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Politique

Le soutien de Merkel à Sarkozy incommode des deux côtés du Rhin

Le soutien appuyé d'Angela Merkel à un Nicolas Sarkozy pas encore candidat à sa propre succession provoque des remous des deux côtés du Rhin. Critiqué par une partie de la presse allemande, objet de l'ironie de la gauche française, le geste de la chanceli

Le soutien appuyé d'Angela Merkel à un Nicolas Sarkozy pas encore candidat à sa propre succession provoque des remous des deux côtés du Rhin. Critiqué par une partie de la presse allemande, objet de l'ironie de la gauche française, le geste de la chanceli - -

PARIS (Reuters) - Le soutien appuyé d'Angela Merkel à un Nicolas Sarkozy pas encore candidat à sa propre succession provoque des remous des deux...

PARIS (Reuters) - Le soutien appuyé d'Angela Merkel à un Nicolas Sarkozy pas encore candidat à sa propre succession provoque des remous des deux côtés du Rhin, sur fond de crise européenne et de campagne présidentielle française où le "modèle allemand" fait débat.

Critiqué par une partie de la presse allemande, objet de l'ironie de la gauche française, le geste de la chancelière embarrasse jusqu'aux proches du président.

Qu'elle entre "dans le débat public sur tout ce qui concerne l'Europe, les rapports entre la France et l'Allemagne, je trouve cela tout à fait légitime", a déclaré mardi sur Europe 1 le conseiller spécial du chef de l'Etat, Henri Guaino. "Dans la campagne présidentielle elle-même, je suis plus réservé".

Le Premier ministre, François Fillon, qui s'exprimait devant des parlementaires UMP, juge pour sa part "normal qu'Angela Merkel défende ses idées et ses convictions politiques. Il est normal qu'elle apporte son soutien à Nicolas Sarkozy".

Au sortir du conseil des ministres franco-allemand de lundi à Paris, la chancelière a mis tout son poids dans la balance en faveur de Nicolas Sarkozy en affirmant le soutenir "sur tous les plans, car nous appartenons à des partis amis".

Une posture qui provoque mardi l'ironie caustique de la presse allemande, à l'image du titre du quotidien Die Welt : "Comment Angela Merkel s'est éprise d'un lourdaud".

Le journal revient sur le fait que la chancelière ait un temps comparé Nicolas Sarkozy à l'acteur Louis de Funès, archétype du Français pour les Allemands.

"POURQUOI LA CHANCELIÈRE ADMIRE TANT SARKOZY?"

Pour le Süddeutsche Zeitung, Angela Merkel fait peut-être preuve d'un "courage excessif" et prend le risque de "brusquer" le candidat socialiste François Hollande, favori des sondages. Le quotidien soupçonne le gouvernement allemand de vouloir "provoquer une défaite socialiste".

"Pourquoi la chancelière admire tant Sarkozy ?", s'interroge le quotidien populaire Bild tandis que Der Spiegel évoque la "Dream Team" de l'Elysée et le "couple harmonieux" formé par Angela Merkel et de Nicolas Sarkozy.

L'hebdomadaire souligne lui aussi que le "flirt" entre Angela Merkel et Nicolas Sarkozy pourrait endommager la relation franco-allemande en cas de victoire de François Hollande.

Dans un entretien au quotidien français Le Monde daté de mercredi, le ministre allemand des Affaires étrangères, le libéral Guido Westerwelle, tente un rééquilibrage.

"Le gouvernement allemand est neutre et ne participe pas aux élections en France, souligne-t-il. "Nous avons toujours eu de très bonnes relations avec M. Sarkozy".

"Personnellement, je n'ai aucun doute sur le fait que le peuple français saura prendre des décisions sages pour l'Europe", ajoute-t-il.

Un ton sensiblement différent de celui de la chancelière, qui a peu goûté le souhait affiché de François Hollande de renégocier le traité européen adopté dans la douleur par 25 membres désireux de sortir l'Europe de la crise.

Pour François Fillon, "ce qui est le plus critiquable pour elle c'est (que le PS) remette en cause le traité européen".

"Les traités sont signés par des pays, pas par des formations politiques", a-t-il dit mardi selon des députés UMP.

Lundi à Dijon, le candidat socialiste a répliqué par une boutade aux dernières manifestations du tandem "Merkozy".

"Si Mme Merkel veut faire campagne pour Nicolas Sarkozy, elle a parfaitement le droit. Si Nicolas Sarkozy veut que Mme Merkel participe à des meetings, puisqu'il est candidat, il a parfaitement le droit", a-t-il ironisé.

LE "MODÈLE ALLEMAND" EN QUESTION

Depuis le début de sa campagne, François Hollande joue les équilibristes, rappelant l'importance du couple franco-allemand - Berlin sera sa première destination s'il est élu le 6 mai - tout en prenant ses distances avec un "modèle allemand" regardé avec scepticisme par les Français, que seule une courte majorité souhaiterait voir repris dans l'Hexagone.

Son directeur de campagne, Pierre Moscovici, a appelé la chancelière à ne pas compromettre l'avenir de l'amitié franco-allemande en soutenant Nicolas Sarkozy.

"L'amitié franco-allemande, c'est un bien commun qui ne doit pas être abîmé par des amitiés partisanes", a-t-il dit.

"Mme Merkel, en tant que chancelière - je ne parle pas là de la chef conservatrice - doit savoir qu'il y a une possibilité sérieuse, forte, que son prochain interlocuteur ne soit plus Nicolas Sarkozy mais François Hollande. Bref, n'insultons pas l'avenir", a ajouté l'ancien ministre sur France Info.

Jean-Marc Ayrault, conseiller spécial du candidat, espère toujours une rencontre entre François Hollande et Angela Merkel - qui avait reçu la candidate PS Ségolène Royal en 2007 - avant le premier tour de l'élection présidentielle.

"Je pense que ce serait utile qu'elle le reçoive pour discuter", a-t-il dit sur RTL.

Lors de son interview télévisée avec Nicolas Sarkozy lundi soir, la chancelière a refusé de dire si ce serait le cas.

Le très germanophile député-maire de Nantes donne en exemple François Mitterrand et Helmut Kohl, "qui ne se connaissaient pas" quand le socialiste a été élu en France en 1981.

"C'est vraiment pour moi la référence : deux politiques, l'un socialiste, l'autre conservateur, et qui ont créé un élan en Europe, qui ont pris des décisions à l'échelle de l'Histoire", a dit Jean-Marc Ayrault, qui a beaucoup oeuvré pour calmer les tendances germanophobes apparues fin 2011 dans les propos de certains dirigeants PS comme Arnaud Montebourg.

Elizabeth Pineau, avec Patrick Vignal, Emile Picy et Thierry Lévêque, édité par Yves Clarisse