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Politique

La fronde des élus communistes prend de l'ampleur

La proposition de loi socialiste sur une tarification progressive de l'énergie a été rejetée par le Sénat grâce à l'apport des voix des sénateurs communistes à celles des centristes et de l'UMP, nouvelle démonstration du bras de fer engagé par les élus co

La proposition de loi socialiste sur une tarification progressive de l'énergie a été rejetée par le Sénat grâce à l'apport des voix des sénateurs communistes à celles des centristes et de l'UMP, nouvelle démonstration du bras de fer engagé par les élus co - -

Les parlementaires communistes ont entamé un bras de fer avec le gouvernement. Mécontents qu'aucune de leurs propositions ou amendements ne soient retenus par la majorité socialiste, les communistes ont déjà bloqué deux projets de loi. Et ça pourrait continuer, menacent-ils.

Les élus communistes français, ulcérés par le rejet systématique de leurs propositions par le gouvernement, ont engagé un bras de fer inégal mais dévastateur pour l'image d'une équipe au pouvoir déjà accusée d'amateurisme par l'opposition.
Le 23 octobre, l'abstention des députés communistes et de leurs alliés du Parti de gauche lors du vote du volet recettes du budget 2013 a constitué une première alerte. Mais le Parti socialiste dispose seul de la majorité absolue à l'Assemblée. Il en va autrement au Sénat où PS, écologistes et radicaux de gauche -les trois sensibilités représentées au gouvernement- ont besoin des voix du Front de gauche dont fait partie le PCF.
Dans la nuit de mardi à mercredi, le Sénat a rejeté une proposition de loi socialiste instaurant une tarification progressive de l'énergie, grâce à l'apport des voix des sénateurs communistes à celles des centristes et de l'UMP. Le rejet quelques heures plus tard par la commission des finances du Sénat, toujours avec les voix communistes, du projet de loi de programmation des finances publiques 2012-2017, a montré qu'il ne s'agissait pas d'un mouvement d'humeur isolé.
« La loi de programmation financière n'a qu'une raison d'être, c'est de mettre en œuvre le traité budgétaire européen et la loi organique sur la réduction des déficits publics », a expliqué le porte-parole du PCF. Olivier Dartigolles récuse toute idée « d'alliance contre nature » des élus communistes avec l'opposition de droite. « Nous sommes cohérents avec nos prises de position contre la politique d'austérité », fait-il valoir. « Nous sommes très préoccupés par la tournure des événements. L'orientation prise est en échec partout en Europe. C'est un scénario catastrophe ».

« Aucune de nos propositions n'a été retenue »

Les élus communistes, dit-il encore, s'estiment méprisés par un gouvernement qui doit son existence aux quatre millions de voix apportées par le Front de gauche au président François Hollande lors du second tour de l'élection présidentielle. « Aucune de nos propositions, aucun de nos amendements n'a été retenu, que ce soit pour la loi de programmation, le volet recettes du budget 2013 ou la loi sur l'énergie », souligne le porte-parole du PCF. « La dernière réunion entre (le ministre du Budget Jérôme) Cahuzac et le groupe parlementaire date du 10 septembre. Depuis, il n'y a plus rien eu ». « Cette attitude de mépris n'est pas une bonne chose, notamment quand, dans le même temps, ils (le gouvernement) ne cessent de courber l'échine face au patronat », ajoute-t-il.
Un sentiment confirmé par le député communiste André Chassaigne, président du groupe Front de gauche à l'Assemblée, qui dénonce « une forme de rouleau-compresseur » gouvernemental. « On est prêt à mettre la main dans le cambouis, on est prêt à travailler sur les textes de loi. Encore faut-il qu'il y ait une écoute de l'autre côté », souligne-t-il.
Les élus communistes en ont de toute évidence gros sur le cœur. Tout y passe, de l'absence d'une grande réforme fiscale « de gauche » promise par François Hollande pendant la campagne aux « concessions » faites selon eux au patronat en passant par le fait qu'aucun ministre important ou haut responsable socialiste n'ait daigné venir à la Fête de l'Humanité, début septembre.
Face aux plans sociaux, « il n'y a rien, à part les exercices de mannequinat d'Arnaud Montebourg » (le ministre du Redressement productif qui a posé en marinière "made in" France, NDLR), déplore encore Olivier Dartigolles. « Il n'y a aucun acte fort ».

« Qu’on nous respecte »

La fronde des élus communistes n'empêchera pas François Hollande et son Premier ministre de faire voter leurs projets de loi, l'Assemblée nationale ayant de toute façon le dernier mot. Mais elle n'en préoccupe pas moins un gouvernement déjà fort malmené dans les sondages d'opinion et fragilisé par des faux-pas en série, dont l'opposition se délecte.
Le vote communiste contre la proposition de loi sur l'énergie au Sénat « n'est pas un événement anodin », a ainsi estimé le ministre chargé des relations avec le Parlement, Alain Vidalies. « Je pense que sur la loi de finances, on aura exactement le même problème ». Ce que l'on ne dément pas du côté du PCF, où l'on souligne que le vote du budget sera un « temps politique fort ». « S'ils veulent que les choses ne se passent pas ainsi, la balle est dans leur camp », avertit ainsi Olivier Dartigolles.
Il confirme que le PCF entend mettre en avant trois propositions: création d'une tranche de l'impôt sur le revenu (IR) à 50%, indexation sur l'inflation du barème de l'IR, annulation des concessions faites aux "pigeons" qui ont obtenu du gouvernement qu'il revienne sur son projet de durcissement de la taxation des plus-values de cession d'entreprise. « Ce sont trois curseurs très importants pour véritablement apporter des réponses de gauche », souligne-t-il.
André Chassaigne lance pour sa part « très solennellement » un appel au gouvernement et à la majorité: « Que l'on tienne compte des propositions que l'on peut faire, qu'il y ait une forme d'écoute et je dirais une forme de respect ».

La rédaction avec Reuters