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Fronde contre la loi du travail: comment Valls peut-il s'en tirer?

Manuel Valls, le 22 février 2016

Manuel Valls, le 22 février 2016 - Sébastien Bozon - AFP

La position déterminée de Manuel Valls sur la réforme du travail le positionne un peu plus sur l'aile très libérale du PS. Certains y voient une stratégie pour 2017.

"J'irai jusqu'au bout", a martelé le Premier ministre Manuel Valls au sujet de la réforme du droit du travail. Pourtant, le chef du gouvernement est sous pression. Il doit défendre un texte très décrié à gauche dans une tribune signée par 18 personnalités dont Martine Aubry, et par les syndicats.

"Je ne suis pas troublé par le débat", y compris au sein du gouvernement, a assuré Manuel Valls sur RTL à propos des doutes exprimés notamment par Ségolène Royal ou Marisol Touraine, tout en demandant aux ministres de "s'engager pleinement". 

Interrogé sur le fait de savoir s'il préparait en fait "l'échec électoral de François Hollande" en 2017 en le coupant de sa gauche avec des textes comme le projet de loi sur le travail, le Premier ministre a lâché: "drôle d'analyse!". A quoi il a ajouté: "je ne pense pas à un horizon électoral".

Un départ de Matignon avant la fin du quinquennat?

Pourtant la position ferme de Manuel Valls pour défendre une version très libérale du projet de loi El Khomri pourrait bien être une démonstration de force. Certains observateurs envisagent même que cela puisse augurer son départ du gouvernement, afin de préparer 2017... alors que la candidature de François Hollande n'est plus une évidence. "Manuel Valls veut-il claquer la porte de Matignon?", s'interroge par exemple Challenges. Quant au site d'information Atlantico, il se penche sur "les calculs de plus en plus visibles de Manuel Valls pour faire chuter Hollande et exploser la gauche".

D'après Le Parisien, qui évoque "la guerre froide" entre François Hollande et son Premier ministre, Manuel Valls envisagerait en outre de publier un livre avant la fin de l'année.

Le quotidien cite "un conseiller du pouvoir" qui se dit persuadé que "Valls veut être candidat à la présidentielle dès 2017". "Il cherche un prétexte pour partir. Regardez comme il hystérise le débat autour de la loi El Khomri", analyse le conseiller.

La situation rappelle la démission de Jacques Chirac en 1976. Ce dernier avait quitté la tête du gouvernement, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing en argumentant: "Je ne dispose pas des moyens que j'estime nécessaires pour assumer efficacement les fonctions de Premier ministre". Cinq ans plus tard, il se présentait (et échouait) à l'élection présidentielle.

Des tensions grandissantes au sommet de l'Etat

En se positionnant en première ligne sur ce projet de réforme, Manuel Valls se veut le chantre d'une gauche progressiste et réaliste. Face à un premier ministre à l'offensive, François Hollande tergiverse, considérant que "le mieux serait de trouver une majorité". Les prises de position antagonistes au sommet de l'Etat sur ce dossier sont le signe sinon d'une rupture du moins de tensions qui s'accumulent après le débat sur la déchéance de nationalité et le remaniement. 

Pour le chef du service politique de BFMTV, Thierry Arnaud, le texte est "un réquisitoire impressionnant contre tout ce qui a marqué la politique de François Hollande" et provoque une des "crises les plus graves pour la gauche" qui pourrait bien remettre en question "le maintien de Manuel Valls à Matignon". Hollande pourrait-il le pousser vers la sortie? Manuel Valls se retrouverait alors dans la situation de Jacques Chaban-Delmas, un Premier ministre souvent sur le devant de la scène qui affirmait des positions divergentes, et que Georges Pompidou a fini par démissionner en 1972.

A. D.