BFMTV
Politique

Le gouvernement japonais tente de se projeter dans l'après-crise

Dans les ruines de Kesennuma, dans la préfecture de Miyagi. De nombreuses villes du nord-est du Japon dévasté par le séisme et le tsunami du 11 mars ressemblent encore à des décharges à ciel ouvert. Le gouvernement japonais tente de donner l'image d'un ca

Dans les ruines de Kesennuma, dans la préfecture de Miyagi. De nombreuses villes du nord-est du Japon dévasté par le séisme et le tsunami du 11 mars ressemblent encore à des décharges à ciel ouvert. Le gouvernement japonais tente de donner l'image d'un ca - -

TOKYO (Reuters) - Le gouvernement japonais a tenté vendredi de donner l'image d'un cabinet soucieux de gérer des problèmes à long terme, et non plus une situation de crise, trois semaines exactement après un séisme et un tsunami à l'origine d'un accident nucléaire sans précédent depuis celui de Tchernobyl en 1986.

par Kiyoshi Takenaka et Yoko Nishikawa

TOKYO (Reuters) - Le gouvernement japonais a tenté vendredi de donner l'image d'un cabinet soucieux de gérer des problèmes à long terme, et non plus une situation de crise, trois semaines exactement après un séisme et un tsunami à l'origine d'un accident nucléaire sans précédent depuis celui de Tchernobyl en 1986.

Pour la première fois depuis les jours ayant suivi la double catastrophe naturelle, Yukio Edano, le secrétaire général du gouvernement, s'est présenté à son point-presse quotidien sans son blouson de crise mais vêtu d'un costume.

"Nous avons changé notre tenue pour montrer que le gouvernement est en train de se projeter dans la phase suivante, celle de la remise sur pied et de la reconstruction", a-t-il dit.

Sur le terrain, la crise persiste pourtant.

Dans le nord-est de l'archipel dévasté par le séisme de magnitude 9 survenu le 11 mars et la vague géante qu'il a provoquée, de nombreuses villes ressemblent encore à des décharges à ciel ouvert, avec des voitures encastrées dans des immeubles en ruines, des bateaux en cale sèche involontaire au milieu des rues et des débris partout.

Environ 28.000 personnes sont mortes ou portées disparues et plus de 172.400 autres vivent dans des abris de fortune, en attendant la construction de logements provisoires ou la réparation de leurs maisons.

A ces paysages de désolation s'ajoute la menace lancinante de fuites radioactives en provenance de la centrale de Fukushima-Daiichi, endommagée par le séisme et le tsunami.

ÉVACUATION DE LONG TERME

Des niveaux de radioactivité 4.000 fois supérieurs aux limites admises ont été relevés dans l'eau de mer à proximité de la centrale.

L'exploitant du site, Tokyo Electric Power, est contraint d'asperger les réacteurs afin d'éviter une fusion des coeurs mais l'eau utilisée et donc contaminée semble ensuite fuir des enceintes.

Les 70.000 personnes qui vivaient dans un rayon de 20 km autour de la centrale ont été évacuées et Yukio Edano a lui-même admis vendredi que ces riverains ne pourraient pas revenir chez eux avant longtemps.

C'est une mesure de "long terme", a-t-il dit.

Le gouvernement japonais ne juge pas nécessaire d'élargir cette zone d'évacuation. L'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA) a pourtant relevé à 40 km de la centrale des niveaux de radioactivité supérieurs aux seuils censés déclencher une évacuation.

Pour les experts nucléaires, des années et probablement des décennies seront nécessaires pour rendre les abords de la centrale de nouveau habitables.

Confronté à un défi sans précédent pour le Japon depuis les efforts de reconstruction de l'après Seconde Guerre mondiale, le Premier ministre Naoto Kan est vivement critiqué pour sa gestion d'une crise dont la facture pourrait s'élever à 300 milliards de dollars (212 milliards d'euros).

Les critiques sont au moins aussi virulentes contre Tepco, qui risque de devoir verser un jour d'énormes indemnités pour les conséquences des fuites radioactives, sans parler de la perte possible de la centrale elle-même.

ANGOISSE

D'après la presse japonaise, le gouvernement envisage de prendre partiellement le contrôle de cette société, dont le titre a du coup plongé de 10% à la Bourse de Tokyo après avoir déjà perdu 80% de sa valeur depuis le 11 mars.

Plusieurs pays, au premier rang desquels la France, tentent de venir en aide au Japon.

Des groupes français comme Areva, le numéro un mondial du secteur, et EDF ont dépêché des experts et du matériel pour aider le Japon à reprendre le contrôle de Fukushima.

Les Etats-Unis et l'Allemagne ont prévu d'envoyer des robots pour intervenir dans la centrale endommagée.

A Tokyo, à 240 km au sud de Fukushima, la vie semble reprendre doucement un cours normal même si la crainte de fuites radioactives et d'un nouveau séisme demeurent.

"Je ne m'éloigne jamais de ma maison au-delà de la distance que je pourrais couvrir à pied pour revenir et j'emporte toujours du matériel d'urgence sur moi", explique Noriko Ariura, dont le sac contient une radio, une lampe de poche, une bouteille d'eau et des médicaments.

Signe de l'angoisse dans laquelle vivent les Japonais, Misato Nagashima, une habitante de la préfecture de Fukushima, a amené son bébé né quatre jours après le séisme subir un test au compteur Geiger avant même de le présenter à un pédiatre.

Bertrand Boucey pour le service français