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Incendies dans le Sud: le gouvernement confronté à la réalité du terrain

Edouard Philippe s'est rendu dans le Var mercredi.

Edouard Philippe s'est rendu dans le Var mercredi. - Anne-Christine Poujoulat - AFP

Le gouvernement commence à essuyer des critiques sur la gestion des incendies et les moyens apportés pour les combattre, alors que plus de 7000 hectares sont partis en fumée en quelques jours dans le sud de la France.

14 ans que la France n'avait pas connu de tels incendies. Le Var, Vaucluse, la Corse ou encore les Alpes-Maritimes brûlent. Alors que 4000 hommes luttent au sol contre les flammes, plus de 7000 hectares sont déjà partis en fumée - dont 4000 pour le seul Var. Si l'objectif est bien de maîtriser les différents feux, pour les sapeurs-pompiers il s'agit également de lutter contre la fatigue après 48 heures de combat particulièrement intenses. Et de faire entendre les premières critiques en direction du gouvernement. Car la question se pose: la France met-elle les moyens nécessaires pour lutter efficacement contre ces incendies?

L'heure n'est pas encore à la crise mais pour tenter d'éteindre tout début de polémique, le gouvernement fait bloc. Déplacement du ministre de l'Intérieur à Biguglia en Corse mardi, visite du Premier ministre et du ministre de l'Intérieur mercredi à Bormes-les-Mimosas, dans le Var. A chaque fois, le mot d'ordre est le même: la situation est sous contrôle.

"Ce que je sais, c’est que les moyens qui sont présents sont des moyens importants, sont des moyens qui sont maîtrisés par des vrais professionnels, a estimé Edouard Philippe. Ce sont des moyens qui sont susceptibles d’être mobilisés ici et qui viennent parfois de plus loin."

Un parc aérien vieillissant

Des renforts humains sont venus de toute la France ces derniers jours dans le sud du pays. En Corse, un avion italien a participé aux opérations de largage d'eau. Car le nœud du problème résiderait dans un parc aérien insuffisant, vieillissant et surtout sur-utilisé ces derniers jours.

"Depuis le début de la campagne de feu, 2000 heures de vol ont été effectuées, soit une augmentation de 800 à 9000 heures de vols, notait mercredi sur BFMTV Jacques Witowski, le directeur de la Sécurité civile. Ce qui correspond à 80 à 120 heures de vols par jour."

Cette sur-mobilisation a pour conséquence directe des pannes. Une partie des 26 avions mobilisés, dont 12 Canadair, et des 35 hélicoptères de la Sécurité civile reste clouée au sol. La faute, selon les pompiers, au manque de pièces de rechange.

"Nous avons une flotte aérienne qui vieillit, un type d’avion doit être renouvelé, les trackers, détaille Eric Faure, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Ils ont une limite de vie à 60 ans, certains ont déjà atteint cette limite de vie. Ils ont été retirés de notre flotte. On est passé de 14 à 9 et les 9 qui volent vont avoir 60 ans dans les toutes prochaines années."

Vers une solution européenne?

Si le ministre de l'Intérieur assure que la flotte "est aujourd'hui suffisante en France" mais doit "faire l'objet à chaque fois d'un entretien quand elle revient à terre", Gérard Collomb a annoncé mardi l'achat de six bombardiers d’eau de type Dash 8. "Il fallait prendre cette décision, nous l’attendions depuis 2010", constate Eric Faure, qui estime que cet achat aura une conséquence à plus ou moins long terme alors que les avions ne pourront être utilisés que dans quatre à cinq ans.

Le dernier grand renouvellement de la flotte aérienne, et notamment des Canadair, a été réalisé il y a plus de 20 ans, en 1995. Alors qu'une économie de 526 millions d'euros au ministère de l'Intérieur a été annoncée par Bercy, la priorité de la place Beauvau ne devrait pas être au renouvellement de ces avions. "C’est encore une fois une histoire de gros sous. Est-ce qu’il faut acheter des Canadair et des avions pour parer au niveau le plus élevé d’incendie qui n’arrive pas tous les ans", s'interroge Christophe Barbier, éditorialiste politique à BFMTV, qui estime que d'autres pistes doivent être envisagées.

"La solution est européenne, la solution, c’est d’avoir une force mutualisée qui permet de mettre tous les moyens sur le Portugal quand ça brûle fort comme il y a eu quelques mois, de les mettre ensuite en Italie ou en Espagne quand il le faut et ensuite en France quand elle est touchée, conclut-il. A charge ensuite aux états de s’entendre pour leur usage."

Justine Chevalier