BFMTV
Politique

Législatives: vers le retour de quadrangulaires

Photo d'illustration.

Photo d'illustration. - BENJAMIN CREMEL / AFP

Le rapport de force politique exprimé au premier tour de l'élection présidentielle pourrait donner lieu à plusieurs quadrangulaires aux législatives, mais l'arithmétique électorale limite l'augmentation de ce phénomène.

Quatre bulletins au lieu de deux: les seconds tours des élections législatives pourraient, le 18 juin prochain, donner lieu à des quadrangulaires entre les représentants des quatre forces politiques majeures que sont La République en marche, le Front national, Les Républicains et La France insoumise. L'élection présidentielle a en effet achevé l'éclatement d'un bipartisme déjà ébranlé par la montée du Front national durant le quinquennat de François Hollande. Ce contexte politique favorise des élections très serrées, dont les quadrangulaires seraient l'expression ultime.

"Six quadrangulaires sont possibles sur onze circonscriptions en Seine-et-Marne", relève ainsi Le Parisien, "Vers dix quadrangulaires dans les circonscriptions d'Auvergne et Limousin?", s'interroge La Montagne, "en l'état, des quadrangulaires pourraient avoir lieu sur sept circonscriptions" de Haute-Garonne, recense La Dépêche du Midi. Partout, cette hypothèse est envisagée.

La dernière quadrangulaire remonte en effet à 1973 pour des élections législatives. La règle, modifiée en 2003, est la même dans les deux cas: si aucun candidat ne réunit 50% des suffrages exprimés et au moins 25% des électeurs inscrits au premier tour, il faut réunir 12,5% des inscrits sur les listes électorales pour se maintenir au second tour. Si un seul ou aucun candidat n'atteint ce score, les deux premiers sont qualifiés.

La participation, facteur clef

Contrairement à la présidentielle, la participation est décisive quant à la configuration des seconds tours: plus la participation est faible, plus le seuil de qualification des candidats est élevé. Ainsi, pour 100% de participation, le seuil de qualification est à 12,5%, pour 80%, à 15,63%, pour 70% à 17,86%, etc.

En l'espèce, la participation reste une inconnue de l'élection: si l'abstention est habituellement plus forte depuis l'instauration du quinquennat, l'idée d'une troisième manche pourrait également surmobiliser les électeurs. Pour l'heure, ce ne semble pas être le cas. La stratégie de division des Républicains suivie par le nouveau Président, la personnification forte de La France insoumise autour d'un Jean-Luc Mélenchon isolé et le contre-coup de la défaite pour le Front national ont permis à Emmanuel Macron d'asphyxier l'idée d'une revanche.

Illusion nationale

Même en cas de mobilisation forte, la marche reste très haute: il suffit pour s'en rendre compte de rappeler les résultats du premier tour de l'élection présidentielle en nombre d'inscrits, dans un scrutin mobilisateur (22,3% d'abstention): Jean-Luc Mélenchon obtient 14,84%, François Fillon 15,16% et Marine Le Pen 16,14%. À titre d'exemple, dans une circonscription, aucun de ces candidats ne passerait donc la barre qualificative au second tour avec une participation de 70% (17,86%). Selon les règles en vigueur, on assisterait donc à un duel Emmanuel Macron - Marine Le Pen, comme au second tour de la présidentielle.

Par conséquent, les mêmes résultats qui laissent d'abord penser à une augmentation mécanique des "tri" et "quadr" angulaires aux législatives indiquent au contraire que ce phénomène n'a arithmétiquement rien d'automatique (politiquement, le désistement d'un candidat contre le Front national le limitera encore davantage). Enfin, le "calque" de résultats nationaux sur 577 élections locales (méthode utilisée dans la plupart des sondages) est extrêmement trompeur. Rappelons qu'en 2007, le MoDem devait se maintenir dans 476 circonscriptions, pour ne le faire finalement que dans six. 

Louis Nadau