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Les drones sont-ils l'avenir militaire de la France?

Un drone américain

Un drone américain - -

Jean-Yves Le Drian confirme l'achat de deux drones aux Etats-Unis mais dénonce le "rendez-vous manqué" de la France avec cette technologie militaire. Que s'est-il passé, quelles sont les perspectives? Tour d'horizon.

L’intervention militaire française au Mali, comme celle en Libye, a mis en lumière les lacunes de l’armée de française en termes de surveillance aérienne. Pour combler celles-ci, la France pourrait acheter, sous réserve d’acceptation du Sénat américain, deux drones de surveillance "MQ-9 Reaper" d’ici la fin 2013. Les deux drones seront "non-armés" mais pourront être aménagés ultérieurement.

Le deal aurait été conclu à l’occasion d’une visite du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian à Wahshington qui a reconnu que la France "avait raté le rendez-vous des drones". Quelles sont les raisons de ce raté français? BFMTV.com fait le point.

> Un drone "Reaper", c'est quoi?

Le Reaper, qui dispose d'une autonomie supérieure à 24 heures, est doté de nombreux équipements de surveillance, notamment des caméras. Il peut emporter bombes et missiles mais les Français ne veulent les utiliser que pour l'observation.

Les Etats-Unis ont 104 Reaper dans leur inventaire. Ils doivent encore en constuire une vingtaine cette année, et 12 en 2014, selon le Pentagone.

Cet achat américain est inéluctable selon le sénateur UMP Jacques Gauthier. "Nous n'avons pas d'autres solutions crédibles", affirme le membre de la commission de défense du Sénat.

> Pourquoi la France est (très) en retard?

Une mauvaise appréciation tout simplement. A l’heure actuelle, Paris possède quatre drones de fabrication israélienne. Il s’agit d’Harfang acquis dans les années 90 et qui ont été utilisés notamment en Afghanistan.

Mais dans un dossier consacré au sujet ce lundi, Libération rapporte que ce "rendez-vous raté", selon les propres mots de Jean-Yves Le Drian, est dû à "un mélange d’aveuglement stratégique et de rivalités industrielles". Les pilotes ne voulaient pas être remplacés, les industriels phosphoraient sur de nouveaux avions (le Rafale notamment) et l’Etat-major militaire n’avait pas pris conscience de l’évolution des combats à venir.

"On a des ingénieurs, de vrais savoir-faire mais on a laissé passer notre chance pour des raisons budgétaires et des questions conceptuelles, explique à BFMTV le spécialiste des questions militaires Pascal Le Pautrémas.

> Que peut faire la France?

"Il y a aujourd'hui deux pays au monde qui construisent des drones, les USA et Israël, nous sommes entrés en contact avec les uns et les autres pour pouvoir en acquérir immédiatement", a admis Jean-Yves Le Drian dimanche sur Europe1.

En 2012, un livre blanc sur la Défense préconisait l’achat de 12 drones mais le ministre de la Défense s’est montré précautionneux sur le sujet. Si deux drones seraient achetés aux Etats-Unis, une grosse commande serait en négocitation avec Israël. Le tout pour une facture avoisinant les 300 millions d'euros.

Notre pays "ne produit pas de drones, ce qui est invraisemblable", s'est emporté le ministre de la Défense.

Et après, comment rattraper notre retard? En fait, trois entreprises ont avancé dans le domaine et sont, a minima, en capacité de produire des "Male" (Drone de "moyenne altitude, longue endurance"): Cassidian, filiale d'EADS, Dassault Aviation et BAE Systems. L'un des problèmes est qu'elles se livrent une concurrence improductive.

La première citée serait en avance en termes de recherche.

Le conflit entre ces groupes européens a, jusqu’à très récemment, été alimenté par des rivalités politiques, puisqu’à son arrivée à Matignon en mai 2012, Jean-Marc Ayrault a remis en cause une décisions de François Fillon de confier à Dassault la construction de drone.

> Un projet européen?

Imaginé un temps, un partenariat avec la Grande-Bretagne devrait être élargi à une coopération avec les Britanniques et les Allemands. Avec en toile de fond le projet récurrent d’une force militaire européenne.

Il faut "se préparer à construire au niveau européen des drones d'une nouvelle génération" a dit Jean-Yves Le Drian. "La France a trop attendu un projet à l'échelle européenne, esime Pascal Le Pautremas. Et rien n'a abouti."

Si celui-ci se mettait en place il ne serait pas productif avant une vingtaine d'années. Soit à l'horizon 2035.

Largement de quoi manquer un "autre rendez-vous".