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Rassemblement national

Front national: "Jeanne", le micro-parti au service de Marine Le Pen

Marine Le Pen présidente du Front national, pendant la campagne présidentielle de 2012.

Marine Le Pen présidente du Front national, pendant la campagne présidentielle de 2012. - -

"Mediapart" a révélé mardi l'existence d'un micro-parti à l'intérieur du FN, conçu pour financer les activités d'Eric Chatillon, ex-GUD et proche de Marine Le Pen.

"Jeanne", en hommage évident à Jeanne d'Arc, a été créé pendant la guerre de succession qui avait opposé Marine Le Pen à son challenger, Bruno Gollnisch, jusqu'au début de l'année 2011. Mais de quoi s'agit-il? Mediapart révèle ce mardi que "Jeanne" est un micro-parti, sans adhérents ou presque, placé au service exclusif de Marine Le Pen.

Une petite entreprise rentable

Avant la présidentielle de 2012, des difficultés financières avaient frappé le Front national contraint alors, pour éviter le naufrage, de vendre son "Paquebot", son ancien siège situé à Saint-Cloud. La campagne de la candidate dépendait de cette vente. Autant dire que financièrement parlant, le FN n'était à l'époque pas à la fête.

Mais "Jeanne" a su tirer son épingle du jeu. 450.000 euros ont ainsi été prêtés au FN pour la campagne présidentielle de Marine Le Pen, au taux "exceptionnellement élevé" de 7%, explique Mediapart, qui a consulté les comptes de l'élection. Au final, 19.000 euros d'intérêts ont été reversés à "Jeanne". Le trésorier du parti lui-même, Wallerand de Saint-Just, n'était manifestement pas au courant d'une telle transaction.

Eric Chatillon, le conseiller "gudar"

Mais pour qui roule ce micro-parti? Non pour Marine Le Pen, sans lien officiel avec lui, mais pour l'un de ses conseillers, Eric Chatillon. Ce dernier est un ancien du GUD (Groupe Union et Défense), un groupement d'extrême droite créé en 1968 à l’université Paris II Panthéon Assas, à Paris. Il en avait même été le président en 1991. Marine Le Pen avait étudié dans cette même université d'Assas, au début des années 80. A l'époque, elle faisait partie du Cercle national des étudiants de Paris, une organisation idéologiquement proche du Front national.

"Micro-parti", Etat dans l'Etat, ou pas?

"Jeanne" est-il un micro-parti? Mediapart rapporte des appréciations qui ont évolué au fil du temps. En 2011, le directeur administratif du FN, Jean-Michel Dubois, reconnaissait: "Oui, c'est un parti qui soutient Marine Le Pen". L'affirmation était la même chez le trésorier, Wallerand de Saint-Just.

Depuis, la qualification de micro-parti a été rejetée, notamment par Steeve Briois, mandataire financier du parti et secrétaire général suppléant de Marine Le Pen.

Le nom de Marine Le Pen n'apparaît cependant à aucun moment dans les statuts de cette micro-organisation, qu'elle soit un micro-parti ou pas.

A qui profite "Jeanne"?

Avec 180 euros tirés d'adhésions en 2011, 11.500 euros issus de dons personnels la même année, puis 11.000 euros en 2012, les comptes de Jeanne exposés par Steeve Briois ne donnent pas le tournis.

En réalité, cette officine est plus une entreprise commerciale. Son rôle est double: prêter de l'argent aux candidats FN (là encore à un de taux de 6,5 ou 7%), et vendre des kits de campagne –tracts, retouches photo pour affiches, brochures de programmes. Lors des législatives de 2012, quand ces kits ont été rendus obligatoires, leur prix a explosé, pour atteindre 16.000 euros de recettes.

Ce n'est pourtant pas "Jeanne" qui tire profit de cette activité. Ses marges sont relativement faibles. Il en va en revanche autrement pour le grossiste qui fournit le matériel, l'agence de communication Riwal. Un numéro du registre du commerce inscrit sur certains des tracts fournis aux candidats a permis de remonter jusqu'à cette entreprise. Elle appartient à Eric Chatillon.

Mais cette pratique révélée par Mediapart est-elle vraiment nouvelle? Dans Le système Le Pen, les journalistes du Monde Abel Mestre et Caroline Monnot évoquaient déjà des officines aux pratiques comparables.

D. N.