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Politique

Le retour de Sarkozy, une stratégie du quitte ou double

Le retour de Nicolas Sarkozy sur l'avant-scène politique, précipité par le rejet de ses comptes de la campagne électorale de 2012, relève d'une stratégie du quitte ou double pour l'ancien chef de l'Etat, estiment les analystes. /Photo d'archives/REUTERS/S

Le retour de Nicolas Sarkozy sur l'avant-scène politique, précipité par le rejet de ses comptes de la campagne électorale de 2012, relève d'une stratégie du quitte ou double pour l'ancien chef de l'Etat, estiment les analystes. /Photo d'archives/REUTERS/S - -

par Marine Pennetier PARIS (Reuters) - Le retour de Nicolas Sarkozy sur l'avant-scène politique, précipité par le rejet de ses comptes de la...

par Marine Pennetier

PARIS (Reuters) - Le retour de Nicolas Sarkozy sur l'avant-scène politique, précipité par le rejet de ses comptes de la campagne électorale de 2012, relève d'une stratégie du quitte ou double pour l'ancien chef de l'Etat, estiment les analystes.

Sortant de sa réserve, Nicolas Sarkozy a claqué la porte du Conseil constitutionnel et a lancé sur Facebook un appel à la mobilisation pour sauver une UMP "en péril", privée de près de 11 millions d'euros de subventions publiques.

Même si son entourage s'efforce de dire que cela ne marque pas son retour officiel en politique, l'ancien président a affirmé qu'il retrouvait ainsi sa liberté de parole et ses proches ne cachent plus qu'il est impatient d'en découdre.

"Tout va se jouer sur la souscription nationale" lancée pour remplir les caisses de l'UMP, estime Thomas Guénolé, maître de conférence à Sciences Po et auteur de "Nicolas Sarkozy, chronique d'un retour impossible?".

"C'est un Sarkothon, son succès vaudrait plébiscite financier du retour de Nicolas Sarkozy par les électeurs de droite, c'est un quitte ou double", ajoute-t-il. "Si cette souscription est un succès, c'est tapis."

Encore faut-il, souligne-t-il, que Nicolas Sarkozy, qui reste le favori des électeurs de l'UMP pour la présidentielle de 2017, soigne sa communication autour de son retour.

"Pour l'instant, avec le communiqué sur Facebook il a trouvé la parade", estime Thomas Guénolé. "Il se place sous l'angle de l'appel au peuple de droite pour sauver l'UMP en particulier et la démocratie en général, c'est un communiqué de chef d'Etat."

"S'il avait fait un journal de 20 heures pour s'expliquer sur des questions d'argent, quelques jours à peine après Bernard Tapie, le parallèle aurait été très mauvais en terme d'image."

Pour l'ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino, s'il "serait dommage de revenir" dans ces circonstances, l'ancien président "ne peut rester inerte devant les attaques, les accusations que l'on porte contre lui".

CALENDRIER ACCÉLÉRE

Selon des proches cités récemment par le journal Le Monde, Nicolas Sarkozy prévoyait initialement de rester en retrait jusqu'en 2014, lorsque ses soutiens devaient lancer un appel en sa faveur avant de déclencher une offensive en 2015.

Mais sa récente mise en examen pour abus de faiblesse dans l'affaire Bettencourt et les critiques à son égard de François Fillon, désormais candidat à l'élection présidentielle de 2017, l'ont contraint à revoir son calendrier politique et à accélérer les préparatifs pour organiser cet éventuel retour.

Son équipe a été reconstituée et la rédactrice de son programme de 2007, Emmanuelle Mignon, a "repris du service", a dit l'ancien ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux.

Son retour dans l'arène politique devrait se concrétiser dès lundi prochain lors de la réunion extraordinaire du bureau politique de l'UMP, un scénario qui n'est pas sans risque pour Nicolas Sarkozy, estime Stéphane Rozès, président de CAP (Conseils, analyses et perspectives).

"Nicolas Sarkozy doit d'abord penser à son rapport au pays, faire retour sur son échec à la présidentielle, s'interroger sur ce qui a marché ou pas durant son quinquennat", souligne-t-il.

"On voit bien qu'il pourrait être tenté de revenir sur la scène politique comme une victime. Or, les Français ont besoin de rassemblement et de résolution des problèmes, pas de friction ni de victime", poursuit-il. "C'est ça le danger de la situation, il ferait mieux de prendre du recul, faire un travail sur lui, écrire un livre, plutôt que d'être sans cesse dans l'action et dans la réaction."

A la direction de l'UMP, comme dans l'entourage de l'ex-chef de l'Etat, on assure que son message de vendredi et sa participation au bureau politique de lundi n'ont "rien à voir" avec une volonté de revenir sur le devant de la scène politique.

Prenant le contre-pied de nombreux cadres et adhérents de l'UMP, qui rêvent d'un retour de Nicolas Sarkozy, le député UMP Bernard Debré a déclaré vendredi ne pas être "sûr que ce soit forcément bien pour l'UMP et l'opposition de droite."

"Ce serait un peu tôt", a-t-il dit sur LCI. Un retour dans ces conditions "serait dramatique parce que si on revient simplement en politique pour se venger d'une sanction du Conseil constitutionnel, ce n'est pas une bonne chose."

FILLON FRAGILISÉ

Plus d'un an après son échec à l'élection présidentielle, Nicolas Sarkozy reste le favori des sympathisants UMP pour la présidentielle de 2017, avec 67% d'opinions favorables, loin François Fillon (13%), selon un sondage CSA pour Atlantico publié vendredi.

La première victime du retour précipité de Nicolas Sarkozy pourrait être François Fillon qui a déclaré début mai qu'il serait candidat "quoi qu'il arrive" à la primaire de la droite pour 2017. L'ancien Premier ministre risque de se retrouver privé d'espace médiatique, indique Thomas Guénolé.

"Il a même été amené à recommander lui-même que l'UMP soit solidaire de Nicolas Sarkozy dans cette épreuve", souligne-t-il.

Le retour de Nicolas Sarkozy pourrait également créer des divisions au sein d'une UMP à peine sortie de la guerre entre François Fillon et Jean-François Copé pour la présidence du parti à moins d'un an des élections municipales, prévient Stéphane Rozès.

"Je crois que tout ce qui s'est passé n'aide pas l'UMP à l'heure où le FN est dynamique dans certaines villes notamment dans le sud de la France", dit-il.

Avec Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse