant subi une chirurgie réparatrice après un cancer du sein.

Avec service France, édité par Yves Clarisse