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Attentat de Manchester: la "bourde" de Gérard Collomb fâche les Britanniques

Gérard Collomb a décrit le parcours de l'auteur présumé de l'attentat de Manchester.

Gérard Collomb a décrit le parcours de l'auteur présumé de l'attentat de Manchester. - AFP

Le ministre de l'Intérieur français a divulgué mercredi matin des éléments sur le parcours de l'auteur présumé de l'attentat de Manchester. Une communication qui passe mal auprès de la police britannique qui veut rester discrète sur l'enquête.

Depuis lundi soir, les autorités britanniques font preuve de prudence en matière de communication des élément de l'enquête sur l'attentat de Manchester. L'identité de l'auteur présumé de l'attaque confirmée plusieurs heures après qu'elle soit diffusée par la presse américaine, la liste des victimes non communiquée alors que les photos s'étalent sur les réseaux sociaux... Autant d'éléments fuitant du dossier, dans lequel cinq personnes sont actuellement entendues, qui agacent au sommet de l'Etat.

C'est une ministre de l'Intérieur britannique, "irritée", qui a fait une mise au point mercredi matin sur la communication des éléments de l'enquête. Dans son viseur, les autorités américaines. "La police britannique a été très claire dans sa volonté de contrôler la publication des informations afin de protéger l'intégrité (de l'enquête, NDLR), l'élément de surprise", a rappelé sur NBC Amber Rudd. Dans cette interview, repérée par L'Express, la ministre l'assure: "J'ai été très claire avec nos partenaires, il ne faut pas que cela se reproduise". 

Ne pas alerter d'éventuels complices

Problème, mercredi matin, le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, annonçait sur BFMTV et RMC que l'auteur présumé était "sans doute" passé par la Syrie. Le locataire de la place Beauvau a alors décrit le parcours de Salman Abedi qui "tout d'un coup, après un voyage en Libye puis sans doute en Syrie, se radicalise et décide de commettre cet attentat". Des informations transmises par les services britanniques qui espéraient un peu plus de discrétion.

Immédiatement, les déclarations de Gérard Collomb ont été qualifiées de "bourde" outre-Manche. "La police et les services de sécurité ont généralement de bonnes raisons de ne pas divulguer immédiatement ces informations aux médias", a regretté le Guardian, qualifiant les propos du ministre français de "désespérante". Ainsi, cette nécessité s'explique par la volonté de ne pas alerter d'éventuels complices que le kamikaze présumé a été identifié et que les investigations pourraient conduire jusqu'à eux. 

"Au début de la journée, les services de sécurité n'avaient pas l'intention de divulguer le nom et ne l'ont peut-être fait qu'à cause des Américains", avance le journal britannique.

L'entourage du ministre de l'Intérieur assure qu'aucune bourde n'a été commise, d'autant que les autorités britanniques ne se sont pas exprimées sur ce sujet. Dans un communiqué publié par L'Express, place Beauvau explique que Gérard Collomb "a fait état du passage en Libye du terroriste, déjà connu, en évoquant l'hypothèse syrienne, parcours souvent vu chez d'autres terroristes, qui n'est pas établi à cette heure. Enfin, il a évoqué ses liens avec le groupe Etat islamique, qui a revendiqué cet attentat".

"Beaucoup de rumeurs"

Alors qu'Emmanuel Macron a appelé mardi à renforcer "la coopération européenne" en matière de lutte contre le terrorisme, ces erreurs de communication en série pourraient compromettre les échanges entre les différents pays. Déjà, selon le Washington Post et d'autres médias, Donald Trump aurait dévoilé début mai à des responsables russes des informations hautement classifiées et provenant d'un partenaire des Etats-Unis sur un projet de l'organisation jihadiste Etat islamique pour piéger des ordinateurs portables susceptibles d'exploser à bord d'un avion. Une information qui provenait de son allié israélien.

"La tentation pour la police britannique et les services de renseignement serait de cesser de partager certains de ses renseignements, rappelle The Guardian. Mais le Royaume-Uni dépend tellement du partage des renseignements provenant des États-Unis et bénéficie également des services de renseignement, en particulier sur le terrorisme, de collègues européens tels que la France et l'Allemagne."

Dans ce contexte tendu, le chef de la police de Manchester a tenu un point-presse succinct sur les avancées de l'enquête ce mercredi après-midi. Abordant à peine les interpellations ou les perquisitions menées par ces services, Ian Hopkins s'est attardé sur le dispositif de sécurité mis en place dans les rues de Manchester depuis l'attaque. "Il y a beaucoup de rumeurs sur les réseaux sociaux sur l’identité des victimes, a-t-il déplore. Je ne peux pas vous confirmer les identités, car ce sont les familles qui l’ont voulu."

J.C.